L’Afrique devra maximiser sa production alimentaire tout en protégeant ses ressources naturelles avec le défi du changement climatique. Elle peut tirer trois enseignements des politiques d’investissement menées dans les pays asiatiques, estime Gordon Conway professeur de développement international à l’Imperial College London, au Royaume-Uni, et membre du groupe d’experts Malabo Montpellier dans une tribune publiée sur le site Thomson Reuters Foundation.
Le premier enseignement est que l’Asie a démontré via ses dépenses publiques la priorité qu’elle donnait à l’agriculture. Au cours des dix dernières années, plusieurs pays d’Asie, comme l’Inde, le Népal ou le Bhutan, ont alloué 6% des dépenses du budget de l’Etat à l’agriculture. Or, en dépit de l’engagement prit à Maputo en 2003 de consacrer 10% des dépenses publiques à l’agriculture, les pays africains n’en ont consacré en moyenne que 3%. Seuls dix pays du continent ont atteint l’objectif des 10% en 2017. « Sans investir dans l’agriculture, les pays africains ne pourront pas augmenter leur production alimentaire pour mieux nourrir une population croissante » affirme Gordon Conway.
Le deuxième enseignement est que les investissements dans l’agriculture en Asie ont été en priorité orientés vers le développement de l’irrigation afin de réduire la dépendance envers les systèmes pluviaux. L’irrigation a absorbé 60% des investissements dans l’agriculture. Ainsi 37% des terres cultivées en Asie sont irriguées contre seulement 6% en Afrique. Le dernier rapport du groupe d’experts de Malabo-Montpellier montre que certains pays africains – l’Afrique du Sud, l’Éthiopie, le Kenya, le Mali, le Maroc et le Niger -ont investi dans l’irrigation avec succès (Voir : L’irrigation est incontournable, comme le démontrent le Niger et le Mali).
Dernier enseignement, selon Gordon Conway, l’Asie du Sud en particulier a démontré l’intérêt d’aider les petits exploitants agricoles à adopter des technologies de contrôle de l’eau et d’irrigation. En améliorant l’accès aux aides financières, les petits exploitants ont pu investir dans des équipements d’irrigation afin de prolonger la saison de croissance et d’améliorer leurs moyens de subsistance. « En 2017, seulement un tiers des adultes en Afrique subsaharienne avaient accès à des services financiers formels, contre 68% en Asie du Sud. Si l’Afrique veut capitaliser pleinement sur le potentiel d’une plus grande irrigation, il faut que les acteurs en première ligne de la production alimentaire aient les moyens d’acquérir de nouvelles technologies » affirme Gordon Conway.
Avec commodafrica