Monsieur le Président de la République,
Me souvenant de votre engagement dans les luttes estudiantines quand nous étions étudiants à l’université Cheikh Anta Diop et de notre cheminement commun dans le parti démocratique sénégalais (PDS), je ne peux comprendre le manque d’empathie dont vous semblez faire montre, vous et votre gouvernement, relativement à la souffrance des femmes de tout le pays, en général, et de Dakar, en particulier. Je voyais en vous un homme soutenant des causes justes, intervenant au-delà de la limite de vos moyens pour assister des personnes dans le besoin et combattant tout ce qui pouvait être perçu comme une injustice, quelle qu’en fût la direction.
Depuis plusieurs années, ces braves dames sur les épaules de qui repose, en grande partie, la gestion domestique ont de la misère à assurer l’approvisionnement en eau de leur foyer. Si certaines veillent jusque tard dans la nuit pour avoir le liquide précieux, d’autres se lèvent très tôt pour se le procurer, souvent dans des quantités si négligeables que l’entretien de la maison s’en trouve compromis. C’est une situation déplorable et il faut voir ces braves dames, armées de leurs récipients et de leur courage, faire la file devant de rares camions-citernes stationnés dans les ruelles de certains quartiers pour mesurer le drame.
Évidemment, ce spectacle, on ne peut le voir si on vit dans les quartiers huppés de Dakar, comme ceux dans lesquels vivent ceux qui ont la charge la gestion du bien-être de nos compatriotes dans les domaines qui leur sont confiés. Qui l’eût cru? Vivre à Dakar sans eau pendant plusieurs mois, voire plusieurs années! Et on parle d’émergence! Si l’émergence renvoie à la sortie d’un liquide, quand l’atteindrons-nous si nous n’avons pas ce liquide?
Le développement commence par l’allègement des charges des femmes pour leur permettre de se consacrer à des tâches comme faire leur part dans l’éducation des enfants, jouer leur partition dans ce développement en accédant, pour certaines, aux instances de prise de décisions …Par les temps qui courent, s’il est un autre fait touchant particulièrement les femmes, c’est bien le manque de sang dans les hôpitaux. La presse fait état de deux décès provoqués par cette situation, décès de deux femmes dans deux hôpitaux.
Vous avez bien fait, M. le Président de la République, d’inviter vos compatriotes à aller donner de leur sang. Cependant, vous auriez pu, pour un écho plus large à votre appel, offrir un exemple en allant, avec les membres de votre cabinet et de votre gouvernement, réaliser ce que vous attendez de nous. Et je suggérerai même que cela se fasse plus régulièrement au lieu d’attendre une situation d’urgence ou de pénurie pour demander à vos concitoyens et à vos concitoyennes de donner du sang.
Monsieur le Président de la République, ce ne sont pas seulement les femmes qui souffrent des situations décrites ci-dessus. Mais, elles en sont les plus touchées. C’est donc la femme que je suis qui vous interpelle, par solidarité à toutes les femmes du Sénégal, pour vous demander d’intervenir davantage pour une fourniture plus régulière en eau dans nos villes et villages. Ce sera alors le début de l’émergence!
Mbenda Ndiaye Spécialiste en genre et en administration des services publics Kaolack