LE SCAN ÉCO – Le mastodonte américain est aussi décrié dans la rue et que convoité sur la planète finance. Monsanto est en passe d’être racheté par le géant allemand Bayer, alors que le secteur de l’agro-industrie est en pleine concentration.
Monsanto est en ce moment au cœur de plusieurs actualités. D’un côté, le mastodonte américain est convoité sur la planète finance: le géant allemand de l’agrobusiness Bayer voudrait l’avaler et propose plus de 66 milliards de dollars (58,85 milliards d’euros), alors que le secteur de l’agro-industrie est en pleine concentration. De l’autre, des mobilisations contre Monsanto et autres «multinationales de l’empoisonnement» se multiplient dans le monde, avec notamment la «marche mondiale contre Monsanto». La dernière s’est déroulée en mai dans environ 400 villes du monde, dont une trentaine en France. Le tout alors qu’en juin, l’Europe, pressurisée entre les intimidations lobbyistes (emmenées par Monsanto), les tensions politiques et les enjeux économiques colossaux, a finalement voté une prolongation de l’autorisation du glyphosate, mais de seulement 18 mois et sous contraintes. Cet herbicide présent notamment, dans leRoundup produit phare… de Monsanto.
»» LE SCAN ÉCO – Ce qu’il faut savoir sur le dossier sulfureux du glyphosate qui agite l’Europe
Cette concentration d’actualités sont l’occasion de faire le point sur Monsanto.
• Qui dirige Monsanto?
– Hugh Grant, né en Écosse
– 58 ans, dont 35 ans chez Monsanto
– Diplômé des universités de Glasgow et d’Édimbourg
– Il entre chez Monsanto en 1981 dans la branche agrocilture. Il devient manager en 1991 et gravit les échelons jusqu’à être nommé PDG en 2003. Il a été reconduit à son poste en 2012.
– Rémunération en 2015: 12 millions de dollars
• Monsanto, une société qui a 115 ans
Monsanto a été créé en 1901 par John Francis Queeny qui choisit le nom de famille de sa femme pour son entreprise. Entre 1901 et les années 1970, Monsanto est passé par la production de la saccharine, des l’aspirine, dedétergents, de savons, de plastiques, a participé à la recherche sur l’uranium dans le cadre du Project Manhattan, puis s’est lancé dans les herbicides et lesinsecticides… L’entreprise a été impliquée dans de multiples accidents industriels et scandales sanitaires, notamment concernant l’agent orange utilisé pendant la guerre du Vietnam.
C’est en 1960 que Monsanto créé sa division Agriculture, spécialisée dans les engrais. En 1975, le Roundup est mis sur le marché: il s’agit du premier herbicide à base de glyphosate. En 1982, Monsanto parvient à modifier génétiquement une cellule de plante et réalise ses premiers essais cinq ans plus tard. En 1996, Monsanto lance le Roundup Ready, des plantes transgéniques tolérantes… à son propre herbicide, le Roundup. En 1997, l’entreprise réalise plusieurs acquisitions majeures dans les semences. À la fin des années 1990, Monsanto est devenue une société de biotechnologie à part entière. En 2000, le groupe fusionne avec Pharmacia et devient sa filiale Agriculture, avant de s’en séparer en 2002 et de devenir la «Monsanto Company» telle qu’elle est connue aujourd’hui, spécialisée dans l’agro-industrie. Depuis, elle est devenu le leader mondial des semences, à coups de multiples rachats au cours des quinze dernières années.
• Monsanto, un mastodonte de l’agrochimie
Selon les dernières chiffres publiés dans son rapport annuel 2015, Monsanto c’est:
– 22.500 employés, dans 66 pays
– Un chiffre d’affaires de 15 milliards de dollars
– Un bénéfice net de 2,3 milliards de dollars
Voici la répartition du chiffre d’affaires de Monsanto, réparti par zones géographoques et par branches.
• Une capitalisation boursière de 46,8 milliards de dollars
Lorsque le groupe s’est introduit en Bourse le 31 décembre 2001, l’action valait 13,53 dollars. Le titre a atteint son plus haut niveau en juin 2008, à 126,44 dollars. Aujourd’hui, il vaut plus de 106 dollars, portant la capitalisation boursière de Monsanto Company à plus de 46,8 milliards de dollars. Ces derniers temps, le groupe a investit massivement dans le nouvel eldorado du Big Data: Monsanto vise le traitement des données, notamment les systèmes de prévisions météorologiques. Objectif: s’adapter aux changements climatiques, qui peuvent avoir des effets sur les maladies et les insectes. Et explorer les marchés encore peu exploités dans le monde, notamment l’Afrique ou l’Amérique du Sud. L’entreprise s’est également lancée dans les pesticides bio, pour s’adapter aux évolutions de l’opinion publique et des pratiques des agriculteurs.
• Un géant convoité
Le secteur de l’agrobusiness, déprimé par la chute des cours des matières premières, est en pleine concentration.
Monsanto, dont le chiffre d’affaires et le bénéfice net ont été en repli en 2015 (ce qui n’était pas arrivé depuis 2010) est au cœur des mouvements et rumeurs actuelles de rachat et autres fusions. Dernière offre en date,celle (non sollicitée) du géant chimique et pharmaceutique allemand Bayer. Il s’agirait pourBayer (qui pèse 80 milliards d’euros) de la plus grosse acquisition de son histoire. Un autre allemand, BASF, serait également sur le coup pour avaler Monsanto.
Récemment le chinois ChemChina a proposé 43 milliards de dollars pour s’emparer du suisse Syngenta (numéro un mondial), que Monsanto convoitait l’an dernier. Les régulateurs de la concurrence sont en train de travailler sur l’opération. Par ailleurs, deux autres gros du secteur, les américains DuPont et Dow Chemicalsont en train de fusionner.
En octobre prochain, un tribunal international baptisé «Tribunal Monsanto», fondé par un collectif de juristes, d’avocats et d’ONG à La Haye aux Pays-Bas, jugera la multinationale pour «écocide», autrement dit pour «destruction de l’environnement». Ce tribunal, emmené notamment par Corinne Lepage, ancienne ministre de l’Environnement sous le gouverment d’Alain Juppé, et Marie-Monique Robin, journaliste et réalisatrice du documentaire «Le Monde selon Monsanto», n’aura toutefois pas de reconnaissance institutionnelle.
avec lefigaro