La prestigieuse marque au cheval cabré restaure et authentifie ses modèles de légende. Une opération à 300.000 euros.
Chaque jour, une cinquantaine de Ferrari envahissent les rues de Maranello. Leurs moteurs vrombissent du fond des collines verdoyantes qui entourent cette commune située à 15 kilomètres de Modène, au nord de l’Italie. Ses 17.000 habitants s’enorgueillissent d’abriter depuis 1947 le siège de la prestigieuse marque au cheval cabré. Les environs sont devenus un immense circuit automobile où sont testés les prototypes. Mais ce qui coupe le souffle des visiteurs, ce sont les saisissantes voitures de collection qui quittent le «bloc opératoire » de Ferrari, l’atelier d’entretien et de restauration. «De nombreux mécaniciens se prétendent experts de nos voitures, alors que la plupart ignorent comment les remettre en état. Pour préserver notre patrimoine, nous avons créé un atelier, où nos clients peuvent faire restaurer leurs précieux bolides en toute confiance», explique Luigino Barp, directeur général de Ferrari Classiche. Depuis 2006, cette division de Ferrari a restauré quatre-vingt-quinze de ses modèles de légende et en a certifié authentiques plus de 5.400. «Nous conservons les archives de chaque véhicule ayant quitté l’usine, depuis 1947 jusqu´à aujourd’hui.»
Vidéo. Découvrez la Ferrari vendue plus de 32 millions d’euros aux enchères en 2016 :
Une croissance de 400%
Les milliers de dessins de pièces, les fiches de montage, les copies des certificats d’origine, les carnets de courses et la plupart des documents de vente ont permis de mettre en place cette unité en réponse au formidable essor du marché des voitures anciennes. En 2013, un rapport du «Financial Times» dévoilait une hausse de 400 % du prix de ce type d’automobiles par rapport à 2002. «Aujourd’hui, une Ferrari Daytona de 1972 ne part pas à moins de 650.000 euros aux enchères ; il y a quinze ans, elle n’aurait coûté que 60.000 euros», estime Matthieu Lamoure, directeur d’Artcurial Motorcars, leader dans les ventes aux enchères de voitures de collection en Europe continentale. «L’arrivée de nouveaux acheteurs a secoué notre secteur. Nous vivons une époque où l’épargne perd de son attrait et où la Bourse se révèle assez instable. Résultat, de plus en plus de gens aisés se tournent vers leur rêve d’enfant de posséder un bel engin, d’autant plus que ce secteur ne perdra que difficilement de sa valeur.» A l’instar des œuvres d’art, les voitures de collection sont exclues du calcul de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Toutefois, les propriétaires sont soumis à une taxe sur les plus-values lors de la revente. L’internationalisation du marché a par ailleurs contribué à cette croissance. En particulier depuis l’ouverture, en 2011, des enchères en ligne par Artcurial. Les ventes de sa branche automobile sont passées de 6 à 71 millions d’euros entre 2009 et 2015, notamment grâce à l’arrivée d’acheteurs du Moyen-Orient, de Russie et des États-Unis.
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La voiture la plus chère du monde
Comme par le passé, Ferrari figure toujours en tête de ce juteux marché. «Le constructeur italien a forgé son image dans le secteur de la course. Les prodigieux palmarès de ses modèles ont fait d’eux les plus prisés au monde, devant ceux d’Aston Martin, de Lamborghini et de Porsche. Ferrari représente la valeur de référence pour les véhicules de collection d’après-guerre», explique Hervé Charbonneaux, de Rallystory, organisateur de courses de voitures de collection. Bien que ce marché commence à se stabiliser, certaines voitures continuent de battre des records. Un exemplaire de la célèbre Ferrari 250 GTO a ainsi été vendu 38 millions d’euros, devenant la voiture la plus chère du monde. Trente-six de ces bijoux, aux illustres propriétaires (Nick Mason, le batteur des Pink Floyd, Ralph Lauren…), ont été produits entre 1962 et 1964. Et lors du salon Rétromobile 2016, la 335 S Spider-Scaglietti de 1957 a été adjugée 32,1 millions d’euros au cours d’une vente organisée à Paris par Artcurial. Avant l’actuelle hausse des prix, selon Matthieu Lamoure, elle aurait dfficilement dépassé les 2 millions d’euros. «La valeur exceptionnelle de ce modèle est due à sa rareté. Seuls trois exemplaires ont été produits, pilotés par les plus grands coureurs, et avec lesquels ils ont remporté toutes leurs courses. Avec un tel “lignage”, il n’a pas été nécessaire de la faire certifier par Ferrari Classiche pour la vendre à ce prix. En dehors de ce cas exceptionnel, poursuit Matthieu Lamoure, il s’avère cependant plus intéressant pour le vendeur de passer par l’atelier de Maranello.»
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Rassurer l’acheteur
«Une voiture sans notre certificat perd aujourd’hui près de 30% de sa valeur d’origine, précise Luigino Barp, puisque son authenticité et ses performances ne sont pas garanties.» Selon l’année de fabrication et le temps consacré à l’enquête, le prix de cette attestation oscille entre 1.700 et 12.700 euros hors taxes. Ainsi, cette année, une Ferrari Daytona sortie de Maranello avec 200.000 euros de frais de restauration et de certification a trouvé preneur aux enchères pour 950.000 euros. Sans cet investissement, elle aurait été vendue près de 300.000 euros de moins…
Si vous avez un engin à restaurer, sachez que pour qu’il soit accepté, celui-ci devra avoir plus de vingt ans, et le châssis, le moteur, la boîte de vitesses, la transmission, les suspensions, les freins, les roues, la carrosserie et les aménagements intérieurs devront être d’origine ou conformes aux originaux. «Toutefois, si une pièce vient à manquer, comme le moteur, nous avons la capacité d’en reconstruire une à l’identique», explique Luigino Barp.
«D’autres constructeurs comme Mercedes-Benz ont ouvert leurs propres ateliers d’entretien et de restauration. Ces garages représentent une activité rentable et permettent aux marques de contrôler leur histoire. Ils constituent également une excellente vitrine de leur savoir-faire et de leur professionnalisme… Une publicité qui les aide à vendre davantage de voitures modernes», assure Matthieu Lamoure.
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«The Steeve McQueen»
Pour célébrer son soixante-dixième anniversaire, en 2017, Ferrari construira soixante-dix exemplaires de cinq modèles inspirés des véhicules ayant forgé son histoire. La marque n’a pas manqué de les dévoiler en octobre 2016 au Mondial de l’automobile de Paris. La California T «The Steve McQueen », couleur chocolat et cuir camel, est ainsi inspirée de la Ferrari 250 GT Berlinetta Lusso de 1963 que l’acteur américain a reçu en cadeau de sa première femme. Comme c’est l’habitude chez Ferrari, les 350 voitures ont déjà trouvé preneur avant même la clôture du salon, alors que la plupart d’entre elles n’ont pas encore été produites !
Lola Parra Craviotto
Avec la capitale