À un moins de la présidentielle au Nigeria, le pays vit sous tensions alors que le chef de l’Etat a suspendu de ses fonctions le président de la Cour suprême. Outre cette crise institutionnelle qui alourdit le climat pré-électoral, le géant démographique d’Afrique doit aussi faire avec son défi sécuritaire et la pauvreté qui assaille la majeure partie de sa population.
Quelque 190 millions de Nigérians espèrent assister, en 2019, à une autre transition pacifique du pouvoir. La victoire de Buhari en 2015 a, en effet, été un transfert de pouvoir pacifique rare au Nigeria, puissance économique de l’Afrique de l’Ouest. Après de nombreux coups d’Etat et de régimes militaires, le géant démographique espère ainsi solidifier sa démocratie naissante afin de préserver les acquis. Mais le chemin semble encore long. Le refus des candidats Muhammadu Buhari – président sortant – et de son adversaire, l’ancien vice-président Atiku Abubakar de se présenter à un débat présidentiel il y a une semaine, est venu confirmer la grande hostilité entre les deux hommes.
Pour ne rien arranger, le président Buhari a suspendu vendredi Walter Onnoghen, poursuivi en justice pour corruption, et a nommé à son poste un juge originaire du nord du pays, comme lui. Une décision qui a provoqué des critiques tant au Nigeria qu‘à l‘étranger à l‘égard du président, candidat à sa réélection au scrutin du 16 février, auquel il est reproché d’avoir violé la Constitution et de tenter de manipuler l’appareil judiciaire. Le principal parti d’opposition, le Parti démocratique du peuple (PDP), a cessé samedi de faire campagne, et ce pour 72h, en guise de protestation. Par ailleurs, les Etats-Unis et l’Union européenne ont tous deux exprimé leur consternation face au climat actuel, brandissant des menaces pour toute personne qui tenterait de motiver des violences liées aux élections.
Le développement et la sécurité comme espoir
C’est que, ces élections, comme la précédente de 2015, sont un filet d’espoir pour les populations nigérianes confinées pour la plupart dans des conditions de vie précaires. Courant 2018, un rapport de la World Poverty Clock affirmait que le Nigeria est le pays qui détient le plus grand nombre de personnes vivant dans l’extrême pauvreté, devant l’Inde. Des données en totale contradiction avec les atouts économiques du Nigeria, deuxième puissance économique derrière l’Afrique du Sud et premier producteur africain de brut. Mais les revenus de cet or noir sont engloutis dans une corruption endémique, qui spolie la majeure partie de la population de son droit au développement et au bien-être social.
Autres attentes d’envergure formulées dans ces élections, le rétablissement de la sécurité et faciliter la cohabitation entre les habitants du centre. Depuis 2009, en effet, l’insurrection de la secte islamiste Boko Haram endeuille des milliers de familles. En dépit des efforts consentis pour éradiquer le groupe extrémiste, il reste encore actif dans le nord-est du Nigeria, multipliant les attentats contre les civils et les forces de l’ordre. Un récent rapport a notamment fait savoir que les militants du groupe utilisaient des drones pour leurs opérations, témoignant ainsi du développement du groupe.
Dans un conflit distinct, dans le centre du pays, ce sont deux groupes ethniques qui sèment la désolation. Selon l’International Crisis Group, les affrontements entre agriculteurs à majorité chrétienne et les éleveurs à majorité musulmane pour le contrôle des terres ont déjà tué quelque 1 300 personnes au premier semestre de 2018, soit six fois plus que les victimes humaines de Boko Haram sur la même période.
Pendant ce temps, les activistes biafrais dans le sud pétrolier et les bandits dans le nord-ouest continuent de représenter une menace potentielle pour le pouvoir central d’Abuja, mais aussi pour les populations civiles. De quoi susciter de vives attentes dans le prochain chef de l’Etat du Nigeria.
Avec Africanews