Le deuxième livre de Mounir Ferram vient de paraître. L’intitulé est à la fois simple et complexe, poétique et prosaïque : « Les racines de l’espoir » qui coule, pourrait-on écrire, des bords de la Seine à ceux de Bregreg.
Ce livre tente de déchiffrer dans l’altérité et la différence des cultures, la vie dans ses multiples expressions humaines. Une quête, certes, troublante, mais captivante, que Mounir Ferram mène, avec passion, depuis plusieurs années. Ecrit en langue française, « Les racines de l’espoir tente de préserver à la culture Marocaine ses spécificités et toute son authenticité, sans que ce détour linguistique en altère la dimension poétique et allégorique ». Toute une quête donc, à laquelle nous invite l’auteur, révélé il y a seize ans déjà par le monumental « l’Ivresse des nuits » publié aux éditions Saint-Germain-des-Prés.
« L’espoir est la religion de ceux qui veulent prendre leur destin en main, le forger à la hauteur de leur convictions et de leurs efforts. »
Forcément, quand ce Français et Marocain, docteur en sémiotique du texte et de l’image mais également diplômé en marketing, éternel épris des mots, use de la plume pour évoquer les heurs et malheurs de l’identité double, l’auditoire que nous sommes, avide de clichés, peut être tenté de réduire la dimension du livre à la seule quête des racines qui anime tout immigré confronté à sa double identité. Raccourci réducteur que l’auteur balaie très vite : « Je pense que chaque individu peut confronter la problématique de l’identité, à tout moment de son existence, sans forcément quitter son pays ou émmigrer, volontairement ou involontairement, vers un autre. Il n’y a pas pire exil que celui ressenti sur sa terre natale ».
Une définition de l’espoir
La terre natale. Ce paradis perdu dans l’espace-temps est omniprésent dans Les racines de l’espoir, « Un livre de réflexion, à travers des vécus de personnages différents, sur une nostalgie qui va à la rencontre des lieux de l’enfance ». Les portes s’ouvrent sur des réalités dures, sur une société de contrastes et de clivages. Les femmes, les hommes et même les enfants, dans ce livre, peinent à s’en sortir, à préserver une forme de « dignité et d’espérance, alors que l’objet de leurs luttes est parfois d’une extrême banalité… »
Pour faire diversion, nous avons demandé à l’auteur, dès la première page tournée, de nous livrer sa définition de l’espoir. Morceaux choisis : « L’espoir est un moteur dans la vie. Il ne se contraint aucunement aux limites de l’existence, de quelque nature puissent-elles être. Grâce à l’espoir, nous parvenons à dépasser notre condition, à la transfigurer à force de conviction et de passion. Quand l’espoir est l’allié de l’homme, plus aucune force ne peut l’arrêter dans son élan, dans sa volonté de briser les entraves et les obstacles qui peuvent s’opposer à lui. L’espoir est la religion de ceux qui veulent prendre leur destin en main, le forger à la hauteur de leur convictions et de leurs efforts ».
De cette définition spontanée, tient sans doute le fil conducteur de Les racines de l’espoir, un univers où les personnages parviennent à s’accomplir, car leur foi en l’espoir reste entière et ne flanche jamais.
Les autochtones et les MRE
Reste à savoir si, dans le Maroc en devenir, l’interaction entre les autochtones et ceux qu’on désigne par le terme générique de MRE (Marocains résidents à l’étranger), les défis culturels sont dépassés. « Ce n’est pas, à mon sens, l’émmigration qui est génératrice d’un quelconque écartèlement culturel ou identitaire. Il s’agit plutôt de la manière dont nous gérons cette double culture. La vivons-nous dans une forme d’apaisement ou de tension ? Sommes-nous en mesure de faire cohabiter ces cultures dans une expression désencombrée de beaucoup d’héritages ? »
« En fait, tempère Mounir Ferram, le défi serait de parvenir à s’enrichir des deux bords. L’humain, tel qu’il s’exprime chez Montaigne ou chez Ibn Arabi puise dans le même fond universel. Ceci ne devrait pas pour autant faire taire les différences essentielles au respect des individus et de la diversité des pensées et des sensibilités ». La diversité des pensés et des sensibilités. Tout un programme pour le Maroc moderne qui a eu à traiter dernièrement coup par coup, des demandes de la part de l’association Ni Putes ni soumises, désireuse d’avoir pignon sur rue à Rabat ou encore d’une association d’homosexuels.
Choc culturel
Devrait-on conclure à l’imminence de l’inévitable choc culturel et se résigner à un affrontement sans fin des sociétés humaines ? Non, car il y a espoir : « Souvent, nous ne retenons que les dissemblances, la plupart du temps instrumentalisées, en oubliant l’essentiel qui est le respect des différences. Une société grandit de par sa capacité d’ouverture et de tolérance. Certaines situations nous désolent comme celles auxquelles vous faites allusion. En effet, l’exclusion nourrit les amertumes et parfois les prédestinent au pire… ». Riche de sa double identité, Mounir Ferram peut dire avec la spontanéité nécessaire à toute belle déclaration d’amour : « Je suis épris de mon pays et lui voue un attachement inconditionnel. Je suis intimement convaincu que le Maroc grandira de sa capacité à unir ses citoyens, à forger de nouveaux mécanismes sociaux plus générateurs de liens de solidarité que d’exclusion ».
Ultime religion
Bref, sortons des pièges tendus par une actualité riche en conflits et en oppositions et laissons nous mener par la trame du livre de Mounir Ferram et la nostalgie du pays d’origine qui s’ouvre sur l’inattendu ! Elle brise le silence de silhouettes humaines éperdument ivres d’ailleurs et nous mène à travers une terre aux multiples facettes à la rencontre d’amères solitudes. « Ainsi est mon histoire, mes sœurs. Mon destin s’y est joué, a tissé avec la complicité des jours mon étrange et complexe parcours jusqu’à me retrouver parmi VOUS… » disait Khemissa. Elle s’est détournée des siens, de son identité pour vivre autrement, librement, mais à quel prix, dans un Maroc aux traditions pesantes ? Comme Khemissa, les personnages de ce livre luttent pour exister, pour s’en sortir, pour aimer et contourner un sort parfois cruel et mortellement obstiné. Ils se vouent alors à l’espoir : une ultime religion qui les affranchirait de tout… Les chemins de la vie diffèrent de par leurs itinéraires. Cependant, ils n’altèrent en rien la volonté de ces personnages de vivre dignement dans une société de contradictions et de foisonnement d’injustices en tout genre.
Tranches de vie
– Diplômé de l’Université Paris 7, Denis Diderot (Doctorat Sémiotique du texte et de l’image – 1993, mention très honorable).
– Diplômé du Conservatoire National des Arts et Métiers de Paris (Diplôme d’Etudes Supérieures Spécialisées option Marketing, DESS – 1998).
– Professeur au Conservatoire National des Arts et Métiers à Paris depuis 1999. Enseignement DESS & Master, direction de plus de 250 recherches et études .
– Professeur à l’Institut Universitaire de Technologie, René Descartes, Paris V. Département marketing, techniques de communication et de commercialisation depuis 2002.
– Créateur du cabinet de conseil Orchidia Conseil, entreprise spécialisée en communication, marketing et formation.
– Fondateur du website Maroc en Mouvement pour la promotion et la consolidation de l’esprit Maroc, pays de tolérance, d’ouverture et de dynamisme. Portail d’informations totalisant 6000 connexions/jour.
– Auteur d’Ivresses des Nuits, recueil de poèmes, Editions Saint-Germain-des-Prés, Paris 1993 et de plusieurs articles de presse …