Quatre ans après le déclenchement de l’opération Serval, le Mali accueille, les 13 et 14 janvier, le 27e sommet Afrique-France.
Le ton est donné dès la sortie de l’aéroport, dont le nouveau terminal a été inauguré pour l’occasion. Des policiers et des gendarmes sont positionnés tout du long de la route menant à Bamako. Dans le centre-ville, un déploiement sécuritaire inédit témoigne de l’importance de l’événement en préparation : le 27e sommet Afrique-France, qui se tiendra vendredi 13 et samedi 14 janvier à Bamako.
Un peu plus de trois ans après celui de l’Élysée, en décembre 2013, ce sommet sera symbolique à plusieurs titres. Outre les questions de coopération entre le continent et la France, il s’agira du dernier sommet de François Hollande, dans le pays qui fut le principal dossier africain de son quinquennat.
Ce sommet sera aussi l’occasion de faire le bilan de l’engagement français au Mali depuis le déclenchement de l’opération Serval, et plus largement dans toute la bande sahélo-saharienne, autre axe fort de la politique sécuritaire française en Afrique.
Le symbole d’une relation « particulière » entre le Mali et la France
Le 11 janvier 2013, François Hollande déclenchait l’opération Serval au Mali. Quatre ans plus tard, alors qu’un millier de soldats français sont toujours déployés dans le nord du pays dans le cadre de l’opération Barkhane, le voici de retour à Bamako, là où il n’avait pas hésité à lâcher, le 3 février 2013, après une visite dans Tombouctou libérée des groupes jihadistes, qu’il venait « sans doute de vivre la journée la plus importante de [sa] vie politique ».
En 2012, on disait que le Mali était foutu.
À quelques mois de la fin de son mandat, nul doute qu’il profitera de ce sommet pour vanter à nouveau l’intervention française au Mali et souligner, avec son homologue malien Ibrahim Boubacar Keïta, la qualité de la coopération entre leurs deux pays.
« En 2012, on disait que le Mali était foutu. Aujourd’hui, nous accueillons nos partenaires étrangers pour un grand sommet international. C’est un constat supplémentaire que nous sommes sur la bonne voie, et que la paix et la sécurité sont en train de revenir dans notre pays », explique un proche d’IBK, qui souligne la « relation particulière, voire fusionnelle » liant Bamako et Paris depuis Serval. Même son de cloche dans l’entourage de Hollande, où on se félicite du fait que « l’insécurité est en recul, que l’armée malienne se redresse et que les jihadistes ne contrôlent plus de villes dans le Nord du pays ».
En réalité, ce constat est loin d’être aussi positif. Les groupes jihadistes n’ont pas disparu mais se sont éparpillés, continuant de mener des attaques meurtrières contre les militaires maliens, les casques bleus de la Minusma, ou plus rarement les soldats français. Plus inquiétant, l’insécurité, autrefois cantonnée au Nord du Mali, s’est étendue au centre du pays, où l’État ne contrôle quasiment plus rien.
Mercredi 11 janvier, moins de 48 heures avant le début du sommet, cinq soldats maliens ont été tués dans l’explosion d’une mine au passage de leur véhicule, dans la région de Ségou.
Une trentaine de chefs d’État et de gouvernement attendus
Selon les organisateurs du sommet, une trentaine de chefs d’État ou de gouvernement et 2 000 participants sont attendus à Bamako. Évidemment François Hollande, qui sera accompagné de ses ministres de la Défense, Jean-Yves Le Drian, et des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, mais aussi la plupart des présidents des pays africains francophones.
Parmi les annoncés figurent notamment Macky Sall (Sénégal), Alassane Ouattara (Côte d’Ivoire), Roch Marc Christian Kaboré (Burkina Faso), ou encore Idriss Déby Itno (Tchad). Côté anglophone, Muhammadu Buhari (Nigeria), Uhuru Kenyatta (Kenya) et Ellen Johnson-Sirleaf (Liberia) seront présents.
Tous se retrouveront vendredi 13 janvier pour un grand dîner d’État au palais de Koulouba. Ils participeront ensuite au sommet des chefs d’État et de gouvernement, samedi 14 janvier, au Centre de conférence international de Bamako (CICB). Ibrahim Boubacar Keïta, François Hollande, Nkosazana Dlamini-Zuma, la présidente de la commission de l’Union africaine (UA), et Idriss Déby Itno, en sa qualité de président de l’UA, prononceront chacun un discours pour l’ouverture de ce sommet.
Plusieurs dossiers chauds
Les chefs d’État se réuniront ensuite toute la journée pour des sessions de travail à huis clos, consacrées à trois grands thèmes : la sécurité, l’économie, et la jeunesse. Sur le premier, il sera, comme souvent et sans surprise, encore question de lutte contre le terrorisme. Le Mali est évidemment en première ligne, mais plusieurs pays de la sous-région, comme le Burkina Faso ou la Côte d’Ivoire, ont été frappés par des attentats de masse ces derniers mois.
Ce sommet aura pour objectif de consolider encore un peu plus la coopération sécuritaire entre la France et les pays du continent. Lors du sommet de l’Élysée, en décembre 2013, Paris avait annoncé la formation de 20 000 soldats africains par an, à travers des stages dans ses bases sur le continent ou l’envoi d’experts militaires dans les différents pays partenaires. « Cet objectif a été atteint, nous souhaitons donc faire encore mieux et former 25 000 soldats par an sur les trois prochaines années », explique une source à l’Élysée. Selon elle, ces formations ont évolué et mettent de plus en plus l’accent sur l’antiterrorisme (mise en place d’unités spéciales, outils de surveillance, etc).
Sur le plan diplomatique, deux dossiers devraient monopoliser les débats : le suivi de l’accord politique en République démocratique du Congo (RDC) et l’évolution de la crise post-électorale en Gambie. Plusieurs chefs d’État ouest-africains engagés dans la résolution de la crise gambienne − Muhammadu Buhari, Ellen Johnson-Sirleaf, ou encore Macky Sall − devraient profiter d’être réunis à Bamako pour faire un point sur la situation à Banjul, où Yahya Jammeh ne semble toujours pas vouloir quitter le pouvoir.
Enfin, il sera aussi question de développement durable et de lutte contre le réchauffement climatique, pour confirmer les engagements pris par les États africains lors des COP 21, à Paris, et COP 22, à Marrakech.