1. Le chemin des tourments (1921-41)
Cette trilogie est particulièrement d’actualité puisque 2017 a été le centenaire de la Révolution bolchévique, et cette œuvre est idéale pour bien comprendre cet épisode de l’histoire. En Russie elle a d’ailleurs été adaptée à l’écran à de multiples reprises.
Les trois volumes, Les sœurs, L’année 1918 et Le matin maussade, ont été rédigés dans un style que l’auteur qualifiait lui-même de « réalisme monumental ». L’intrigue débute au milieu du chaos et des ruines de Saint-Pétersbourg en 1914, et s’achève sur l’écrasante victoire des Rouges sur les Blancs dans la guerre civile. Y est dépeint le destin de l’intelligentsia russe durant cette période troublée et, comme dans toute œuvre classique, Tolstoï y met en scène le véritable amour.
Alors que le premier tome est sorti au début des années 20 et présente une narration calme et impartiale, le dernier, terminé en 1941, est marqué par une propagande et une prétention manifestes. En fait, pour cette trilogie Tolstoï a même été récompensé du Prix Staline.
2. Le Conte Cagliostro (1921)
Nous n’aurions probablement pas inclus cette œuvre dans la liste des incontournables de Tolstoï s’il n’y avait pas eu le légendaire film soviétique s’en inspirant et ayant eu un succès dépassant celui du livre initial. En utilisant des sources documentaires, Tolstoï a créé sa propre version des aventures du conte italien en Russie. Ce magicien charlatan se retrouve ainsi à l’origine d’un scandale dans une petite ville de province et lorsque son imposture est révélée au grand jour, il se voit dans l’obligation de fuir.
Alors que cette histoire peut paraître étrange, elle s’inscrit en réalité dans un contexte bien précis. À la fin du XIXe siècle, la superstitieuse noblesse russe a en effet manifesté un vif intérêt pour toutes sortes de rituels magiques, pour l’occultisme et pour les guérisseurs mystiques. Cet engouement a principalement pris sa source dans la cour de l’impératrice Alexandra, épouse de Nicolas II, qui vouait une adoration sans bornes pour le mysticisme, et conviait régulièrement des personnages énigmatiques tels que le Français Nizier Anthelme Philippe ou le fameux Grigori Raspoutine.
3. Aelita (1923) ou L’Hyperboloïde de l’ingénieur Garine (1927)
La science-fiction est l’un des genres présents parmi les écrits d’Alexeï Tolstoï, et celui-ci en a même été l’un des pionniers. La nouvelle Aelita (Le coucher de Mars) a tout d’abord été destinée aux adultes, mais Tolstoï l’a ultérieurement transformée en histoire pour la jeunesse. Il y est question d’un ingénieur, Mstislav Los, qui conçoit un vaisseau interplanétaire et l’envoie en direction de la planète rouge en compagnie d’un ancien soldat de l’Armée rouge. Sur Mars, ils constatent l’existence des mêmes problèmes politiques et sociétaux que sur Terre : un dictateur oppresse le peuple, mais un brave prolétaire s’élève à la tête d’un groupe de révolutionnaires. Afin de traiter avec précision des détails techniques, Tolstoï s’est appuyé sur les recherches spatiales de Constantin Tsiolkovski.
Pour son autre roman de science-fiction, L’Hyperboloïde de l’ingénieur Garine, c’est au scientifique Piotr Lazarev qu’il a demandé conseil au sujet de la physique moléculaire. Un ingénieur y met au point un appareil semblable à un laser, à l’aide duquel il détruit une île du Pacifique et commence à extraire de l’or depuis les entrailles de la Terre. Il devient alors un dictateur, jusqu’à ce que de courageux révolutionnaires soviétiques ne viennent l’arrêter.
4. Pierre Ier (1930-34)
Cet épais ouvrage, redouté des écoliers car il a longtemps été une lecture obligatoire des vacances d’été, présente les premières années du plus célèbre des empereurs russes, Pierre le Grand. Bien que nouvelle historique, ce livre est clairement un enfant de son époque, cédant à la propagande. Les historiens avancent même qu’il a été rédigé sous l’ordre direct de Staline afin de renforcer son culte de la personnalité.
En effet, tout comme Eisenstein dans son film Ivan le Terrible, Tolstoï fait ici le parallèle entre Staline et l’un des plus illustres personnages de l’histoire du pays. Cette œuvre a néanmoins quelques exactitudes historiques et a recours à de riches détails pour dépeindre les scènes en différents lieux : églises, izbas ou encore palais.
5. La Petite Clé d’or ou Les Aventures de Bouratino (1936)
Alexeï Tolstoï a rédigé d’innombrables nouvelles et contes de fées pour enfants, mais Bouratino, le petit garçon de bois, est certainement sa création la plus célèbre. Cela vous dit quelque chose ? Bien sûr ! Il s’est pour cela directement inspiré des Aventures de Pinocchio de Carlo Collodi.
Alors qu’il éditait la traduction russe de ce conte italien, Tolstoï y a effectué de considérables modifications dans le but d’apporter au livre une âme russe et de le rendre plus compréhensible pour les enfants soviétiques. Le père du petit garçon de bois, Geppetto, a ainsi été remplacé par Papa Carlo. Tolstoï a finalement décidé de rédiger sa propre version, celle de
Collodi n’étant, à ses yeux, pas assez progressiste pour la nation soviétique. Cette variante s’éloigne donc un peu de l’œuvre originale au niveau de l’intrigue et des personnages. Par exemple, le nez de Bouratino ne grandit pas quand il ment. En fait, il ne ment pas beaucoup puisqu’il serait un mauvais exemple pour la jeunesse soviétique.
Ce récit a lui aussi été adapté en film d’animation et est devenu l’un des contes les plus populaires auprès des enfants de Russie.
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