Le patron de Renault a donné jeudi sa démission. Ses indemnités de départ pourraient aller de 1 million à… 30 millions d’euros. Un sujet explosif que l’Etat, actionnaire du groupe, surveille de près.
Attention, dossier explosif. Alors que Carlos Ghosn a annoncé sa démission à la tête de Renault ce jeudi, se pose désormais la question épineuse de ses indemnités de départ qui peuvent atteindre, selon les scénarios, plusieurs dizaines de millions d’euros.
Preuve de la sensibilité du dossier, moins d’une heure après l’officialisation à la tête du constructeur automobile du duo Jean-Dominique Senard comme président, et de Thierry Bolloré comme directeur général, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, a prévenu : « Je peux vous dire que nous serons extrêmement vigilants, comme actionnaires de référence (NDLR : 15 % du capital), sur les conditions de départ qui seront fixées par le conseil d’administration ». Il faut dire qu’en plein mouvement des Gilets des jaunes, dont les principales doléances tournent autour du pouvoir d’achat et de la déconnexion des élites, le risque est grand, pour l’exécutif, de voir le dossier Ghosn prendre une tournure politique.
Interrogé, Bercy, qui dispose de 22 % des droits de vote en assemblée générale des actionnaires, prévient « on va mettre la pression ». Ainsi, pas question que celui qui était surnommé le « cost killer » (NDLR : tueur de coûts) de l’automobile perçoive le « versement d’une clause de non-concurrence » s’il prend sa retraite, prévient le ministère de l’Economie. « Celle-ci est d’environ 5 M €, précise Loïc Dessaint, directeur général de Proxinvest, un cabinet de conseil aux actionnaires.
Une retraite de 765 000 € par an
Mais plus globalement, ses indemnités de départ peuvent varier entre un million d’euros et environ 30 M€. Tout dépend des conditions juridiques, des éventuelles négociations qu’il a pu mener et de ce que décidera le conseil d’administration de Renault ». Dans la fourchette la plus basse, Carlos Ghosn ne toucherait que sa rémunération fixe de 2018 et du début 2019, soit un million d’euros complétée par sa retraite de 765 000 € par an.
Dans la fourchette la plus haute, il faut y ajouter, dans un premier temps, sa part variable, composée de 25 % de numéraire qu’il touche annuellement et de 75 % en actions qu’il perçoit de manière différée sur quatre ans. Soit 4 M€ au cours actuel. A cela, il faut également ajouter une rémunération à long terme par attributions d’actions de performance, soit 100 000 actions gratuites en 2015, 2016, 2017 et 80 000 en 2018. Un total de 380 000 actions, qui au cours actuel atteignent la somme de 21 M€.
« Il y aura une pression de la part des salariés et des syndicats pour qu’il obtienne le moins possible, avertit Franck Daoût, délégué central CFDT. S’il a vraiment commis des malversations, Carlos Ghosn ne devrait rien toucher ». Incarcéré au Japon depuis le 19 novembre, le PDG déchu, qui clame son innocence, est soupçonné d’abus de confiance. La question de ses indemnités de départ sera tranchée par un comité des rémunérations avant le mois de juin, date de l’assemblée générale des actionnaires. Estimés à environ 15 M€ par an, les émoluments cumulés de Carlos Ghosn font régulièrement polémiques. « Il est souvent classé dans le top 3 des patrons du CAC 40 les mieux payés », rappelle Loïc Dessaint.
Avec leparisien