«L’AFRIQUE DÉTIENT 60% DES TERRES ARABLES DE LA PLANÈTE ET LES RECHARGES NATURELLES DES NAPPES PHRÉATIQUES Y SONT DEUX FOIS PLUS IMPORTANTES QU’AILLEURS, AVEC UN TAUX D’ENSOLEILLEMENT D’ENVIRON 8 HEURES PAR JOUR», EXPLIQUE L’ENTREPRENEUR NIGÉRIEN ABDOU MAMAN KANÉ LORSQU’IL REVIENT SUR CE QUI L’A POUSSÉ À DÉVELOPPER UNE SOLUTION DE TÉLÉ-IRRIGATION POUR OPTIMISER L’UTILISATION DE L’EAU.
Optimiser la production et son rendement
Au Niger, les agriculteurs sont contraints d’irriguer leurs champs manuellement. Une tâche qui peut prendre jusqu’aux deux tiers de leurs temps. À cela s’ajoute le gaspillage, estimé à 50 voire 60% de l’eau collectée et lié, en grande partie, au manque d’infrastructures et aux transports désuets de l’eau par sceaux et tuyaux. Les pompes à fuel, utilisées pour faire remonter l’eau des nappes phréatiques et irriguer les champs, sont source de pollution et représentent un coût important pour les agriculteurs. Elles doivent être démarrées manuellement, alors qu’elles peuvent se trouver à plus de 70 mètres de profondeur et représenter un danger de mort, car les nappes phréatiques dégagent un gaz susceptibles d’asphyxier les agriculteurs.
Pour pallier ces difficultés, le système de Tech-Innov s’appuie sur un boîtier, équipé d’une puce GSM, connecté au système d’irrigation et placé entre la pompe et le panneau solaire. L’agriculteur peut l’activer en composant un code depuis son téléphone, et ainsi collecter et diffuser en temps réel des données météorologiques et hydrologiques. Dans 5% des cas, les agriculteurs ont recours à l’énergie éolienne, le système d’irrigation variant en fonction des besoins des plantes.
Avec un gisement d’eau de 15 milliards de mètres cube au Niger, chaque habitant peut bénéficier de plus de 10 000 m2 d’eau par an. Mais cette denrée se raréfie, et la question de l’utilisation de l’eau dans les prochaines années est essentielle, face à une population qui ne cesse de croître. Abdou Maman Kané le rappelle, «nous serons presque 2 milliards en 2025 et 4 milliards en 2050 sur le continent. Plus de 60% de la population aura bientôt moins de 25 ans, alors comment en faire des agents économiques ?» Pour se faire, Abdou Maman Kané mise sur «le bon extraordinaire des nouvelles technologiques solaires en Afrique et sur l’augmentation constante du taux de pénétration de la téléphonie mobile». Il constate un décalage entre ces énormes atouts et une agriculture peu modernisée, par rapport à l’industrie et aux services ; «Il faut arriver à pourvoir une sécurité alimentaire pour nourrir une population qui évolue en crescendo. C’est inadmissible que l’on ne puisse pas utiliser la technologie pour optimiser les services essentiels».
Lutter contre l’exode rurale et développer l’économie régionale
L’autre problématique à laquelle Abdou Maman Kané compte bien s’attaquer est l’exode rurale. «Pourquoi ne pas favoriser le cadre de vie local pour éviter cela ? Il faut digitaliser la chaîne de production agricole, et cela doit passer par la maîtrise de l’eau, l’automatisation de l’irrigation et l’augmentation des moyens de production. Il faut aller vers ces innovations capables de changer le monde, en passant par le capital humain, c’est à dire notre jeunesse». Car les plus jeunes ne cessent de rejoindre les grandes agglomérations, faute d’avenir prometteur dans la région. La condition des femmes se place aussi au cœur de son projet, car les corvées d’eau s’en trouvent allégées. D’autant plus qu’il existe d’autres dérivés du système, comme notamment les kiosques d’eau potables, où l’eau est traitée par ultraviolet.
Avec latribuneafrique