Abuja vient de décider l’extradition d’un sénateur accusé par la justice américaine de diriger un réseau de trafic de drogue qui officiait en territoire américain. En effet, l’agence antidrogue nigériane compte remettre au plus tôt, Buruji Kashumi aux autorités fédérales américaines qui essayent de l’arrêter pour trafic d’héroïne.
Ce dernier avait déjà été arrêté en 1998 par Scotland Yard, lors d’un passage par la Grande Bretagne. Une arrestation qui a été écourté grâce à la malice de Kashumi qui avait fait croire aux enquêteurs que les accusations de trafic de drogue visaient son frère et que les enquêteurs américains auraient confondus entre les deux en émettant leur mandat.
Kashumi ne lâche rien
Une ligne de défense « audacieuse », mais qui permettra au politicien véreux d’être libéré en 2003. Une fois libre Kashamu, s’est empressé de revenir au Nigéria où il s’est rapidement hissé parmi les grands bailleurs de fonds du Parti démocratique populaire (PDP), au pouvoir de 1999 jusqu’aux élections de 2015. Une année où menacé par l’agence antidrogue nigériane qui s’apprêtait à accéder aux demandes d’extradition de Washington, Kashamu a pris les devants en poursuivant en justice le gouvernement américain. Une plainte justifiée par le plaignant suite au « risque d’un enlèvement illégal imminent au Nigeria ».
Une requête que vient de rejeter la Cour d’appel de Chicago. Cette décision de justice représente un soutien de taille à la National Drug Enforcement Agency (NDLEA) et lui a permis de dépasser les obstacles juridiques qui se dressaient devant elle au Nigeria et l’empêchait de procéder à l’arrestation et l’extradition de Buruji Kashamu.
Ce dernier ne s’avoue pas vaincu pour autant. En témoigne l’action intenté par ses avocats pour annuler la sentence de la Cour d’appel de Chicago. Au niveau du Nigeria, ses mandataires ont également réussi à décrocher une ordonnance empêchant le NDLEA d’arrêter Kashamu. Une action que le bureau juridique du NDLEA s’efforce d’annuler.
Afrique de l’Ouest ou la A 1 des cartels
Cet acte d’extradition à l’encontre du sénateur PDP remonte à 1994, suite à l’arrestation d’un passeur transportant 6,4 kg d’héroïne, à l’aéroport O’Hare de Chicago. Lors de son interrogatoire, ce dernier avait identifié Kashamu comme le chef de cette filière de trafic d’héroïne, qu’il dirigeait depuis le Bénin.
Un coup de filet qui est venu corroborer une enquête d’Ameripol (l’Interpol latino-américain) rendue publique en 2014 qui alertait les autorités européennes et Nord-américaine d’un changement d’habitude des cartels de drogues. En effet, sous la pression des différentes agences et corps d’armée américains (DEA, FBI, NSA, garde-côtes, US-Navy…), les cartels ont de moins en moins recours aux routes traditionnels, à savoir via les Caraïbes et l’Amérique Centrale.
Cette montée en régime des contrôles frontaliers a poussé les cartels à relocaliser une grande partie de leur flux vers l’Afrique de l’Ouest comme nouveau point de passage vers les marchés européens et américains. Une nouvelle liaison surnommée « A 1 » démarre depuis le Nigeria, la Guinée Bissau ou encore la Guinée Equatoriale où les cartels jouissent de soutiens hauts-placés. Une fois débarqués les convois traversent le sahel via les zones qui échappent au contrôle des gouvernements locaux et sous la protection des organisations djihadistes connues pour « faire le djihad le jour et convoyer des tonnes de drogues durs la nuit ». Après le Sahel, les cargaisons atteignent les côtes méditerranéennes notamment libyennes d’où elles transitent vers l’Europe.