Les incertitudes politiques ne sont pas la cause principale du ralentissement de la croissance sur le continent, selon l’OFCE. Le prix du pétrole pèse davantage sur la conjoncture, mais surtout un mouvement de fond est en marche: la fin de la reprise. Néanmoins, la croissance devrait rester suffisamment élevée pour que le chômage poursuive sa baisse.
Après une belle accélération l’année dernière, l’économie européenne lève le pied. De 2,5% de croissance en 2017, la zone euro devrait afficher 1,9% cette année, selon les prévisions de de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), qui publie ce lundi une note sur l’Europe.
Plusieurs chocs sont souvent évoqués pour expliquer ces coups de mous, notamment la guerre commerciale lancée par les États-Unis et les négociations sur le Brexit, qui créent de l’incertitude. Pourtant, les effets du premier sont “plutôt faibles”, quant au second, son impact sur la croissance des autres pays européens est “limité”, selon l’économiste Christophe Blot, directeur adjoint de l’OFCE.
En réalité, “les pays européens seront d’abord pénalisés par la hausse du prix” du baril, pointe l’Observatoire. Celui-ci a bondi de près de 40% entre 2017 et 2018, alors qu’il avait déjà pris plus de 20% lors de la période précédente. En rognant sur le pouvoir d’achat des ménages, cette hausse des prix de l’énergie fera perdre 0,3 point de PIB à l’Allemagne et à la France cette année. Le baril devrait finir 2018 à 75 dollars et se stabiliser à ce niveau en 2019.
La reprise se termine petit à petit
Outre le pétrole, ce ralentissement de l’économie s’explique tout simplement parce que nous assistons à la “fin de la dynamique de reprise”, pointe Christophe Blot. Entre la crise financière et celle des dettes souveraines dans la zone euro, les économies tournaient au ralenti après 2011. Mais la reprise, qui a débuté vers 2015, a fait tourner la production à plein régime, boostant la croissance des pays au-delà de ce qu’ils sont capables de réaliser en rythme de croisière.
Cette période se termine progressivement, avec des temporalités différentes selon les pays. L’Allemagne par exemple n’en profite déjà plus, sa croissance va passer de 2,5% en 2017 à 1,7% cette année. Au fur et à mesure, tous les pays de la zone euro vont converger vers cette tendance, jusqu’à observer “un ralentissement global” de la croissance, analyse l’économiste.
Dans la zone euro, la croissance va continuer progressivement à ralentir pour tomber à 1,6% en 2020, selon les prévisions de l’OFCE. Seule la France aura droit à un petit rebond en 2019 (+1,8% après +1,7% cette année), grâce au calendrier fiscal du gouvernement, avant de voir son taux de croissance tomber à 1,5% l’année suivante.
Le chômage se réduit et les dettes sont stables
“Le niveau de croissance sera plus faible qu’avant la crise”, car le potentiel des économies s’est amoindri à cause “de la baisse de la population active et d’une tendance de productivité plus faible”, détaille Christophe Blot.
Néanmoins, ce niveau de croissance reste suffisant pour poursuivre la baisse du chômage. Pour la zone euro, celui-ci devrait tomber à 7,4% en 2020, soit un niveau proche de celui d’avant-crise. En revanche, il existe des disparités fortes entre les pays. Avec 3,4% prévu pour cette année, l’Allemagne est déjà en-dessous de son niveau d’avant-crise, quand d’autres vont demeurer au-dessus comme la France et l’Espagne.
Concernant les dettes publiques, si elles sont certes à un niveau beaucoup plus élevé qu’avant 2008 (en France la dette est passée de 65% du PIB en 2007 à 98% aujourd’hui), elles sont stables et vont amorcent leur décrue, là-encore à un rythme très différent selon les pays.
L’ensemble de ces prévisions dépendent évidemment de l’évolution des risques politiques. L’OFCE s’attend à un “statu quo” entre les Européens et les Américains sur le plan commercial. Sur le Brexit, “le scénario central reste celui d’un accord” entre Bruxelles et Londres. Enfin, malgré le bras de fer entre la Commission européenne et l’Italie, “la zone euro pourrait éviter une nouvelle crise des dette souveraines”.