Au Nigeria, la suspension du président de la Cour suprême suscite toujours autant de remous. Walter Onnoghen a été démis de ses fonctions vendredi par le président Muhammadu Buhari, officiellement pour ne pas avoir déclaré plusieurs comptes bancaires. Le chef de l’Etat nigérian a nommé à sa place un juge originaire du nord du pays comme lui, une décision que l’opposition juge anticonstitutionnelle. Lundi 28 février, des avocats ont manifesté à Abuja en signe de protestation.
Des centaines d’avocats s’étaient donné rendez-vous lundi devant le siège de l’Association des magistrats nigérians à l’heure où ses responsables discutaient de la suspension de Walter Onnoghen. Des manifestants remontés contre la décision du président Buhari de suspendre le président de la Cour suprême.
C’est le cas de Victor Giwa, avocat et militant du National Coordinator of the Advocacy for Civil Service and Justice : « Les actions du gouvernement fédéral sont inconstitutionnelles. Le gouvernement a le droit de révoquer le président de la Cour suprême. Il a le droit. Mais cela doit se faire conformément à la loi. Tout ce que nous demandons, c’est l’annulation de cette procédure. Il n’y a pas d’autres solutions ».
Un rassemblement finalement perturbé par la venue de manifestants hostiles, favorables, eux, à la suspension de Walter Onnoghen, à l’image de ce jeune supporter du président nigérian : « A partir du moment où il a commis une offense, je pense qu’il n’y a pas d’excuse qui vaille. Ignorer la loi, ça n’en est pas une. En tant que juge, il doit savoir qu’il y a certaines procédures à respecter pour être président de la Cour suprême. Comment se fait-il que jusqu’à présent, il n’ait pas déclaré ses comptes ? Il a commis une offense. La justice nigériane doit être assainie. Et pour cela, nous devons soutenir monsieur le président dans sa lutte contre la corruption ».
Un sentiment que ne partage pas l’Association des avocats nigérians. Cette dernière a en effet qualifié la suspension du président de la Cour suprême de « tentative de coup d’Etat contre l’appareil judiciaire ».
La classe politique divisée
Pendant ce temps, le candidat Muhammadu Buhari poursuit ses meetings aux quatre coins du Nigeria, comme si de rien était. Pourtant, l’affaire Walter Onnoghen éclipse jour après jour la campagne électorale en cours. Bukola Saraki, le président du Sénat, a renoncé à ouvrir une session extraordinaire, prévue ce jour. Des parlementaires proches de lui ont déposé lundi un recours à la Cour suprême. Ces sénateurs du Parti démocratique populaire (PDP) veulent eux aussi savoir si la suspension, puis le remplacement du juge Onnoghen sont « une usurpation des pouvoirs du Sénat ».
Ce recours à la plus haute de justice du Nigeria est contesté par le sénateur Ahmed Lawan au nom du Congrès des progressistes (APC). Le leader de la majorité estime que le Sénat étant hors session, aucune discussion n’a pas pu avoir officiellement lieu sur ce sujet. Et par conséquent, toujours selon le sénateur Laxan, personne n’est mandaté par le Sénat pour poser une telle question à la Cour suprême.
Plus la date des élections du 16 février approche, plus l’affaire du juge Walter Onnoghen crispe les deux principales formations politiques nigérianes, chaque camp s’accusant mutuellement de vouloir frauder le scrutin présidentiel.
Avec RFI