La case du chef, où Paul Biya à été élevé à la dignité de « Nnom Ngui », lors du comice agropastoral d’Ebolowa s’est effondrée.
Alors que sa majesté René Effa, celui qui présidait le rite du « Ngui », est gravement malade. L’opinion crie à la sorcellerie. Décryptage.
La case du chef, connue sous le nom d’ « Aba Minkukuma » se meurt. C’est cette case qui a servi de cadre à l’intronisation de Paul Biya à la dignité de « Nnom Ngui » lors du dernier comice agropastoral d’Ebolowa. Depuis des semaines, le palais du « Nnom Ngui », construit au quartier Angalé, non loin du Lycée blanc, présente l’image d’une bâtisse fantôme, celle d’un endroit sans vie. La clôture en planches, qui encadre l’édifice construit en tiges de bambou, et couvert d’une toiture en pailles, étouffe sous la poussée d’une herbe folle. Une clôture dont la peinture blanche, sous l’effet des intempéries, se délave au fil des jours en attendant qu’elle soit, d’ici très peu de temps, la cible préférée des termites.
Le décor proprement dit du bâtiment de suscite à distance, une profonde indignation. La charpente en bois qui soutenait la toiture en raphia de l’Aba, s’est complètement affaissée. Elle n’a pas pu résister à la pression du vent et des eaux de pluie qui inondent l’enceinte lorsqu’il pleut dans la ville. La semaine dernière encore, un habitant du quartier Angalé dont le domicile est situé à quelques mètres du palais des chefs parlait d’une certaine légèreté, dans la construction de l’Aba. Ce témoin oculaire des travaux de construction de la case du chef, estimait que « ceux qui avaient piloté la construction du bâtiment n’étaient préoccupés que par leurs intérêts personnels. Vous voyez aujourd’hui que ce bâtiment est abandonné, sans entretien. L’on comprend que les chefs, qui ne parlaient pas d’une même voix, n’avaient pas pris le temps de bien réfléchir, pour édifier quelque chose de durable. En voilà donc le résultat ».
Egoïsmes
Et de fait, bien avant le comice, la construction de l’Aba Minkukuma va susciter une vive polémique au sein de la grande famille des chefs traditionnels du sud et singulièrement, celle de la Mvila. Des chefs qui ne vont pas s’entendre sur le site, qui devait abriter l’Aba. Trois chefs des villages hôtes du comice, notamment Emmanuel Beh (Mebae), Joseph Nkoto (Akak) et Soua (Ngallane) vont même suggérer que la case soit construite chez eux. Une proposition rejetée en bloc par sa majesté René Désiré Effa, président régional (pour le sud), du conseil national des chefs traditionnels, et quelques uns de ses affidés, qui vont plutôt la faire construire au quartier Angalé. Le président René Désiré Effa sera même par la suite au centre, d’une affaire de détournement des fonds (13 millions de Fcfa) débloqués par les fils du sud pour la construction de l’Aba. Depuis pratiquement deux mois maintenant, le président régional du conseil national des chefs a d’ailleurs une santé chancelante. Sa majesté René Désiré Effa, tombé gravement malade, quelques semaines après le comice agropastoral, au cours duquel il aura présidé le rite du «Ngui» et élevé Paul Biya, au rang de « Nnom Ngui ». Un très mystique trône de grand patriarche des patriarches qui suscite toujours la controverse.
La semaine dernière, le secrétaire particulier du chef malade et quelques-uns de ses proches annonçaient une réunion avec les autres chefs traditionnels qui devaient être informés de l’état de santé de leur président. Une rencontre qui n’a jamais eu lieu. La Nouvelle Expression qui a voulu en savoir plus sur le dossier s’est heurtée au mutisme des proches de sa majesté Effa. Mais déjà, certaines bouches parlent d’une maladie mystique. En l’occurrence les répercussions des rites du « Ngui» présidé par Sa majesté Effa ; rites qui auraient bien des conséquences lourdes sur ceux qui s’y frottent, sans avoir une étoffe solide.
Aba : les raisons profondes d’un déclin
Ce qui arrive aujourd’hui à la case des chefs d’Ebolowa, « Aba Minkukuma », est quelque peu de nature à surprendre. C’est un incident qui frise à la fois la désolation et l’indignation dans le cercle restreint des observateurs avertis des valeurs traditionnelles. Y compris chez les initiés qui maîtrisent la symbolique du pouvoir traditionnel dans sa dimension sacrée et tous ses adjuvants. Une case des chefs, qui, il y a de cela trois mois seulement, a servi de cadre à l’intronisation, du « Nnom Ngui » (le grade le plus sacré et vénéré, de par sa dimension mystique, dans la chefferie traditionnelle au grand sud-Cameroun) qui devait logiquement faire l’objet de toutes les attentions de la part des chefs locaux, en termes d’entretien et de sécurisation ; mais qui reste abandonnée a elle-même… L’on parlerait d’un acte de profanation et d’abomination orienté, d’une vraie insulte des dépositaires du pouvoir traditionnel du sud, à l’endroit de la chefferie traditionnelle.
Ce qui arrive aujourd’hui à l’Aba, n’est que la conséquence de cette déconsidération du pouvoir traditionnel par ceux-là même qui prétendent l’incarner, au quotidien. C’est davantage le fruit d’un grand désordre ; celui des égoïsmes qui ont fait leur nids au sein de la grande famille des chefs du sud, déjà divisée sur le choix du site de la construction de l’Aba, bien avant son érection. Les chefs des trois villages hôtes du comice (Mebae, Ngallan,Akak) avaient pourtant insisté, que l’Aba soit érigé en un lieu sacré, afin que ladite case puisse bénéficier de l’onction et de la protection mystiques des ancêtres. Ils ont été incompris. Les derniers évènements leur donneraient bien raison. Surtout que celui qui a présidé le terrible rite du Ngui, sa majesté Effa, aujourd’hui malade serait, dit-on, sous les feux de la colère des ancêtres.
Avec camerounweb