En proposant aussi des demeures de rêve à la location, Airbnb bouscule le marché du haut de gamme. Palaces, hôtels et sites de location réagissent en misant sur les services et l’ambiance.
Une demeure d’architecte et ses six chambres, une piscine donnant sur l’océan Pacifique, un spa, des jacuzzis, une salle de cinéma, du personnel dédié, un prof de sport, et même un concierge occupé à réaliser le moindre de vos désirs… Vous en rêviez ? Airbnb l’a fait ! Du moins, les heureux propriétaires qui ont décidé de suivre la tendance et de proposer leurs villas, lodges, mas ou haciendas à la location saisonnière sur le fameux site. Pour quelques centaines ou milliers d’euros par nuit, voilà donc le rêve à portée de clic. Un luxe qui vient clairement concurrencer celui des traditionnels palaces.
Le leader mondial de la location saisonnière entre particuliers consacre même une rubrique à ces biens d’exception. Sur son site, une «wish list» intitulée «Dans le plus grand luxe» met en avant une poignée d’offres sélectionnées aux quatre coins du monde pour leur caractère hors normes. Airbnb opérerait-il ainsi une montée en gamme ? Sa porte-parole, Sarah Roy, s’en défend. «Nous n’avons pas d’approche spécifique sur ce secteur. Sur nos quelque deux millions d’annonces dans le monde, ce type de propriétés représente une petite minorité. Que je suis d’ailleurs incapable de chiffrer ! En aucun cas nous ne cherchons à la développer. »
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Mexique : Une villa de rêve de 1.000 mètres carrés. Située à Punta Mita, au Mexique, la Casa Kalika est une villa contemporaine d’inspiration balinaise. Pour 1.819 euros la nuit, pour douze personnes maximum, vous bénéficiez du service de quatre employés et de l’accès au golf.
Les palaces concurrencés
Même minimisée, la concurrence est pourtant bien réelle, et les palaces n’ont d’autre choix que de s’adapter. En soignant services, déco et ambiance suivant les attentes du moment. Valérie Mansis, directrice du Saint Roch (un hôtel cinq étoiles situé à Courchevel, au pied des pistes), connaît bien les goûts de ses clients : «Ils attendent un confort accru, davantage de services. Et, bien sûr, toutes les nouveautés high-tech, car ils veulent être toujours connectés. Pour la déco, c’est l’esprit cocooning qui emporte l’adhésion.» D’où le succès de ces boutiques-hôtels qui fleurissent dans les quartiers branchés de nos grandes villes ou au cœur des destinations prestigieuses.
Conçues par des architectes de renom, décorées par des stars du genre, elles affichent un savant dosage entre «branchitude» et authenticité. Voire une certaine idée de la convivialité et de la décontraction. Des valeurs jusque-là inconnues des palaces, et que celui de Courchevel n’hésite pas à mettre en avant dès la page d’accueil de son site Internet. Tout comme la Casa Amarelo, à Rio, qui défend un art de vivre à la française. Ou l’hôtel des Berges, près de Colmar, qui promeut son spa, mais surtout une ambiance familiale et un retour à la tradition des vieilles fermes alsaciennes. Fini les établissements où tout est lisse, froid et austère. De toute évidence, les voyageurs privilégient les hôtels de charme. Ou les propriétés privées, qui ont une âme, un vécu, une histoire, dans lesquelles on se sent comme chez soi.
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Anguilla : 2.799 euros la nuit dans la Villa Amarilla. Située dans le très chic quartier d’Island Harbour, sur l’île d’Anguilla, dans les Caraïbes, cette villa de cinq chambres et 830 mètres carrés, décorée dans un style italo-marocain, peut accueillir dix personnes. Proposée à la location sur Airbnb, son prix inclut la femme de ménage, un concierge privé – qui viendra vous chercher à l’aéroport – et un chef, avec supplément.
