La démocratie africaine s’enfonce dans son niveau le plus bas. La preuve par les derniers développements notés au Zimbabwe, au Mali, au Cameroun et en République Démocratique du Congo. Ce qui présume d’un avenir assombri par des processus entachés d’irrégularités et qui va au-delà des périodes électorales.
La démocratie africaine marche en reculant.Le round up fait dans le cadre de la table-ronde sur « sur les Élections Récentes et Futures en Afrique » que TrustAfrica a organisé,le lundi 22 octobre à Dakar, a permis s’en rendre compte.
Universitaires, chercheurs, acteurs de la société civile sont unanimes : « la démocratie africaine est malade ». Ce qui présume d’un avenir sombre de ce maillon faible du processus de développement du continent.
Pour confirmer ce postulat, les derniers développements survenus au Zimbabwe et au Mali sont brandis comme preuves.
S’y ajoutent le Cameroun ou Paul Biya est au pouvoir depuis 32 ans et en République démocratique du Congo (RDC), un pays avec un fichier électoral dans lequel plus de six millions d’électeurs n’ont pas une identité fiable.
Sans oublier la polémique autour des machines à voter qui ne respecteraient aucune des 15 conditions requises.
Ce qui fait dire à Mme Jeanne Elone, Directrices des Programmes de TrustAfrica au Cameroun que ce pays est un exemple de stagnation historique car Paul Biya n’a jamais été élu.
Une radioscopie qui confirme le recul tant redouté de la démocratique africaine. Une vue panoramique complétée par le retournement de situation survenu au Kenya, les multiples tentatives de modification de la constitution ou des règles du jeu a la veille des joutes électorales.
C’est à l’image de la loi sur le parrainage au Sénégal où une volonté inavouée du régime en place de trouver urbi orbi un second mandat en écartant la candidature de potentiels présidentiables.
A cela, s’ajoute la connivence entre pouvoirs et institutions judiciaires impliqués dans la supervision et la validation des résultats d’une élection.
Quand l’Afrique de l’Ouest dame le pion à l’Afrique Centrale
Face à cette situation peu reluisante présentant un visage hideux de la démocratie en Afrique, les observateurs avertis ayant pris part à cette table-ronde TrustAfrica constatent que de plus en plus les déficits s’accumulent avec des lacunes notées sur les systèmes.
Selon eux, les institutions juridiques impliquées dans la supervision et l’arbitrage sont mises en cause du point de vue de leur intégrité et leur indépendance.
A leur avis, le rôle de l’argent dans les élections est devenu une menace de plus en plus dans l’expression démocratique.
A cela s’ajoute l’infiltration des bandes criminelles dans le processus démocratique, notamment dans le financement de la campagne de certains candidats aux élections.
Le Pr Abdoulaye Bathily, sous-secrétaire général pour les Nations Unies à Madagascar estime que cette situation est notée depuis 2010 avec des élections qui sont devenues une manière de confirmer un pouvoir.
A son avis, l’Afrique de l’Ouest est en train de damer le pion à l’Afrique Centrale sur ce chemin tortueux. Ce qui, pour lui, cause le risque de réveiller les vieux démons et des guerres civiles.
Avant de lancer : « En Afrique, les résultats des élections sont prévisibles mais le processus électoral est imprévisible ».
Dans cette même veine, Mme Coumba Traoré s’inquiète du fait que « les périodes d’élections sont devenues des moments de doute et de crise avec son lot de violence ».
Ce qui amène le Dr Ebrima Sall Directeur Exécutif TrustAfrica à se demander : « est-ce que le changement de leadership peut conduire à des avancées démocratiques ? ».
M. Demba Moussa Dembélé, Président de l’Africaine de recherche et coopération pour l’appui au développement endogène (Arcade), d’y ajouter : « il y a un recul démocratique en Afrique car les gens se relaient au pouvoir sans changer grand-chose dans la vie des populations ». Ce qui témoigne l’existence de systèmes de prédation rentière au sommet.
Une interrogation qui, d’après lui, pose même la question de la valeur des élections dans certains cas, vu les problèmes relevés dans la manière d’organiser ces scrutins.
Ce qu’il trouve comme brin d’espoir, par contre, c’est le début de prise de conscience, par les populations, de l’importance d’une élection pour faire entendre sa voix.
Mais aussi, du fait qu’en Afrique, de plus en plus, un pouvoir en place peut organiser des élections et les perdre.
La preuve, malgré les controverses et les contestations avant et après les élections, des transitions pacifiques du pouvoir dans des pays comme la Sierra Leone, le Libéria, la Gambie et le Burkina Faso ont renforcé la confiance dans le pouvoir transformateur des processus électoraux et la force de la participation populaire.
Ce qui s’explique, par moment, par le leadership incarné par certaines qui dirigent certains institutions. C’est à l’image du Nigeria et de la Gambie ou des gens ont pris leur courage à deux mains pour décréter la défaite du régime en place malgré les menaces.
Pour le Dr Ebrima Sall, les élections ne résolvent pas le problème car la démocratie c’est tout un processus.
A son avis, il faut continuer à investir dans la vie d’après élections pour contrôler le travail des institutions et donner aux populations un droit de regard.
La société civile est appelée a jouer son rôle
Les élections présidentielles continuent d’être d’importants tests de consolidation de la démocratie en Afrique, en particulier dans les pays sortant d’un régime autoritaire ou d’un conflit.
A cet effet, les organisations de la société civile et les mouvements sociaux sont priés de jouer leur rôle de plus en plus important, non seulement dans la surveillance des élections (salles de crise et participation des électeurs).
Ils sont également attendus pour la transparence de l’ensemble du processus électoral et le respect des normes internationales ainsi que de la Constitution et des codes électoraux des pays concernés.
Pour Briggs Bomba, Directeur de Projet Zim Alliance de TrustAfricaau Zimbabwe, il faut aussi avoir des institutions fortes comme l’a suggère l’ancien président américain, Barack Obama, lors de l’une de ses visites en Afrique.
Ce qui, à son avis, suppose l’élaboration d’un projet démocratique africain qui sera, dans certaines séquences, diffèrent de celui hérité du colonialisme.
Dans ce même ordre d’idées, M. Mamadou Goita, Directeur exécutif d’IRPAD au Mali, s’attaque au coût exorbitant de l’organisation des élections en Afrique.
Il appelle également au renouvellement de la classe politique ainsi que des idées véhiculées.
Sur cette lancée, Jeanne Elone pense que la société civile doit jouer son rôle pour faire passer les populations de ces pays pointés du doigt de la stagnation à la participation.
M. Abdoulie Janneh, membre du Conseil de TrustAfrica et Directeur de la Fondation Mo Ibrahim met le doigt de sur la supervision électorale.
D’après lui, l’observation internationale ne constitue qu’une petite portion dans le processus.
Pour une supervision fiable, M. Janneh plaide pour le renforcement du lien entre la société civile et les jeunes afin d’impulser un changement de paradigme.
Pascal Kampale d’OSIWA appelle à la restauration de la confiance des institutions qui organisent et supervisent les élections mais aussi encourager la forte participation des populations pour avoir une légitimité populaire au terme des joutes électorales.
Avec lecongolais