Athenry, Irlande. C’est dans cette petite ville de l’ouest du pays qu’Apple avait annoncé en 2015 vouloir construire son premier data center européen. Devant le nombre croissant de poursuites judiciaires, l’entreprise à la pomme a fini par renoncer.
POURQUOI CE PROJET ?
Les plus : l’implantation du data center aurait représenté un investissement de 850 millions d’euros, la création de 300 emplois pour sa construction, puis de 150 autres pour le maintien du centre.
Les moins : l’or noir du XXIe siècle, comme certains aiment à appeler les données, demande d’énormes dépenses énergétiques et pollue. Des habitants ont donc déposé des recours en justice pour qu’Apple prennent les mesures nécessaires à la préservation de l’environnement, ralentissant le début des travaux.
POURQUOI C’EST IMPORTANT :
Parce que les data centers deviennent des enjeux stratégiques, tant d’un point de vue business qu’environnemental. Et que la transition numérique à un impact souvent mésestimé sur l’environnement.
NUMÉRIQUE = GOUFFRE ÉNERGÉTIQUE
Les opposants au projet d’Apple avançaient que son data center consommerait jusqu’à 6% de la production annuelle d’électricité de l’Irlande. Ça vous paraît énorme ? Pourtant, la gestion de nos données demande toujours plus de carburant, la preuve par 3 :
*Les usages : le streaming vidéo gagne le gros lot. Il représentait déjà 63% du trafic en 2015 et devrait atteindre les 80% d’ici 2020. Pour vous faire une idée, Netflix, c’est un tiers du trafic Internet en Amérique du Nord.
*Les données : leur trafic a été multiplié par 4,5 entre 2011 et 2016, selon l’Arcep.
*L’énergie : 7% de la consommation énergétique mondiale en 2017 était due à l’échange de données, selon Greenpeace.
Il faut donc des data centers efficaces pour organiser, traiter, stocker et entreposer de grandes quantités de données.
LES DATA CENTERS SONT DONC EN MUTATION
Petit zoom sur les centres à travers lesquels nos données circulent :
*Un data center de 10 000 m2, consomme autant qu’une ville de 50 000 habitants en électricité.
*40 à 50% de leur consommation d’énergie est dédiée au système de refroidissement.
*Sous la pression, notamment, du nombre croissant d’offres cloud, leur nombre augmente sans cesse : on en trouve 4309, dans 121 pays, et ceux du type hyperscale (les plus massifs, utilisés par les géants du web) sont au nombre de 390, contre 90 en 2016.
Du coup, deux enjeux émergent :
1/ L’emplacement des centres est stratégique :
Leur environnement doit être froid pour assurer la climatisation, élément crucial au maintien du matériel. Logiquement, le plus grand centre de données au monde, d’une taille équivalente à 85 terrains de foot, est actuellement construit en Arctique.
2/ L’énergie doit être propre :
L’alimentation en électricité de ce data center va être fournie par de l’hydroélectrique et de l’éolien. Les data centers doivent réduire leur empreinte écologique, et le marché semble avoir intégré la tendance :
TECH + ÉCOLOGIE, ÉQUATION IMPOSSIBLE ?
Si elle vient donc d’abandonner son projet de data center à Athenry, Apple n’est pas démunie pour autant :
*Non seulement un autre projet de data center aété terminé au Danemark,
*Mais l’entreprise est aussi considérée comme bon élève du renouvelable par Greenpeace : elle aurait atteint les 100% de fonctionnement aux énergies propres.
Google, Facebook sont les deux autres bons élèves en matière d’énergies vertes. Un signal fort quant on connait les pouvoirs de lobbying de ces entreprises.
Seulement, la consommation électrique est loin d’être la seule pollution provoquée par nos usages numériques. Les composants de nos smartphones et de nos ordinateurs participent aussi au mouvement. Et la course à l’utilisation de métaux rares pourrait l’aggraver.
Finalement, Apple a davantage renoncé à ce data center par lassitude devant les poursuites judiciaires que pour des raisons de protection environnementale. Mais quand on sait qu’Internet représente déjà le 6ème pays le plus pollueur au monde, la question de la dépense énergétique méritait d’être posée.
Avec bfm