Plusieurs jours après l’annonce de sa réélection, Paul Biya a reçu une lettre de félicitations d’Emmanuel Macron, en date du 25 octobre. Le président camerounais l’a publiée sur sa page Facebook officielle, dimanche 29 octobre au soir. Très vite, des internautes et des médias camerounais ont jugé qu’elle était fausse. Or, le document est authentique… mais n’avait aucunement vocation à être rendu public.
Paul Biya a été officiellement réélu président de la République pour la septième fois, le 7 octobre avec 71,28 % des voix, une victoire très large. Son dauphin, Maurice Kamto, est crédité de 14,23 % et ne reconnaît d’ailleurs toujours pas les résultats du scrutin. Les résultats officiels ont été proclamés le 22 octobre.
La lettre est brève. Emmanuel Macron y évoque en trois paragraphes ce qui constitue selon lui les grands enjeux du Cameroun : le défi de la jeunesse, la crise en zone anglophone, la lutte contre Boko Haram. Il assure que la France se tient aux côtés du Cameroun.
A peine publiée, la lettre a été vivement critiquée : beaucoup d’internautes nous ont ainsi contactés, certains questionnant, d’autres remettant directement en cause son authenticité. Un site camerounais résume les trois points qui sèment le doute : la lettre ne comporte pas les emblèmes officiels de la République française comme on pourrait s’y attendre ; la signature d’Emmanuel Macron ne ressemble pas aux signatures qu’il utilise habituellement (ce qu’un rapide coup d’œil sur Google images tend à confirmer) ; enfin, la missive est datée du 25 octobre, et elle n’a été publiée par la page de Paul Biya que quatre jours après, le 29, un délai qui interroge certains.
CheckNews, le service de vérification des faits de Libération, a contacté l’Élysée pour y voir clair : la présidence de la République française affirme que cette lettre-là est authentique, mais qu’elle n’avait pas vocation à être rendue publique.
Contacté par la rédaction des Observateurs de France 24 pour savoir pourquoi la page officielle de Paul Biya avait alors décidé de publier le document, le ministre de la Communication, Issa Tchrioma, estime que “c’est une question éminemment diplomatique, relevant exclusivement de la compétence du président de la République” et dit n’avoir aucun commentaire à faire. Il se félicite néanmoins que “l’Élysée ait confirmé l’authenticité de la correspondance, c’est un pied-de-nez parfait aux détracteurs de la politique du président qui affirmaient que cette lettre était fausse “.
Si la lettre d’Emmanuel Macron est authentique, le fait qu’elle ait eu vocation à rester privée et n’ait été envoyée que tardivement peut s’expliquer par l’embarras de Paris face à la gestion de la crise en zone anglophone par le président réélu, comme le notait RFI après l’officialisation des résultats. De fait, Paul Biya avait dû se contenter dans un premier temps d’un simple communiqué du ministère des Affaires étrangères français, le 23 octobre dernier. Emmanuel n’avait pas appelé Paul Biya, comme cela est de coutume.