Envol Immobilier a réussi la prouesse de livrer, le 2 mai dernier, la toute première cité ministérielle de la nouvelle ville de Diamniadio, située à 35 kilomètre au nord de Dakar, capitale du Sénégal. Fort de son expertise, de ses capacités techniques et de son rayonnement régional, le groupe vient de signer, le 10 septembre 2018, un important contrat avec l’Etat de Côte d’Ivoire pour la construction du campus universitaire de la ville de San Pedro. Pour en connaître un peu plus sur ses activités et ses perspectives, Financial Afrik est allé à la rencontre de Madani Maki Tall, Président du conseil d’administration.
Vous venez de signer un important contrat pour la réalisation d’une université en Côte D’Ivoire, de quoi s’agit-il ?
En effet, dans le cadre du Programme de Décentralisation des Universités en Côte D’Ivoire (PDU) lancé en 2014, notre groupe, à travers sa filiale Envol Partenariats – Côte d’Ivoire, vient de se voir confier dans le cadre d’un partenariat public-privé (PPP), la réalisation de l’Université de San Pédro dans le sud-ouest de la Côte D’Ivoire. Cette université moderne abritera à terme 20.000 étudiants. Nous en sommes fiers et très reconnaissants vis-à-vis des autorités ivoiriennes qui nous ont fait confiance. C’est un projet majeur pour la jeunesse ivoirienne et les étudiants de demain dans ce grand pays de la sous-région ouest africaine. L’implantation de ce grand projet universitaire permettra aussi de renforcer la politique du Gouvernement ivoirien en matière d’aménagement du territoire.
En Mai dernier, Envol Immobilier a livré la première tranche de la Sphère ministérielle de Diamniadio. Pouvez-vous revenir sur ce projet complexe, les montants des investissements engagés et le rôle des différentes parties prenantes?
La création de la nouvelle ville de Diamniadio, par le biais de partenariats publics-privés, est une des priorités du Plan Sénégal Emergent (PSE). Dès que les grandes lignes de ce vaste programme ont été présentées par les autorités sénégalaises à l’ensemble des partenaires privés, nous avons tout de suite été séduits par les possibilités d’aménagement de ce nouveau pôle urbain pas très loin de Dakar. L’objectif recherché étant une cohérence d’ensemble, qui fait que tout est sur place. On y travaille, on y habite, on y trouve les structures scolaires et sanitaires, des loisirs et une bonne qualité de vie. C’est ainsi que, convaincu de la pertinence de cette vision, Envol Immobilier Sénégal a répondu à l’appel lancé par le Chef de l’Etat Macky Sall au secteur privé, en proposant la réalisation de cette sphère ministérielle. Je rappelle ici que deux autres développeurs ont aussi été retenus par l’Etat du Sénégal pour la réalisation de deux autres sphères ministérielles. (N.D.L.R. les deux autres développeurs sont TEYLIUM et GETRAN).
La Sphère Ministérielle construite par Envol Immobilier Sénégal abritera plus de 1 600 fonctionnaires. C’est un ouvrage de plus de 42.000 m2 de surface bâtie, clés en main. Il est entièrement équipé et meublé, et combine harmonieusement esthétique architecturale, bâtiments intelligents, réseaux interconnectés et efficience énergétique. Le tout sur 3.5 hectares.
Le coût global de l’investissement est de 56 milliards de Francs CFA. Son financement a été assuré par Envol Immobilier grâce, notamment, à un prêt de 30 milliards de Francs CFA octroyé par le Groupe Coris Bank. Nous pensons que ce projet de Sphère ministérielle est un modèle de réussite, fondé sur la confiance de l’Etat du Sénégal au développeur que nous sommes et l’audace d’une Banque Africaine qui a bien voulu nous suivre. Il convient de rappeler aussi que nous avons bénéficié de l’accompagnement et des conseils du Gouvernement et de l’administration, en particulier de nos partenaires directs du Ministère de l’Economie, des Finances et du Plan (Impôts et Douanes), ainsi que ceux de la Direction Générale du Pôle Urbain de Diamniadio et du Lac Rose et de l’Agence du Patrimoine Bati de l’Etat, nos principaux interlocuteurs au jour le jour.
