Qu’est-ce que la franc-maçonnerie ?
On considère que la franc-maçonnerie a vu le jour dans des temps anciens parmi les ouvriers maçons qui construisaient des édifices religieux. Ils vivaient sur les chantiers et gardaient leurs outils dans des endroits spécifiques, appelés « loges ». C’est précisément là qu’ils menaient des réunions au cours desquelles ils discutaient des secrets du métier, d’où le nom des congrégations maçonniques actuelles.
Selon la légende, la franc-maçonnerie a débuté avec le roi Salomon : pour la construction d’un temple à Jérusalem il fit appel à l’architecte Hiram, qui divisa les ouvriers en trois classes. Cette répartition servit de base aux trois rangs (« degrés ») de la franc-maçonnerie – les apprentis, les compagnons et les maîtres. Les francs-maçons possèdent leurs propres symboles, mots et gestes secrets, permettant de reconnaître les « leurs » en toutes circonstances, sans se faire démasquer par les personnes non-initiées. Ce mouvement est scindé en deux, entre la maçonnerie « opérative » (la forme la plus ancienne, liée au travail physique) et « spéculative »(philosophique), celle-ci étant apparue au XVIIIe siècle. De nombreuses loges maçonniques fonctionnent selon des règles différentes, et sont, au cours des siècles, rentrées en conflit les unes contre les autres. Le principal objectif de la franc-maçonnerie réside officiellement dans le perfectionnement de l’homme et de l’esprit humain. Cette tâche est notamment symbolisée par le polissage de la pierre (représentation de l’homme), qui doit être de forme régulière pour devenir une partie du grand édifice de la vie, projet établi par le Grand Architecte de l’Univers, c’est-à-dire Dieu, que vénère chaque franc-maçon. |
Au XVIIIe siècle , ces réunions « chevaleresques » étaient très en vogue auprès des nobles russes, qui étaient presque tous d’anciens militaires, mais elles avaient peu à voir avec la véritable franc-maçonnerie. Pour illustrer cela, l’homme d’État et poète Ivan Elaguine avoua par exemple avoir rejoint la confrérie uniquement « par orgueil »et par désir de s’assurer la protection des personnes haut placées fréquentant les cercles maçonniques.
Elaguine fut toutefois déçu par le système de la Stricte observance templière et reçut, au début des années 1770, l’autorisation de la Grande loge d’Angleterre de constituer une union maçonnique en Russie. Au même moment, à Saint-Pétersbourg, le baron allemand Reichel fonda lui aussi une union maçonnique soumise au système suédois Zinnendorf. Si le système d’Elaguine était principalement axé sur la recherche mystique du secret maçonnique, de leur côté les disciples du système Zinnendorf aspiraient exclusivement à l’accomplissement de soi. Malgré la multitude de loges (au XVIIIee siècle, Moscou en comptait à elle seule 27), les francs-maçons russes étaient en réalité peu nombreux ; l’union d’Elaguine par exemple n’en regroupait que 400 environ. Cela entraîna la fusion des deux branches en 1776, ce qui ne marqua toutefois pas la fin des frictions.
Alors que Saint-Pétersbourg était le théâtre d’une lutte entre Elaguine et Reichel, dès la fin des années 1770, les loges moscovites commencèrent à prendre de l’ampleur. Un rôle important dans ce phénomène fut joué par l’homme d’État et éditeur Nikolaï Novikov, qui fit notamment partie de la délégation de francs-maçons russes au convent de Wilhelmsbad (1782), où la Russie avait été reconnue comme une province maçonnique à part entière.
La franc-maçonnerie fut de facto interdite en Russie à partir de cet événement. Néanmoins, 4 ans plus tard, le nouvel empereur, Paul Ier, gracia Novikov et ses collègues. L’éditeur passa néanmoins les dernières années de sa vie, jusqu’en 1818, dans son domaine d’Avdotino. Fait intéressant, en 1812, lorsque l’armée napoléonienne fit son entrée en Russie, cette propriété resta intacte, de nombreux officiers français étant francs-maçons. La même chose fut constatée dans la région de Moscou à Bolchie Vyaziomy, propriété des princes Golitsyne, francs-maçons connus en Europe : les murs furent ornés de représentations de pommes et d’acacias, célèbres symboles maçonniques.
Vers la fin de son règne, l’empereur Alexandre se montra cependant de plus en plus conservateur et suspicieux. Les rumeurs et faits faisant état de communautés secrètes l’inquiétèrent. Aussi, en 1822, le tsar fit publier le rescrit De la destruction des loges maçonniques et de toutes les communautés secrètes.
Nous pouvons donc dire, comme c’est souvent le cas dans l’histoire de la franc-maçonnerie, que la raison se heurte à différents mythes et mystères. Or, c’est précisément ce qui a attiré de riches et célèbres Russes dans les rangs de cette confrérie.