La Banque africaine de développement avait déjà tiré la sonnette d’alarme. L’institution panafricaine chiffrait à 148 milliards de dollars par an, les pertes pour l’Afrique liées à la corruption. Un constat confirmé par le rapport 2016 de l’ONG Transparency international qui brosse un sombre portrait du fardeau de la corruption en Afrique. L’indice annuel de Transparency International passe au crible la perception de la corruption dans le secteur public dans 176 pays à travers le monde que classe avec une moyenne comprise entre 0 (pays les plus corrompus) à 100 (pays les plus vertueux).
Selon l’ONG, la corruption aurait globalement régressé dans le monde. Même si elle n’échappe pas à cette tendance à la faveur des efforts gouvernementaux sur les instruments juridiques, l’Afrique reste le contient le plus gangrené par la corruption. Preuve en est que la plupart des pays africains n’ont pas réussi à dépasser ou stagnent à une moyenne inférieure à 50/100.
Botswana, pays le moins corrompu d’Afrique
Pourtant, certains pays d’Afrique subsaharienne se hissent en haut du classement continental. Le Botswana confirme sa réputation de pays le moins corrompu d’Afrique. La République d’Afrique australe applique une tolérance zéro pour les actes de corruption dans ses administrations publiques. Des mesures fortes qui la hissent à la 35ème place du classement mondial avec un score certes en baisse (60/100 en 2016 contre 63 une année auparavant) mais qui lui permettent aussi d’occuper la première marche du podium.
Le Cabo-Verde vient derrière avec un score amélioré (59/100 en 2016 contre 55/100 en 2015) pour occuper la deuxième place sur la liste des pays les plus vertueux en Afrique. L’archipel souvent cité en exemple démocratique, fait de la guerre contre la corruption, un des leviers de réduction des inégalités dans le pays. Résultat : avec son 38ème rang, le pays occupe la première place en Afrique de l’Ouest.
En troisième position sur le podium continental et en ex-aequo, le Rwanda et l’Ile-Maurice se partagent la 50ème place mondiale, respectivement avec des scores de 54/100. Si le Rwanda stagne avec le même score pour les deux derniers classements de Transparency, L’île-Maurice a sensiblement amélioré son score (54/100 en 2016 contre 53/100 en 2015).
De sa 53ème place mondiale, la Namibie est le cinquième pays africain le moins corrompu avec un score (52/100) en baisse d’un point. La République diamantifère d’Afrique centrale subit les soubresauts de ses richesses qui attirent des entreprises occidentales et chinoises qui se mènent une lutte souvent constituée de coups bas et de corruption de hauts responsables. La réputation du pays en pâtit au point de dégringoler.
Les pays qui complètent le top 10 africain sont en dessous de la moyenne. Sao-Tomé-Et-Principe avec sa 62ème place (avec un score 46/100 en 2016 contre 42/100 en 2015) occupe la 6ème place sur le continent. La 7ème place revient au Sénégal (45/100 en 2016 contre 44 en 2015) tandis que l’Afrique du Sud avec sa 64ème place mondiale se retrouve au 8ème rang africain. Le Ghana (70ème mondial avec un score de 43/100 en baisse de 4 points) et le Burkina (72ème avec 42/100 avec un bond de 4 points) ferment la marche du top10.
L’espoir d’une lutte plus efficace contre la corruption
Fait notable relevé par ce ranking, les deux premières économies du continent, le Nigéria et l’Afrique du Sud, n’ont pas réussi à améliorer leur score anti-corruption, creusant ainsi les inégalités dans des domaines prioritaires pour les populations vulnérables. Le Nigéria est secoué ces dernières années par des scandales de corruption liés à la manne pétrolière et dans lesquels sont impliqués plusieurs hauts responsables. Pour contrer le phénomène, la première économie africaine a lancé une prime pour les lanceurs d’alerte sur les actes anti-corruption.
L’Afrique du Sud n’est pas mieux loti. Le président Jacob Zuma, épinglé par le rapport de la Médiatrice de la République pour des connivences avec la richissime famille Gupta au point d’alimenter des soupçons de corruption de son administration, avait reconnu lors du congrès anniversaire de l’ANC, qu’il fallait lutter plus efficacement contre la corruption dans son pays. Le pays de Nelson Mandela devrait sans doute se référer au guide édité par la Banque africaine de développement pour lutter contre la corruption.
Ces deux cas illustratifs semblent confirmer l’idée d’un continent où la corruption a durablement pris pied. Mais l’espoir renaît avec les mesures prises ces dernières années par les pays africains. Au Togo, les autorités ont décidé de réactiver la Haute autorité de lutte contre la corruption. Au même moment, le Tchad annonçait la création d’une Cour spéciale chargée de réprimer les actes de corruption dans le pays. Il faudrait désormais prendre en plus de ces mesures, d’autres stratégies pour réprimer les corrupteurs, pays ou multinationales. Pour cela, il faudrait peut-être un autre rapport pour saisir l’ampleur.
avec latribune afrique