Le plein retour de Moscou sur le continent africain provoque une véritable hystérie dans les cercles occidentaux. Si il y a quelques années encore, les paroles sur un tel retour faisaient sourire les élites occidentales, depuis que la Russie post-soviétique est passée à l’action, le sourire a subitement disparu…
Agitation diplomatique, matraquage médiatique, pressions politiques, les élites occidentales, notamment celles de l’Hexagone ne reculent désormais devant rien pour tenter à tout prix de maintenir leur prétendu « pré-carré » en Afrique, et empêcher une prise de souveraineté digne de ce nom au niveau de nombre de pays du continent. En effet et si l’on suit les titres de nombreux médias mainstream, francophones comme anglophones, l’heure est nettement à l’inquiétude. France 24, BBC, RFI, New York Times, Jeune Afrique et d’autres — tous « s’interrogent » sur les « motivations » et les capacités de Moscou en Afrique.
En réalité, cette inquiétude est assez compréhensible. Car ils savent que ce retour russe en terre africaine, frappera indéniablement le système que l’Occident a longtemps imposé au continent l’un des plus riches en termes de ressources naturelles et humaines, mais si longtemps dénigré avec des clichés promus par les mêmes médias mainstrimois. Souvenez-vous d’ailleurs des premiers pas de la Chine en Afrique: moqueries occidentales d’abord sur les capacités de Pékin, puis — lorsque la Chine commencera à s’imposer lancement de vastes campagnes anti-chinoises, notamment via les instruments médiatiques, pour enfin se rendre à l’évidence: la Chine a bel et bien réussi à s’imposer et malgré toutes les critiques dont elle peut faire face, le constat est sans appel, les Africains en majorité préfèrent Pékin à l’Occident.
Le retour russe fait d’autant plus peur aux Occidentaux pour plusieurs raisons. Tout d’abord car désormais la concurrence sino-occidentale pourrait entrevoir l’élargissement de cette opposition en deux blocs antagonistes, un peu dans le style du Conseil de sécurité de l’ONU: russo-chinois d’un côté et occidental de l’autre. Certes, les intérêts de la Russie en Afrique ne sont pas forcément ceux de la Chine, et vice-versa. Mais globalement parlant, il est aujourd’hui clair que Moscou et Pékin pourraient être en Afrique beaucoup plus partenaires que concurrents, et ce bien évidemment au détriment des intérêts occidentaux. Car faut-il le rappeler les domaines de compétence de la Chine en Afrique ne sont pas forcément ceux de la Russie, et les domaines d’expertise russe ne sont pas forcément ceux de la Chine. Ce qui signifie que les deux pays peuvent réellement se compléter, tout en respectant chacun la souveraineté des nations africaines. Cette complémentarité pourra d’ailleurs se faire aussi bien dans le cadre des projets liés à l’alliance BRICS, que dans le cadre des accords bilatéraux russo-chinois.
Autre point tout aussi important: celui de la popularité évidente de la Russie actuelle auprès d’une large partie de la population africaine. En effet et cela pourrait paraitre paradoxal: alors que la Russie avait perdu nombre de ses positions en Afrique à la chute de l’URSS, et que la jeunesse africaine actuelle n’a pas connu la période de la guerre froide, la politique extérieure russe contemporaine séduit justement un bien large nombre de représentants de cette jeunesse d’Afrique. Sans oublier évidemment la génération plus âgée — celle justement qui garde en mémoire l’apport décisif de la Russie soviétique dans la libération du continent du colonialisme, mais aussi dans le soutien qui fut accordé pour permettre à de nombreux Etats nouvellement libérés d’aller de l’avant. Et à ce niveau aussi, Moscou n’a pas de quoi rougir. Il suffit d’observer un pays comme l’Angola, qui malgré de nombreuses attaques visant sa souveraineté, notamment des régimes US et sud-africain version apartheid, ait non seulement pu résister grâce au soutien décisif de Moscou et de La Havane, mais ait pu devenir un pays prospère, dont les citoyens n’immigrent pas ou peu, à l’énorme différence des pays faisant partie du cercle vicieux nommé « Françafrique », pourtant disposant eux aussi de fort importantes ressources naturelles.
Et enfin, comme résultat des deux points précédents, les élites atlantistes comprennent parfaitement aussi que les succès des collaborations russo-africaines, comme c’est d’ailleurs actuellement le cas par exemple entre Moscou et Bangui, deviendront au final comme une vague, si ce n’est pas un tsunami, pour toute présence ultérieure occidentale sur ce continent. Et bien que les élites politico-médiatiques de l’Occident, et notamment françaises, s’obstinent à refuser de reconnaitre qu’ils doivent beaucoup à l’Afrique, le temps de rendre des comptes s’approche à un rythme élevé. Ajoutez à cela une autre réalité que l’establishment occidental aura beaucoup, mais vraiment beaucoup de mal à accepter: celui de perdre le contrôle sur les ressources naturelles africaines, à un moment de l’histoire où les notions de patriotisme et de souveraineté ont clairement le vent en poupe. En Afrique, le panafricanisme, comme lors de la guerre froide, s’impose de nouveau. Et malgré la vive opposition occidentale, la réalité sera ce qu’elle sera. Le monde, dont l’Afrique est membre à part entière, ne peut être que multipolaire.
Avec sputnik