Les débats ont été on ne peut plus houleux à N’Djamena. La pomme de discorde, selon nos sources, la dévaluation, une fois de trop, du Fcfa. Le Fonds monétaire internationale met une grosse pression sur les Etats de la Communauté économique des Etats de l’Afrique Centrale, Cemac. Les chefs d’Etat ne veulent pas céder. On comprend mieux cette rencontre extraordinaire convoquée ce 25 octobre, par le président tchadien Idriss Déby Itno, par ailleurs président en exercice de la Cemac. Un sommet consacré à la situation économique dans l’espace sous régionale.
Le conclave à huis clos a regroupé les dirigeants de la sous région et les présidents des institutions régionales, la France représentée par son ministre de l’Economie et des Finances Bruno Le Maire. La Cemac ne veut pas lâcher du lest. A travers son représentant Philémon Yang, le président Camerounais Paul Biya a donné sa position, non à la dévaluation. Pendant les travaux, le président Obiang Nguema de la Guinée Equatoriale a demandé à la France de faire le point sur le compte de souveraineté des Etats Africains auprès du trésor français. La France à son tour demande à Dénis Sassou-Nguesso de ressortir l’état de ses dettes envers la Chine. Réponse : «C’est auprès de la Chine que vous aurez les détails.»
Une dévaluation du Fcfa serait catastrophique pour l’économie des pays concernés (Cameroun, Congo-Brazzaville, Gabon, Guinée équatoriale, République centrafricaine et Tchad). «Qu’est-ce qui motive la dévaluation du Fcfa aujourd’hui ?» s’interroge Dr Pierre Alaka Alaka. Joint au téléphone, cet économiste ponctue : «Sur le plan même du parallélisme des formes, le traité monétaire avait été signé entre les chefs d’Etat, Ahidjo, De Gaulle, Léon Mba… Aujourd’hui le Fmi arrive, on ne sait pas d’où il sort. Il faut respecter nos chefs d’Etat. Pour modifier un traité, c’est les mêmes personnes qui le font. Donc de ce point de vue, la dévaluation sur la forme est irrecevable. Maintenant sur le fond, après la première dévaluation, quelle autre dévaluation peut-on faire ? Les économies africaines sont détériorées. Et une seconde détérioration va nous pousser à la faillite étatique, dans la mesure où, avec les grandes surfaces présentes actuellement, ce qu’on achetait hier à 1000 Fcfa, coutera désormais 2000 Fcfa. Et de notre côté, le produit qu’on vendait hier à 500 Fcfa coutera maintenant 250F. Si on accepte une chose pareille, ça veut dire qu’on n’est pas gouverné.»
En clair, la dévaluation est non fondée. Face à ce passage en force que veut opérer le Fmi, des observateurs africains trouvent qu’il est plus que temps pour les chefs d’Etat de sortir de cette monnaie frappée en France. Une décision qui devra être soutenue par les Africains. A préciser que le sommet extraordinaire convoqué par Idriss Deby Itno fait suite à celui qui s’est tenu quelques jours avant en France. Le ministre de l’Economie et des Finances insistait sur la dévaluation de la monnaie, l’augmentation des taux d’imposition, entre autres. Idriss Deby Itno note d’ailleurs «l’impérieuse nécessité de renforcer la solidarité communautaire pour avancer ensemble dans un même rythme.»
Avec lavoixdukoat