De ce qui a semble-t-il fuité, la conversation dure à peine un peu plus de 8 minutes. Pendant ce temps, Yankuba Colley, le mobilisateur national de l’Alliance patriotique pour la réorientation et la construction (APRC), Fabakary Tombong Jatta, ancien président de la majorité parlementaire à l’Assemblée, discutent sur la plateforme Whatsapp avec… Yahya Jammeh !
Arbitre des luttes internes à l’APRC
Dans un mélange d’anglais et de langue diola, le sujet de ce «bavardage virtuel», les dissensions au sein de l’ancien parti au pouvoir, en crise de légitimité et bouté du Parlement. Dans l’enregistrement, la voix qui semble être celle de Yahya Jammeh arbitre les luttes intestines de succession à la tête du parti depuis l’exil forcé de leur mentor en Guinée Equatoriale.
Ces derniers mois, l’actualité de l’APRC a été rythmée par la transhumance vers le nouveau parti au pouvoir, si ce n’est une lutte fratricide pour la direction qui a opposé Fabakary Tombong Jatta, le président intérimaire du parti, et Ma Bah, son adjoint. Chacun des deux hommes réclamait en fait la direction à lui, promise au téléphone par Yahya Jammeh. Première victime collatérale : Momodou Bou Jarju qui est mentionné dans la conversation audio a lui été exclu du parti. Une décision applaudie par Jammeh.
Pour autant, c’est la deuxième partie du fichier fuité qui a déclenché la psychose dans les réseaux sociaux gambiens. Sur ses projets de retour en Gambie, l’homme au boubou blanc lâche cette phrase qui alimente la controverse. « Si Allah le veut, tout ira bien. Je travaille sur quelque chose », lance Jammeh, volontairement vague. « Lorsque je vais revenir en Gambie, aucun esprit ni aucun être humain ne pourra s’y opposer», complète l’ancien locataire de la State House de Banjul.
Jammeh songe à retourner en Gambie
Depuis la Guinée Equatoriale, Yahya Jammeh a-t-il seulement abandonné son projet de revenir en Gambie et même d’exercer à nouveau le pouvoir ? «I’ll be back, I’ll be back » («Je reviendrai, je reviendrai»), avait lancé Yahya Jammeh le 21 janvier 2017, au pied du Flacon 900 DX qui l’exfiltre vers la Guinée équatoriale.
Depuis cette fanfaronnade théâtrale, l’ancien président ronge son frein dans des activités agricoles au pays de Teodoro Obiang Nguema Mbasogo. L’hypothèse d’un retour -secret ?- de l’ancien homme fort n’est si insolite. Comme indice, il y a eu cette fuite d’informations sensibles livrées à Jammeh par sept officiers de l’armée gambienne, restés loyaux à l’enfant de Kanilai. Cela avait fait planer le spectre d’une infiltration de l’armée pour préparer le retour de leur ancien chef.
D’un autre côté, même si le pacte passé avec la CEDEAO quelques heures avant son départ stipulait que l’homme au boubou blanc devait se laver les mains des affaires internes gambiennes, l’affaire de son possible retour en Gambie n’avait pas été clairement tranchée. Les autorités gambiennes disposent du droit de ne pas laisser un avion transportant un passager nommé Jammeh atterrir sur leur sol. Mais ce sont peut-être les termes de ce document qualifié de communiqué final par la CEDEAO qu’il faut éclaircir. Sinon, le risque est grand de voir Jammeh troquer son boubou pour un treillis.
Avec latribuneafrique