Grand vainqueur de la compétition Seedstars Algeria, Dalil est un système de reconnaissance d’objets et de navigation permettant aux personnes visuellement déficientes de détecter les objets qui les entourent grâce à une application sur smartphone. Rencontre avec son fondateur, Islam Azeddine Mennouchi interviewé par Héloïse Lebrun-Brocail.
L’équipe de Dalil avait déjà participé à de nombreuses compétitions de startups comme le challenge Startupper of the year de Total, l’Imagine Cup de Microsoft ou encore l’initiative GIST Tech-I. Quel est selon toi l’intérêt de ces compétitions ? Et plus spécifiquement, pourquoi avoir choisi de participer à Seedstars Algeria ?
Effectivement, nous avons participé depuis 4 ans à de nombreuses compétitions, comme le programme organisé par Startup Istanbul, le GIST Tech-I, ou encore la compétition de business plans organisée par l’African Business Club de la Harvard School of Business, qui nous a classés parmi les 15 startups les plus prometteuses d’Afrique.
Nous participons essentiellement à des compétitions d’envergure internationale, du fait de la dimension très internationale de notre projet. C’est d’ailleurs ce qui nous a poussés à participer à Seedstars Africa. Participer à ces compétitions répond principalement à deux objectifs : trouver des financements, et gagner en notoriété : il est essentiel pour un projet d’utilité sociale d’acquérir de la visibilité au niveau international. Il est également essentiel de pouvoir accéder à des programmes de mentoring et de conseil. A titre personnel, en tant qu’étudiant en informatique, je n’avais initialement pas de compétences business. Les différents programmes de mentoring nous ont permis d’en acquérir. A ce titre, la GIST Tech-I nous a beaucoup impactés car elle nous a permis d’accéder à un immense réseau d’investisseurs et à des programmes de mentoring et de conseil. Elle nous a également permis d’acquérir une certaine visibilité au niveau régional.
En tant que gagnant de Seedstars Algeria, le projet Dalil va participer à la finale Seedstars World en avril, à Lausanne. Comment envisages-tu cette finale, et quels sont vos besoins d’ici là ?
Nous travaillons sans relâche pour améliorer les caractéristiques techniques de notre solution. Elle se destine à une catégorie sensible de personnes, nous devons donc fournir un produit vraiment fiable et sécurisé, et c’est notre objectif dans les prochains mois. Nous travaillons avec une association de non-voyants d’Algérie, de façon à obtenir des retours sur notre produit. Les fonds obtenus grâce à notre victoire à Seedstars, ainsi que son réseau de partenaires, nous permettent de continuer à développer notre produit en fonction de ces retours.
Certaines initiatives destinées aux malvoyants comme l’application BlindTool, Airpoly ou le système Eyering fonctionnent également selon le principe de la reconnaissance d’objets. Quelle est la plus-value de l’application Dalil par rapport à ces différents projets ?
D’un point de vue technique, la force la plus importante de Dalil est la sélection d’objets intégrés sur notre système. Des algorithmes hors ligne de data-mining nous permettent de récupérer les objets les plus communs et les plus utilisés au niveau international. Il s’agit d’une technologie nouvelle, qui n’est pas encore utilisée par d’autres projets ou applications. Nous avons essayé d’intégrer prioritairement au système des objets du quotidien et de la vie de tous les jours. Actuellement, la reconnaissance des objets est déjà en place et fonctionne très bien. Nous travaillons maintenant sur l’amélioration de l’évaluation de la distance, ce qui passera par l’élaboration d’un device : des lunettes, avec des caméras et un mécanisme d’évaluation de la distance, qui fonctionneront conjointement avec l’application.
Contrairement à nos concurrents, nous sommes par ailleurs disponibles à la fois sur IOS et Android, ce qui nous permet d’accéder à davantage de clients.
L’application Dalil fonctionne t-elle uniquement avec un accès à Internet ? Si oui, est-ce que cela constitue selon toi un frein à son développement en Afrique ?
L’application fonctionne hors ligne. Il s’agit d’un avantage compétitif non seulement en Afrique mais aussi au monde de façon plus générale, car cela nous permet de faire en sorte que notre système réagisse en temps réel, ce qui est indispensable au bon fonctionnement de l’application, et ne serait pas possible avec une application en ligne ayant recours à un serveur externe.
Le phénomène de reverse innovation prend de plus en plus d’ampleur. Quel regard portes-tu sur ce phénomène et comment envisages-tu son évolution ? A moyen terme, le développement de Dalil pourrait-il selon toi s’inscrire dans cette logique, avec une implantation en dehors de pays émergents ?
Notre produit aura un impact plus important et aidera davantage de personnes dans les pays émergents qu’en Europe, aux Etats-Unis ou en Grande-Bretagne, car il permettra de palier à un manque d’infrastructures permettant d’améliorer et de faciliter le quotidien des personnes visuellement déficientes. A titre d’exemple, en Algérie, il n’y a pratiquement aucun endroit dédié aux personnes malvoyantes, alors qu’aux Etats-Unis ou en Grande-Bretagne, il existe des endroits entièrement équipés de lecteurs d’écrans ou utilisant le braille.
Selon toi, le développement de l’économie numérique peut donc constituer un véritable moteur pour le développement de l’économie globale du continent ?
La technologie permet d’améliorer le quotidien de nombreuses personnes. En Afrique, certaines personnes n’ont même pas encore accès à Internet. Le développement de la technologie pourrait alors résoudre un certain nombre de problèmes persistants, d’autant plus que la mise en place d’une solution technologique est aujourd’hui moins onéreuse et plus simple que la mise en place de tout autre type de solution. En créant Dalil, j’ai vraiment voulu utiliser mes compétences techniques pour améliorer le quotidien de personnes qui en ont besoin.
Véritable innovation technologique, le projet Dalil se démarque par son ambition d’apporter des solutions concrètes à un problème sociétal : le manque d’infrastructures dédiées aux personnes visuellement déficientes dans les pays émergents. StartupBRICS suivra de près son développement jusqu’à la finale de Seedstars, en avril, à Lausanne.
Avec startupbrics