À l’occasion des Jeux Olympiques, Juliette Hirtz, Tristan Lebleu et Roman Navalpotro, salariés de NUMA, un incubateur de start-up, vous font découvrir le paysage entrepreneurial de Rio de Janeiro. NUMA soutient les entrepreneurs à travers des programmes d’accélération, des projets d’open innovation pour grands groupes, des événements et espaces de coworking gratuits, à Paris et à travers le monde.
Dans notre rencontre de l’écosystème entrepreneurial carioca, et plus largement brésilien, un sujet a particulièrement attiré notre attention: la place des femmes. Nous avons rencontré de nombreuses femmes entrepreneurs, et découvert des initiatives pour les mettre en avant. En voici quelques unes. «Les femmes représentent la moitié de la population mondiale. Pourtant, elles ne font absolument pas partie de la révolution numérique en cours», désespère Monique Correa, fondatrice de la startup Pet Roomie, un service de garde d’animaux domestiques, et responsable de Girls in Tech au Brésil.
Certes, le problème du manque de femmes dans l’entrepreneuriat, et plus encore dans le numérique, est mondial. Mais dans un pays profondément machiste, et une société patriarcale telle que celle du Brésil, le défi est bien plus important. «La pression sociale est très forte. On m’a souvent dit que je ne réussirai jamais», confie Victoria Scholte, fondatrice de Me Passa Ai, plateforme éducative en ligne. Dans une étude de l’Institut Avon de 2014, 89% des hommes considéraient inacceptable qu’une femme ne s’occupe pas des tâches domestiques. Le dernier rapport du World Economic Forum classe le Brésil 85ème sur 145 pays en terme de parité homme-femme. Dans ce contexte, fonder une start-up est loin d’être évident.
Néanmoins, les initiatives abondent pour réduire cette inégalité. Monique Correa a la trentaine et déjà un beau palmarès. En 2015, elle est très inspirée par la conférence TEDx sur les femmes et la technologie d’Estelle Rinaudo, Managing Director de Girls in Tech à Sao Paulo. Elle décide alors de créer la branche carioca de cette association, qui souhaite mettre en valeur les femmes dans le domaine des nouvelles technologies, en parallèle de la start-up qu’elle a monté, Pet Roomie. Elle organise son premier événement en août 2015 et, depuis, une trentaine de personnes se réunissent chaque mois pour pitcher leurs start-up et se rencontrer. «Le pitch est réservée aux femmes, mais les événements sont ouverts aux hommes également.» Si elle se bat pour cette cause, c’est que «la technologie représente une opportunité énorme pour les femmes».
L’obstacle du financement
Fonder une start-up est une chose. La financer en est une autre. «La première fois que je suis entrée dans une pièce remplie d’investisseurs, il y avait uniquement des hommes», se souvient Camila Farani. Cette jeune femme de 32 ans décide alors de créer MIA – Mulheres Investidoras Anjo, un groupe de business angels dédié aux femmes. Elle est convaincue que «dans un écosystème, la présence d’investisseuses encourage les femmes à entreprendre». En parallèle, Camila est aussi Présidente de Gavea Angels, un groupe de business angels cariocas, «la première femme depuis la création du groupe, il y a 12 ans», dit-elle avec une fierté évidente.
MIA n’est pas la seule union de femmes à s’être créée. Les réseaux se sont multipliés ces dernières années: PWN (Professional Woman ‘s Network), Para Mulheres Na Ciencia (Pour les femmes scientifiques), Network of Executive Women (Réseau de femmes d’affaires) et Portal Mulher Executiva (Portail des femmes d’affaires) en sont quelques exemples.
«Les femmes sont passées d’un entrepreneuriat de nécessité à un entrepreneuriat d’opportunité», analyse Camila Farani. En 2014, Juliana Brêtas a créé Superela, une plateforme en ligne «pour l’empowerment des femmes». On y trouve des articles écrits par un groupe de 200 chroniqueurs, un annuaire de professionnels, et une communauté (le Superela Clube). «Notre objectif est de redonner du pouvoir aux femmes, de leur redonner confiance en elles, et de les valoriser», explique Juliana. Sa communauté compte désormais plus de 100.000 personnes. Les Brésiliennes ont donc parfaitement compris qu’être une femme peut aussi être source d’opportunité ; le marché «féminin» est énorme dans ce pays qui en compte plus de 100 millions. «L’entrepreneuriat est plus compliqué pour nous mais le fait d’être une femme nous rend aussi plus unique», confie Victoria Scholte. Au pays de Gisele Bündchen, les chiffres de l’entrepreneuriat féminin au Brésil sont encourageants: en 2014, le nombre de femmes entrepreneurs a bondi de 49%. Un signe de changement?
avec lefigaro