Quelque 22.000 candidats seront en lice lors des élections municipales et régionales du 13 octobre dont la campagne commence ce vendredi: mais derrière ce scrutin local c’est la présidentielle de 2020, déjà dans toutes les têtes, qui se dessine.
“Chacun va se compter, savoir qui est avec qui et qui fait quoi, avant les élections présidentielles de 2020”, explique à l’AFP le politologue ivoirien Jean Alabro.
Le scrutin doit aboutir à l’élection de 197 maires et 31 présidents de conseils régionaux, mais le paysage politique ivoirien s’est transformé en quelques mois.
La coalition au pouvoir derrière le président Alassane Ouattara, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), a explosé en raison des multiples ambitions présidentielles.
“Le RHDP est mort”, estime Maurice Kakou Guikahué, secrétaire exécutif du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), le parti de l’ancien président Henri Konan Bédié, enterrant une alliance née en 2005.
Le PDCI a refusé de se maintenir dans le RHDP, estimant que le Rassemblement des républicains (RDR), le parti de Ouattara, tentait en fait de l’assimiler pour pouvoir présenter un candidat à lui à la présidentielle. Le PDCI, qui a soutenu Ouattara en 2010 et 2015, entendait que le parti de Ouattara lui rende la pareille en 2020 en soutenant un candidat PDCI.
Conséquence, les deux partis vont s’affronter dans de multiples municipalités et notamment dans la symbolique commune du Plateau où le candidat du RDR, Fabrice Sawegnon, qui a géré les campagnes de nombreux chefs d’Etat africains, va cette fois se frotter aux urnes face au député sortant PDCI, Jacques Gabriel Ehouo.
Chacun comptera ses forces en vue de la présidentielle. M. Guikahué assure: “Le PDCI est confiant et ne sera pas ridicule” face au RHDP, la seule force à pouvoir se présenter sur l’ensemble du territoire.
“Ouattara déroule son rouleau compresseur”, titrait mardi Le Patriote, journal pro-gouvernemental après la cérémonie d’investiture des candidats. Mabri Toikeusse, 2e vice-président du RHDP, a appelé les candidats à s’appuyer sur “le bilan national et local” du président face aux opposants déclarés, mais aussi face à 389 listes indépendantes, parmi lesquelles les “hommes de (Guillaume) Soro”, l’ancien chef de la rébellion et président de l’Assemblée nationale.
Officiellement membre du RDR avec qui il entretient des relations souvent conflictuelles, Soro soutient plusieurs listes indépendantes. L’affrontement entre son poulain, Tefhour Koné, et le ministre de la Défense, Hamed Bakayoko, dans le quartier d’Abobbo à Abidjan est sans doute le plus médiatique du territoire. M. Soro et Hambak (surnom de Hamed Bakayoko) sont souvent présentés comme des frères ennemis et on prête aux deux des ambitions présidentielles.
Autre nouveauté du paysage, le Front populaire ivoirien (FPI), fondé par l’ancien président Laurent Gbagbo, présente des candidats après s’être enfermé dans une logique de boycottage de la plupart des scrutins depuis l’élection de Ouattara à la présidence.
Absent de la scène, le FPI pourrait reprendre du poil de la bête et redevenir une des trois forces politiques du pays avec une première mobilisation lors des locales. L’occasion pour que les différentes tendances nées après la chute de Laurent Gbagbo “puissent se retrouver pour mener le combat de la transformation de la Côte d’Ivoire”, selon le vice-président du parti, Touré Amara.
Le débat se cristallise aussi autour de la Commission électorale indépendante, qui doit gérer le vote des 6,5 millions de personnes inscrites. Décriée par l’opposition, qui réclame sa refonte, elle a été maintenue en place en attendant une réforme.
“Ce sont des élections de développement, on y va et si nous constatons des fraudes cela nous permettra de détecter le mécanisme et prendre des dispositions pour les contrecarrer en 2020, date de l’élection présidentielle”, a souligné M. Guikahué.
Avec AFP