Plus de 10- 000 participants originaires de 90 pays, participent aux Gay Games à Paris qui s’achèveront le dimanche 12 août. C’est un rendez-vous sportif militant destiné à lutter contre les stéréotypes et discriminations et la haine envers les personnes LGBT+. Dans certains pays, l’homosexualité est illégale ou réprimée. C’est le cas de la Sierra Leone. Témoignages de deux footballeurs demandeurs d’asile.
Un peu perdus dans le centre d’accréditation pour les athlètes, John et Steve (les prenons ont été modifiés) sont là pour récupérer leur badge. Tous deux, qui participeront au tournoi de football, ont fui la Sierra Leone en passant par la Guinée. La raison : leur homosexualité. Dans leur pays natal, leur orientation sexuelle est passible de peine de prison.
Vivre librement sa sexualité
Cela fait un peu plus d’un an que John vit à Clermont-Ferrand. « Je suis passé par Conakry en Guinée pour rejoindre l’Europe. J’ai fui mon pays parce que je ne pouvais pas vivre librement avec mon homosexualité. Des gens ont tenté de me mettre en danger juste pour le plaisir de dénoncer, car ils n’aiment les gays », raconte-t-il. Dans le Massif central, il est, la plupart du temps, dans la rue et trouve parfois refuge dans un foyer pour y passer la nuit. Surtout, il dit avoir déjà reçu un arrêté d’expulsion, mais aurait réussi à obtenir un délai de 6 mois grâce à son avocat. Ce jeune homme d’environ 25 ans qui est pourtant dans une situation très précaire se sent « libre » en Europe. « Je suis heureux d’être là avec la communauté gay et entouré de gens qui ne me jugent pas et me comprennent », avoue-t-il.
« Affirmer une certaine identité sexuelle en Afrique, c’est très difficile, commente un volontaire d’environ 65 ans, né en Côte d’Ivoire. Le combat reste entier dans beaucoup de pays du continent. Pour l’Afrique, un homme doit fonder une famille avec une femme. C’est le modèle social. C’était peut-être vrai il y a cinq siècles. Mais les choses évoluent ». Cet ancien professeur de lycée estime qu’il faut « décomplexer les regards en Afrique ». « Aujourd’hui, les jeunes Africains doivent s’affirmer plus. Il y a des pays où il y a une certaine forme de liberté, mais il faut rester discret. Cela doit changer », dit-il.
L’exception sud-africaine
Selon cet homme marié et père de famille, le milieu associatif doit mener la bataille et non les dirigeants qui d’une certaine manière n’en ont pas « le courage ». « Il faut que les ONG aillent sensibiliser les gens dans les campagnes. Ils l’ont fait avec les maladies sexuellement transmissibles comme le SIDA. Je sais que maintenant en Côte d’Ivoire, les mamans disent à leurs filles de se protéger ! Les associations ont pour avantage d’être au plus près de la population », argumente-t-il. Il ajoute en passant à propos de son implication : « C’est naturel, je me rapproche toujours des plus faibles. Je n’ai pas eu à hésiter. Et mes enfants sont fiers de moi. »
« Moi aussi j’ai fui la Sierra Leone explique de son côté Steve. Pour une question de moralité, ma famille ne supportait pas mon orientation sexuelle. Je ne voulais pas finir en prison, car je militais pour le droit de la communauté LGBT+. J’ai fini par être recherché par la police et des amis mon permis d’atteindre la Guinée en voiture. Quand je suis arrivé à Paris, j’ai vécu dans la rue et j’y suis toujours. Mais ici je suis libre dans ma tête. »
Sur tout le continent africain, une trentaine de pays interdisent l’homosexualité. L’Afrique du Sud fait figure de précurseur : le mariage gay est légalisé depuis 2006 et le pays de Nelson Mandela reconnaît aussi l’adoption aux personnes de même sexe. Les Pays-Bas ont été, en avril 2001, la toute première nation au monde à légaliser le mariage homosexuel.
En France, en 2016, quatre à cinq mille lesbiennes, gays, bisexuels, transexuels ont déposé une demande d’asile.
Avec RFI