Votre tranche Cité ministérielle de Diamniadio a été livrée en avance par rapport au délai retenu dans la convention. Qu’est-ce qui explique cette célérité?
En effet nous avons livré la sphère ministérielle avec sept mois d’avance sur le délai contractuel que nous avions avec l’état du Sénégal. Ce qui est peu courant dans le BTP. Avec la particularité du sol de Diamniadio, un sol à argile gonflante, nous avons décidé de démarrer les travaux avant la saison des pluies, c’est à dire en mai 2016 ; ce qui nous a permis d’avoir cette avance sur le planning prévisionnel. Nous avons réalisé la sphère avec notre partenaire technique WIETC. Ce constructeur de renom a réalisé les aéroports de Lomé et de Brazzaville, la cité ministérielle de Kinshasa, 10 000 logements à Malabo, pour ne citer que ces quelques projets d’envergure ; rien qu’en Afrique. Il convient de noter aussi que dans le cadre de ce projet, et conformément à notre désir d’impliquer les entreprises locales, nous avons confié environ 60% des travaux à des entreprises sénégalaises (Dieng & CO, SEREX, TECSEN SAUDEQUIP, SODACOM, AFRIQUE ASCENSEURS, SGEQUIP, SESAM INFORMATICS, CERAM
ENERGIE COM). A Dakar, nous avons pu nous entourer d’une équipe de classe internationale, comme j’aime la qualifier, avec des références et des compétences qui nous permettent aujourd’hui de proposer, partout dans la sous-région, des projets clés en main en mode Fast-Track; c’est-à-dire livrés en moins de 24 mois.
Peu de sénégalais connaissaient Envol Immobilier avant votre arrivée sur la ville nouvelle de Diamniadio. Quelles sont ses références, son actionnariat et son périmètre de compétences ?
Envol Immobilier Sénégal est une Société Anonyme de droit Sénégalais, avec un capital de deux milliards de FCFA. Envol Immobilier Sénégal est une émanation du groupe Envol Afrique. Le Groupe Envol Afrique est déjà bien implanté en Côte d’Ivoire, au Mali, en Guinée, au Sénégal et au Burkina Faso. Il intervient dans l’industrie de transformation, les technologies, l’énergie et les télécommunications, avec un chiffre d’affaires annuel supérieur à 100 milliards de F CFA et un effectif de plus de 2000 personnes. Par ailleurs, les gestionnaires de Envol Immobilier Sénégal ont une somme d’expérience considérable dans les institutions internationales, dans le privé et dans l’action gouvernementale. Je suis fier de dire aussi que nous avons recruté des jeunes sénégalais extrêmement brillants à travers la diaspora. Ces jeunes nous apportent fraicheur, innovation, créativité et une grosse capacité de travail. En passant, je voudrais d’ailleurs faire noter que le Chef de Projet sur la Sphère Ministérielle de Diamniadio est une jeune sénégalaise de 32 ans, formée dans les écoles d’ingénieurs au Sénégal !
Les activités d’Envol Immobilier Sénégal sont articulées autour des infrastructures d’État (Batiments administratifs, Universités, Hôpitaux, Routes, etc.), de développement de projets immobiliers privés, et de fabrication d’équipements. Nous privilégions une intégration stratégique de différents métiers qui permet de gérer et de réaliser efficacement les projets, de l’idée initiale en passant par la conception et l’ingénierie, le financement, la construction et l’équipement, ainsi que l’exploitation et la maintenance. Un de nos objectifs premiers est de proposer des solutions techniques et financières optimales à nos Etats clients afin de leur permettre de sortir du piège de la location « ad vitam aeternam » et enfin devenir propriétaire des infrastructures qui abritent les services publics notamment. C’est ainsi que nos Etats pourront remplir dignement leurs missions régaliennes et offrir aux citoyens le meilleur service public possible.
Quelles sont les caractéristiques techniques, financières et fiscales du contrat qui lie Envol Immobilier et l’Etat du Sénégal ?
