Il paraît que les recruteurs préfèrent les candidats en poste. Si c’est vrai, ne faut-il pas changer sa stratégie en conséquence, et plutôt que de chercher le poste idéal en accepter un autre ? Voici les réponses – nuancées – de nos experts.
OUI : les recruteurs préfèrent les candidats en poste
Parole d’ancien recruteur, c’est – malheureusement – vrai. « Cela peut paraître complètement aberrant car une personne en poste n’est pas libre immédiatement, et surtout beaucoup plus exigeante, mais les recruteurs préfèrent. Avoir un emploi représente un gage de qualité et de sécurité, assure Christel de Foucault, auteure du guide Déjouez les pièges des recruteurs. Lorsque j’étais recruteur, mes clients me demandaient la plupart du temps de rechercher en priorité des personnes en poste, en gros d’aller chasser des candidats pour essayer de les convaincre de rejoindre leur entreprise. » Benoît Montet assure que les recruteurs sont victimes de leurs préjugés et de leurs habitudes. « Ils pensent de façon un peu irrationnelle que ces profils seront plus efficaces, analyse le directeur de Top Employers, institut d’études, d’audit et de certification dans le secteur des ressources humaines. Selon eux, ce profil, en poste donc compétent, va accepter un nouveau poste pour évoluer. En revanche, un profil entre deux postes est-il aussi sûr ? C’est un raccourci terrible mais aussi des préjugés contre lesquels il est difficile de lutter. Même un recruteur à l’esprit plus ouvert ne parviendra pas forcément à convaincre un client avec les mêmes certitudes. » Et le constat vaut aussi pour les jeunes diplômés. « Entre deux jeunes diplômés talentueux, un recruteur sera davantage intéressé par celui qui est en poste, déplore Benoît Aubert, directeur du développement du Pôle Léonard de Vinci. Il estime, parfois à tort, qu’un profil en poste est naturellement plus compétent car il a un peu plus d’expérience. »
NON : car ce n’est pas forcément un bon calcul
Mais même s’il est tenté de dire oui, Benoît Montet refuse d’être aussi catégorique. « Il faut aussi se dire que chercher le job idéal représente souvent l’équivalent d’un job à temps plein, poursuit-il. Dès lors, accepter un poste “tremplin” ou purement alimentaire ne représente pas forcément un bon calcul. » Cet expert en ressources humaines invite cependant les candidats qui poursuivent leurs recherches à garder ces préjugés à l’esprit. « Il faut partir avec l’idée de rassurer mon interlocuteur, de lui donner les éléments pour lui prouver qu’il ne se trompe pas avec votre candidature. Mais ce qui est surtout important est de se placer en position d’acheteur plutôt que demandeur d’emploi car un recruteur est plus séduit par quelqu’un qui lui résiste un peu que par un profil qui lui court après. » « Accepter un job pour en trouver un autre, c’est courir le risque de rater les deux, témoigne la coach Valérie Moissonnier. J’ai accompagné récemment un client qui avait fait ce calcul. Non seulement il n’a pas eu le temps de chercher correctement, mais il n’a pas été gardé au terme de sa période d’essai ».
OUI MAIS : il vaut mieux s’investir un minimum dans son job intermédiaire
Nos experts n’oublient pas non plus que les candidats ont aussi besoin de gagner leur vie. « Il y a cinq ou six ans, j’aurais répondu que, bien sûr, mieux valait attendre un peu pour trouver le job idéal », nuance Valérie Moissonnier. Conjoncture oblige, la coach a revu son discours. « Finalement, je pense qu’il vaut mieux, dès qu’une période de chômage devient pesante, accepter un poste pour gagner en visibilité. Cependant, il faut accepter de définir une stratégie plutôt à moyen terme. » Benoît Aubert confirme. « On peut effectivement prendre un poste en pensant au coup d’après, mais attention à ne pas bouger trop vite car cela desservira le candidat plus tard. » Il invite ainsi à prendre un poste pour se donner le temps de la réflexion, mais sans se précipiter. « Après se pose la question de la durée idéale en poste intermédiaire. Or, je dirais qu’il faut quand même partir dans l’idée d’y passer un ou deux ans sans exclure de s’y plaire. Car ensuite, quelqu’un qui passe son temps à postuler ailleurs génèrera beaucoup plus de questions. » Sauf, évidemment à voir passer plus vite que prévu le job de ses rêves. « Les candidats hésitent parfois à le faire car ils ont l’impression de profiter d’une entreprise dans laquelle ils risquent de ne pas rester très longtemps », observe Christel de Foucault. Mais cette experte invite les candidats à penser d’abord à eux. « N’ayez pas d’état d’âme car les employeurs n’en ont pas quand ils vous licencient malgré vos bons et loyaux services. » Parole d’ancien recruteur…
avec cadremploi