L’approche de la question des réfugiés syriens est des plus sensibles et des plus délicates de par sa nature et son aspect primaire de question humanitaire dont l’objet est la souffrance de populations obligées de quitter leurs foyers pour échapper aux affres de la guerre, comme dans toutes les guerres et comme beaucoup de peuples, dont le peuple libanais. Certaines populations sont devenues des déplacés dans leur propre pays et certaines, ne trouvant pas refuge dans leur pays, ont été contraintes à l’émigration. Les déplacements forcés des peuples de la terre sont ce que vit actuellement une partie du peuple syrien tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de leur patrie.
Cependant, l’aspect humanitaire évoqué par le déplacement massif du peuple syrien durant les sept années de conflit a lentement cédé la place à l’aspect politique lié, d’une manière ou d’une autre, aux objectifs premiers de ceux qui ont mené la guerre mondiale contre la Syrie. Nous constatons avec consternation que ceux qui prétendent se soucier des déplacés et des réfugiés, au lieu de veiller à apaiser le conflit et faire revenir ces réfugiés chez eux, ne font qu’attiser le feu.
En effet, après la faillite de ses projets en Syrie, l’occident, qui verse des larmes de crocodile sur le sort des réfugiés et leur sécurité, s’appuie sur la stratégie du prolongement du conflit et empêche le retour des réfugiés de toutes les manières, malgré le fait que 85% des territoires libérés par l’Armée Arabe Syrienne soient sécurisés et les zones contrôlées et stabilisées par l’Etat syrien soient aptes à accueillir quatre millions de réfugiés. Le gouvernement syrien a fait valoir ses capacités sécuritaires et logistiques à loger et prendre en charge ces réfugiés comme il l’avait fait avec succès pour quatre millions de déplacés de l’intérieur à qui il avait fourni abri et opportunités de travail.
Ce comportement occidental contraire à toute logique, se basant sur le principe de déplacement et installation en dehors de la Syrie, nous place devant la vérité dissimulée derrière le masque de l’humanitaire. La vérité est que le déplacement forcé en lui-même est, depuis le début, un élément du plan d’agression. Sinon, comment expliquer les tentes plantées par la Turquie dans des camps pouvant accueillir des milliers de réfugiés alors que pas un seul coup de feu n’avait été tiré sur ses frontières ? Comment expliquer l’empressement des Nations-Unies d’établir un régime spécial pour les réfugiés syriens suggérant que ce déplacement serait de très longue durée ? Selon les déclarations de certains responsables de cette organisation, il était même prévu que « la majorité des populations déplacées ne reviendra pas en Syrie et sera implantée ailleurs ».
Quant à l’Europe qui accorde une attention particulière à la question, on pourrait supposer qu’elle veille à installer les réfugiés sur les lieux mêmes où ils se trouvent en Turquie, au Liban et en Jordanie, de peur de leur afflux sur le continent européen qui pourrait compromettre sa sécurité et sa stabilité. Cette argumentation ou simplification de la question est une justification, certes méritoire dans certains aspects, mais non convaincante. En quoi un réfugié syrien qui rentre chez lui et reprend une vie normale, comme ce fut le cas des Syriens de Beit Jinn qui avaient volontairement et dignement choisi de revenir dans leurs foyers, pourrait nuire à l’Europe ?
Nous ne voyons dans ce comportement occidental irrationnel qu’une tendance à la poursuite de l’agression et un refus d’admettre l’échec de ses projets menés en terre syrienne. L’occident considère les réfugiés comme une arme utilisée contre la Syrie en premier lieu et contre la Région plus généralement, pour la réalisation d’objectifs sous le couvert de l’aspect humanitaire de la question. Les plus importants de ces objectifs sont :
- Empêcher la Syrie d’investir sur ses victoires sur le terrain : le contrôle de plus de 85% des zones peuplées, le retour à la vie normale, la reprise de l’activité quotidienne … sont la preuve matérielle de la défaite des agresseurs.
- Garder une partie des Syriens sous l’emprise occidentale et à sa merci pour les recruter contre leur pays : l’occident, incapable de fournir des unités militaires pour perpétrer son agression et son occupation de la Syrie, et par crainte des pertes qu’il ne manquera pas de subir face à la Résistance qui s’en occupera après avoir achevé la libération et le nettoyage des zones centrale et intermédiaire, veut former à l’étranger des unités de combat syriennes, sous son commandement, qui le soulageraient du poids des pertes humaines et matérielles, surtout que les pays du Golfe sont astreints à financer les charges.
- Servir la stratégie du prolongement du conflit sur laquelle s’appuient les Etats-Unis après leur défaite en Syrie : cet élément est clairement et publiquement énoncé et reconnu par les USA et ses agents occidentaux qui considèrent que la fin du conflit en Syrie représente une défaite stratégique majeure qui pourrait dramatiquement diminuer leur influence au Moyen-Orient et même les en déloger.
- Provoquer un changement démographique dans tous les pays de la région qui ouvrirait la voie à un déplacement des frontières et à la révision des lignes de démarcation voulus par « Israël » : et nous rappelons ici la stratégie américaine du « chaos constructif » adoptée pour redessiner un Moyen-Orient nouveau basé sur la création d’états ethniques, communautaristes, confessionnels, sectaires et raciaux ; états faibles qui ne pourraient être créés que par une reconfiguration démographique résultant de déplacements forcés massifs d’abord, et de l’implantation planifiée par la suite. Et c’est précisément sur ce point que la question des réfugiés est un danger pour la Syrie qui évolue en danger pour le Liban et la Jordanie. Quant à la Turquie, il apparaît clairement qu’elle fait partie du plan occidental qui lui confère la possibilité de déplacer ses frontières en annexant des terres syriennes ; c’est son ambition actuelle pour Afrin et ses aspirations pour les environs d’Alep de Tell Rifaat à Manbij jusqu’à Jarablus. C’est pour cette raison que l’occident tient à relier la question des réfugiés à la solution globale. Aux plus avisés de comprendre cet aspect.
Pour toutes ces raisons, nous croyons que la résolution du problème des déplacés dépasse les seuls intérêts syriens et englobe toute la région et en particulier le Liban. Cette question de déplacement et d’implantation constitue un danger pour l’unité de la Syrie, mais également pour l’unité et la sécurité des pays voisins. Par conséquent, le cri que le Liban a poussé contre la déclaration de Bruxelles, émise par l’Union Européenne et les Nations-Unies, est un acte de défense qui doit être suivi et doit unir les Libanais pour son rejet. Nul n’a le droit de se taire car le silence est inacceptable et est signe d’approbation tacite et même de trahison envers le Liban.
Nous pensons également que la coordination syro-libanaise pour la résolution du problème des réfugiés est un devoir national qui touche directement la sécurité nationale et la stabilité du Liban. Tout individu ou entité ou état qui refuse cette coordination, entrave toute solution et empêche le retour des réfugiés syriens dans leur patrie, est simplement un ennemi du Liban. Enfin, nous affirmons que la résolution du problème des réfugiés, non seulement au Liban mais dans les pays d’accueil, et leur rapatriement dans leur pays est une part essentielle dans la bataille défensive menée par le camp de la Résistance contre l’agression américano-sioniste appuyée par les pays arabes de la région. Toute indulgence à ce sujet n’est que service rendu facilitant l’agression contre la région.
Lien vers l’article original en arabe: http://www.al-binaa.com/archives/article/188301