Le projet de la sphère ministérielle, est porté par un Partenariat Public – Privé. L’instrument juridique utilisé, d’accord-partie, avec l’Etat du Sénégal, est la location-vente. Il est opportun de rappeler ici que c’est Envol Immobilier qui a conçu, financé et réalisé le projet dans sa globalité avec le concours financier de Coris Bank. Pendant six ans, Envol Immobilier Sénégal exploite et entretient la sphère ministérielle avant son transfert à l’Etat moyennant un loyer. Je note au passage que l’Etat a déjà pris possession des bâtiments et des ministères y sont déjà installés. Aussi, compte tenu du mode de financement innovant, des risques encourus par le développeur, et dans l’intérêt économique de l’Etat du Sénégal, une annexe fiscale, conforme à la réglementation sénégalaise, ainsi qu’aux dispositions de l’OHADA, a été conçue et annexée au contrat de location-vente, dans le but d’éviter que les charges financières sur les crédits qui serviraient à financer les impôts ne viennent renchérir le coût global du projet. En d’autres termes, l’objectif du régime fiscal du projet est de neutraliser les effets-coûts de la fiscalité indirecte sur le projet afin de rendre ainsi le coût des loyers plus abordables pour l’Etat du Sénégal. Cela dit, la société Envol Immobilier ne présente aucune spécificité, au regard des procédures fiscales, elle paie ses impôts et respecte ses obligations légales en faisant régulièrement ses déclarations et l’Administration exerce sont droit de communication et de contrôle.
D’une manière générale, que gagne la puissance publique en faisant recours à des types de contrats PPP plutôt qu’aux contrats classiques ?
Pour faire simple, je dirais que concernant un projet d’infrastructure, le contrat de Partenariat Public-Privé est un contrat par lequel le partenaire privé est responsable de toutes les étapes de la réalisation du projet. Il en assure la conception, le financement, la réalisation et la gestion de l’infrastructure pendant une durée déterminée, avant de transférer sa propriété au partenaire public. Tandis que dans un contrat classique exécuté dans le cadre de la commande publique ou les appels d’offres classiques, l’entreprise privée assure juste l’exécution du projet déjà étudié et ses prestations sont payés par le maître d’ouvrage, donc l’Etat ou ses démembrements. Dans le contexte africain en particulier, les Partenariats Publics-Privés se présentent d’abord comme une solution aux contraintes de financement du service public auxquelles nos Etats sont confrontés. Sous cet angle, les PPP constituent un mécanisme innovant alternatif pour faire face aux besoins d’investissement de la puissance publique. D’ailleurs la Banque Mondiale estime que les PPP permettent de mobiliser quelques 16 milliards de dollars d’investissement par an, ce qui permettrait de couvrir environ 40% du déficit d’investissement public dans les infrastructures en Afrique. Vous savez, certains Etats n’ont pas construit de bâtiments publics depuis plus de 30 ans. Pendant ce temps, la population a doublé dans la plupart des pays et le nombre de fonctionnaires par exemple a été multiplié par trois, quatre, voire cinq dans certains pays. Aujourd’hui, plusieurs Etats font face à des charges locatives extrêmement élevées, sans jamais être propriétaire de ces bâtiments. Le modèle que nous proposons est une solution pragmatique et financièrement soutenable pour les Etats. Cependant je dois préciser qu’au delà de la question du financement, le Partenariat Public-Privé, s’il est bien étudié, bien négocié et bien mis en œuvre, est porteur d’efficience économique en termes de transfert de risques et d’optimisation de l’apport du secteur privé. En effet, le recours au PPP doit permettre à la puissance publique de transférer vers un partenaire privé rigoureusement sélectionné, les risques que celui-ci est à même de mieux prendre en charge, tout en bénéficiant de sa capacité d’innovation et de l’efficience dans les délais de réalisation. Enfin, il est important de souligner qu’un contrat PPP met aussi l’accent sur les résultats. La notion de performance y est centrale. Elle contribue à assurer une meilleure qualité de service, cela d’autant plus que les profits pour l’investisseur privé sont grandement tributaires de ladite qualité dans la fourniture de ses prestations.
