Certaines bactéries situées dans nos poumons ont des effets bénéfiques contre l’asthme, a découvert une équipe de recherche française, qui a déposé un brevet pour exploiter leur potentiel thérapeutique.
Si l’on connait de mieux en mieux le microbiote intestinal – ces milliards de bactéries qui peuplent notre intestin -, ce n’est pas le cas du microbiote… pulmonaire. En effet, nos poumons possèdent eux aussi une communauté microbienne, encore peu explorée des scientifiques. Ces bactéries sont loin d’être neutres sur notre santé : les molécules qu’elles produisent peuvent atténuer ou exacerber certaines pathologies respiratoires, comme l’asthme. C’est la découverte de chercheurs de l’Institut national de la recherche agronomique (Inra), en collaboration avec leurs collègues de l’Université de Gand (Belgique).
Dans les poumons, la colonisation bactérienne accompagne la maturation des défenses immunitaires
Considérés très longtemps comme stériles, nos poumons regorgent en fait de diverses bactéries, du genre Bacteroidetes, Pseudomonas, Streptococcus, Prevotella, Veillonella… Le mucus produit par les cellules bronchiques en piège une partie dans l’air et les expulse des poumons grâce aux mouvements de cellules ciliées. On savait que le climat, l’exposition à l’environnement et aux animaux domestiques influencent la composition de ce microbiote. Mais l’on ignorait jusqu’à présent le rôle de ce dernier sur l’asthme, qui touche 4 millions de personnes en France (dont 9 % d’enfants).
Dans cette étude, les chercheurs de l’Inra ont élevé deux groupes de souris dans des conditions distinctes : stérile pour les unes, classique pour les autres (c’est-à-dire en contact avec des micro-organismes). Ils ont remarqué que les poumons des animaux du premier groupe présentent des différences dans le niveau d’expression de certains gènes par rapport à ceux des souris “normales”, ce qui signifie que l’environnement dans lequel elles ont grandi peut changer les capacités de défense de leurs poumons. En l’occurrence, les souris vivant dans le milieu non stérile se sont avérées bien plus résistantes aux infections pulmonaires. “La colonisation bactérienne des poumons se fait progressivement à partir de la naissance et accompagne la maturation des défenses immunitaires pulmonaires”, précisent les scientifiques.
Afin d’étudier les effets protecteurs (ou non) des bactéries des poumons vis-à-vis de l’asthme, ces derniers ont cultivé et caractérisé des souches bactériennes isolées à partir de poumons de souris sans pathologie. Trois souches de microorganismes ont été retenues et ont été administrées séparément par inoculation nasale à des souriceaux, avant que les animaux ne respirent des allergènes d’acariens. Résultat : la première souche n’a eu aucun effet sur la pathologie, la deuxième (baptisée “CNCM I 4969” dans la publication) a diminué les symptômes de la maladie chez les souriceaux et la troisième (CNCM I 4970) a exacerbé l’asthme. “Ce travail montre que les bactéries pulmonaires constituent une source encore inexplorée de bactéries, ou de molécules produites par des bactéries, pouvant atténuer (ou accroître) certaines pathologies respiratoires comme l’asthme, expliquent dans un communiqué les chercheurs. Un brevet a été déposé sur les applications en santé respiratoire de certaines bactéries pulmonaires.” Les auteurs poursuivent leurs travaux, notamment pour déterminer si ces bactéries pulmonaires peuvent changer la susceptibilité vis-à-vis d’affections respiratoires touchant le nouveau-né.
Avec sciences et avenir