Du coup, une troisième voie semble se dessiner. La Maison de Fogasses (photo ci-dessous), située au cœur d’Avignon, en est un bel exemple : ni hôtel ni Bnb, le vaste hôtel particulier a été transformé en un espace atypique où sont proposés appartements, bar, restaurant, cours de cuisine donnés par des grands chefs, expositions d’art, et même quelques spectacles ou concerts pendant le festival. Dans un luxe jamais ostentatoire sont concentrées ici toutes les tendances chics, bohèmes et épicuriennes de l’époque. De l’élégance, de l’exigence, avec une impression d’improvisation permanente qui brise les carcans et les codes. «Je n’ai jamais aimé les grands hôtels standardisés. Chez moi, rien n’est parfait. Il manque toujours un boulon quelque part, et c’est très bien comme ça. Je veux qu’on s’y sente à l’aise», insiste la propriétaire, Corinne Guyon, dont l’établissement affiche souvent complet malgré sa proximité avec les hôtels cossus de la cité des Papes.
Avignon : un duplex en haut d’une tour médiévale. Dans la vieille ville, la Maison de Fogasses est un hôtel particulier du XVIe siècle de 1.200 mètres carrés, dans lequel on peut louer cinq appartements, de 55 à 115 mètres carrés. Il abrite également un restaurant et un jardin de 600 mètres carrés. Les prix vont de 99 à 250 euros la nuit (hors festival).
Décorée comme un musée
On l’a dit, les services font aussi la différence. Et là encore, si les hôtels de prestige avaient jusqu’ici une longueur d’avance, les choses ont bien changé. Au point de voir apparaître une économie dédiée. Mehdi Saurat a créé sa start-up mi-2015, Séjour à Aix-en-Provence, spécialisée dans la location de produits de standing. Dans son portefeuille, une vingtaine de biens appartenant à différents propriétaires qu’il propose via différents sites, à commencer par le sien (http://www.sejouraaixenprovence.com/fr/). Parmi ses fleurons, la MoMA House (photo ci-dessous), une villa peuplée d’œuvres d’art, qui évoque le musée new-yorkais. Décoré par un professionnel réputé (Stéphane Cristol, qui revisita le mas provençal de Johnny Depp et de Vanessa Paradis), le lieu dispose d’un hammam, d’une salle de sport, d’un court de tennis, d’une piscine et d’un vaste parc arboré… Pour enrichir son offre, l’entrepreneur a vite développé une gamme de services qui s’énoncent comme une liste à la Prévert. Moyennant quelques centaines d’euros en sus, vous bénéficiez d’un chef à domicile ou de la livraison de vos repas , d’un coach sportif, d’un prof de tennis , d’un coiffeur… Mehdi Saurat reprend là ce qui est systématiquement proposé dans l’ensemble des offres locatives très haut de gamme à travers le monde.
Aix-en-Provence : un mini-musée d’art moderne dans une résidence privée. Située au sud-ouest d’Aix, la MoMa House appartient à un décorateur et collectionneur, qui a aménagé chaque pièce avec des meubles signés et des œuvres d’art moderne. Pour 713 euros la nuit, elle peut accueillir jusqu’à 10 personnes.
Pourquoi s’imposer les contraintes des palaces, les voisins trop bruyants, le personnel glacial ? Sans compter les formules de séjours, bien plus restrictives. Pour Sarah Roy, «le luxe s’est démocratisé. Il n’est pas rare de voir des groupes d’amis, qui n’iraient pas dans un palace, s’adresser à nous pour s’offrir un voyage tous ensemble dans un lieu de rêve. Accéder à l’exceptionnel est devenu plus facile, financièrement possible.»
Costa Rica : une vraie maison d’architecte posée sur la plage. Au cœur d’une résidence privée de Playa Hermosa, sur la côte ouest du Costa Rica, la Casa del Mar peut accueillir douze personnes, pour 1.476 euros la nuit. Elle dispose de six suites donnant directement sur la mer, d’une piscine à débordement et d’un cinéma de dix places.
Laurent Fialaix
Avec la capitale