Quels sont les objectifs à moyen et long terme d’Envol Immobilier au Sénégal et dans la sous-région ?
Nous sommes très confiants sur les perspectives de développement en Afrique et dans la sous-région en particulier. Au Sénégal, où nous avons notre ancrage, l’Etat du Sénégal, par le biais de l’AGPBE, nous a de nouveau fait confiance en nous sélectionnant pour la construction de la Maison de Nations Unies à Diamniadio. C’est un projet de grande envergure que nous sommes honorés de pouvoir réaliser. Sur ce projet au Sénégal et sur l’Université de San Pédro en Côte d’Ivoire, nous serons accompagnés par la « Industrial and Commercial Bank of China (ICBC) », le plus grand groupe bancaire en Chine. Si mes informations sont correctes, nous sommes d’ailleurs le premier groupe privé africain que ICBC va financer directement. Pour la Maison des Nations Unies, les études et les travaux ont d’ailleurs démarré. L’idée est de regrouper à Diamniadio, les 33 agences de l’ONU actuellement éparpillées dans la ville de Dakar. Cette nouvelle infrastructure, élaborée avec le concours du grand cabinet d’architecture Wilmotte & Associés, sera située dans une zone respectant toutes les exigences de sécurité établies par les Nations Unies. Le projet sera livré en 24 mois. Cela va permettre une meilleure interaction entre les différents services et agences des Nations Unies et ceux de l’Administration, mais surtout permettre à l’Etat de réduire les charges locatives relatives à l’hébergement des différentes agences du système des Nations-Unies. Par ailleurs, pour répondre aux besoins de logements de ces fonctionnaires des Nations-Unies et aux futurs résidents de Diamniadio, nous avons décidé de financer, à travers un fonds d’investissement (Envol Capital) que nous avons mis en place, la construction d’une cité résidentielle avec des appartements «haut standing», intelligents, des aménagements sportifs, des écoles, des espaces verts et un centre commercial. Tout cela contribue bien sûr à donner un contenu concret à la vision des autorités sénégalaises de faire du nouveau pôle urbain de Diamniadio une véritable « Smart City».
Enfin, nous avons été approchés par les gouvernements du Burkina Faso, du Gabon, du Togo et d’autres pays de la sous-région afin d’explorer les possibilités pour notre groupe de les accompagner dans l’édification de grandes infrastructures d’Etat inspirées en partie de nos réalisations au Sénégal. Bref, nous sommes enthousiastes sur les perspectives d’avenir. Il est important de montrer que les africains peuvent faire confiance aux africains. Nous n’avons pas de doute sur les possibilités qui seront offertes à d’autres groupes comme le nôtre tant il y a à faire. Il y a vraiment de la place pour les investisseurs qui veulent s’inscrire et travailler, avec sérieux, dans la durée. Le retard en matière de développement des infrastructures est réel. Les besoins sont là ; les compétences aussi. Les projets bien ficelés trouveront toujours des financements adaptés et des africains mobilisés qui veulent apporter leur pierre à l’édifice.
M. Tall, vous êtes un ancien Directeur des Opérations de la Banque Mondiale. Vous étiez déjà connu dans la sous-région pour y avoir exercé au titre de cette institution. Malgré tout, certains vous disent Malien, d’autres Ivoirien ou Sénégalais ; alors que répondez-vous ?
(sourire…) En effet, on me pose souvent cette question. Je répondrais tout simplement que je suis un citoyen de l’Afrique. Je me sens chez moi partout même si aujourd’hui je vis au Sénégal. Je rappelle au passage que je suis un descendent direct du vénéré guide El Hadj Oumar Tall, en qui beaucoup d’africains se reconnaissent et duquel un bon nombre s’inspire. Lui est né au Sénégal mais a disparu au Mali après avoir parcouru toute l’Afrique de l’Ouest et l’Orient. Je pense donc qu’il est difficile de me coller une étiquette et d’ailleurs ça n’a pas beaucoup d’intérêt à mon avis.
Avec