L‘élection présidentielle aura lieu le 7 octobre au Cameroun, selon un décret du président Paul Biya publié lundi au moment où la tension reste vive en zone anglophone, en particulier dans la ville de Buea, capitale de la région du Sud-Ouest.
Lors de la lecture du décret à la télévision publique, les habitants de Buea étaient encore cloitrés chez eux par peur de sortir après de nombreux échanges de tirs dans la matinée entre des soldats et des hommes armés non identifiés.
Ces derniers, présentés à l’AFP par des habitants comme des séparatistes, ont fait irruption dans la capitale du Sud-Ouest lundi matin.
C’est la première fois que des échanges de tirs ont lieu dans des quartiers de cette ville de plus de 100.000 habitants, quadrillée par un grand nombre de militaires depuis le début de la crise anglophone, fin 2016.
Le président Paul Biya, 85 ans dont bientôt 36 au pouvoir, n’a pas annoncé s’il serait candidat à une septième réélection, mais il est présenté par son parti comme son candidat “naturel”. Pour de nombreux observateurs camerounais, le chef de l’Etat entretient “un faux suspense”.
“Paul Biya est notre candidat à la prochaine élection présidentielle, au regard de son bilan éloquent, de sa crédibilité nationale et internationale, diplomatique, économique, sociale et culturelle”, avaient ainsi écrit en mai des responsables du parti au pouvoir et des chefs traditionnels originaires du Sud, région d’origine du chef de l’Etat.
Le même mois, l’ambassadeur des Etats-Unis au Cameroun, Peter Henry Barlerin, avait déclaré, à l’issue d’un entretien avec le président, que Paul Biya “devrait réfléchir à son héritage et à comment il veut que l’on se souvienne de lui dans les livres d’histoire”, suscitant de vives critiques dans le camp présidentiel.
Pour leur part, les opposants qualifient le bilan de l’actuel chef de l’Etat de “chaotique”.
Parmi eux, Joshua Osih, qui a été investi en février candidat du principal parti d’opposition, le Social Democratic Front (SDF, anglophone).
Cet homme d’affaires de 49 ans tentera de briguer la présidence camerounaise, comme l’avait fait lors de la plupart des scrutins précédents Ni John Fru Ndi, leader du SDF et opposant historique à Biya qui a cette fois décidé de céder la place aux “jeunes cadets” du parti.
Contexte délicat
Parmi les autres candidats de poids de l’opposition, selon les analystes, figurent l’avocat et ancien vice-président de Transparency International, Akere Muna, ainsi que le président du parti Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC), Maurice Kamto.
En l’absence de sondages d’opinion, il est toutefois difficile d’estimer le poids réel de chacune de ces personnalités politiques.
Le 7 octobre, chacun, par ce scrutin au suffrage universel à un tour, tentera de briguer le palais d’Etoudi à Yaoundé pour les sept prochaines années.
Le scrutin se déroulera dans un contexte délicat.
Le groupe jihadiste Boko Haram sévit toujours dans la région de l’extrême-nord du pays et les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest sont confrontées à une grave crise socio-politique depuis fin 2016.
Celle-ci s’est muée en conflit armé fin 2017. Aujourd’hui, les combats sont devenus quasi quotidiens entre les forces de sécurité camerounaises et des hommes armés se réclamant de “forces de restauration” d’un Etat anglophone qui avait brièvement vu le jour entre les deux guerres mondiales, sous mandat britannique.
Selon le gouvernement, plus de 80 membres des forces de sécurité ont été tués dans ces combats. Aucun bilan du côté séparatiste n’est disponible.
Quelque 160.000 personnes ont dû fuir leur logement à la suite des violences, selon l’ONU, et 34.000 se sont réfugiées au Nigeria, selon l’Agence nigériane de gestion des urgences (Sema).
Avec AFP