Survivre dans le Grand Nord russe
Baptiste Dulaar est, malgré son jeune âge, 27 ans, un aventurier confirmé. Début 2018, il s’est lancé dans un voyage en solitaire à travers les montagnes et la taïga de l’Oural pré-polaire. Depuis le village de Saranpaoul (1 580 kilomètres au nord de Moscou), dans le district autonome des Khantys-Mansis — Iougra, il a ainsi rejoint celui d’Aranets (1 495 kilomètres au nord de Moscou), en République des Komis.
Si ces deux points ne sont séparés que d’environ 160 kilomètres à vol d’oiseau et de 250 kilomètres à pied, il s’agit en réalité d’un périple aussi extrême qu’ardu, nécessitant de se frayer un chemin entre marécages, épais manteau neigeux et pistes de montagnes. Ce récit, le jeune homme le narre sur son blog.
C’est sur ce dernier que l’on en apprend d’ailleurs un peu plus sur son équipement : « une petite tente en coton avec un poêle à bois datant de l’Union soviétique, un traîneau, une grande peau de rennes en guise de matelas, une paire de skis que j’ai fabriquée dans du bouleau, ma hache, ainsi que quatre couteaux avec le nécessaire pour aiguiser, un fusil et des cartouches de différents calibres, des vêtements très chauds et solides, tout le nécessaire pour filmer, pharmacie de secours et parapharmacie d’hygiène, un carnet vierge ». Il précise en outre avoir fait le choix de ne pas prendre de téléphone satellite, afin de ne pouvoir compter que sur lui-même.
Durant ces 15 jours, au cours desquels il n’a croisé personne, si ce n’est un homme vivant seul dans une isba au pied d’une montagne et les quelques animaux dont il a croisé le chemin, notamment un glouton, un grand tétra, des lagopèdes et une multitude de lapins, Baptiste a survécu grâce aux méthodes traditionnelles des peuples autochtones du Nord, qu’il avait auparavant méticuleusement étudiées.
Il avait cependant prévu des réserves de nourriture. « J’ai acheté une patte entière de renne aux nomades (12kg d’une viande extraordinaire avec beaucoup de gras), ainsi qu’une bouteille de 0,5 litre de graisse d’ours à un ami chasseur, du piment, du sel et des plantes pour faire des infusions, peut-on en effet lire sur son site. J’avais aussi quelques morceaux de pain sec et 5 poissons séchés. J’ai également chassé trois lapins, d’environ 4kg chacun. Je n’ai jamais manqué de nourriture et je mangeais à ma faim ».
À noter que l’aventurier a bénéficié du sponsor de SONY (Russie), qui lui a prêté le matériel nécessaire pour réaliser, à Moscou avec l’équipe de la marque, son prochain documentaire portant sur cet incroyable périple.
« Ce voyage entre des cols et des vallées d’une grandeur et d’une majesté uniques ont marqué mon cœur d’un amour encore plus fort pour la taïga et les étendues sauvages, conclut-il sur son blog, à la fin de son épopée. Et tous ces voyages, immersions, expéditions, aventures… tous ces jours, ces mois, maintenant même années passées dans la forêt, à dormir et vivre au cœur de la nature, viennent s’accumuler pour tisser un lien et une compréhension plus grande de la Taïga et de la nature en général. Voilà tout ce que je souhaite de plus cher, et de pouvoir le partager avec ceux qui sont capables de le comprendre ».
Un aventurier aguerri
Baptiste n’en est néanmoins pas à sa première expérience de survie en milieu naturel. En effet, dès 2007, alors qu’il n’avait que 16 ans, il s’est lancé dans une première aventure dans les forêts du Massif central. Cet événement a semble-t-il été pour lui un élément déclencheur puisque l’année suivante il a entrepris l’étude des plantes comestibles sauvages auprès d’un paysan-herboriste de la Drôme.
Après plusieurs autres expérimentations, c’est en 2013 qu’il a réalisé son premier voyage en Russie, lors duquel il a notamment séjourné au monastère bouddhiste Chad Ttchoup Ling, situé dans la taïga, au sommet de la montagne ouralienne Katchkanar.
Suite à cela, il a fondé son association Vivre la Forêt, au sein de laquelle il propose à présent une initiation à la survie au travers de stages dans la nature sauvage.
En 2015 il s’est ensuite lancé dans une expédition en solitaire dans le Grand Nord russe, dans la région d’Arkhangelsk (991 kilomètres au nord de Moscou), sur les bords de la mer Blanche, afin d’y étudier et de mettre en application les techniques de chasse et de pêche des peuples locaux.
Un an plus tard, il a passé 15 jours dans la taïga de la région ouralienne de Sverdlovsk (1 417 kilomètres à l’est de Moscou), en compagnie d’un chasseur-pêcheur. Le mois suivant il se lançait déjà, à la rame, sur les rivières Liapine et Sosva, dans les environs de Beriozovo (district autonome des Khantys-Mansis — Iougra), parcourant 400 kilomètres en 15 jours et se nourrissant de poisson.
Enfin, en juillet-août 2017, il a décidé d’effectuer un périple de 45 jours en République des Komis, tout d’abord à pied dans les montagnes de l’Altaï (200 kilomètres), puis à bord d’un canoë traditionnel en bois (850 kilomètres) sur de petites rivières et le fleuve Ob pour rejoindre Salekhard (capitale du district autonome de Iamalo-Nénétsie, 1 935 kilomètres au nord-est de Moscou).
C’est au lendemain de cet incroyable voyage qu’il a par ailleurs mis en ligne sur YouTube son film documentaire époustouflant La Sibérie dans l’Âme, dans lequel il retrace son odyssée.
Son prochain périple, cet aventurier compte l’effectuer durant la période estivale. En effet, il ambitionne de partir en juillet 2018, avec un groupe de volontaires qu’il encadrera, pour une expédition en Sibérie, à la rencontre des Evenks, peuple nomade d’éleveurs de rennes, le tout, en canoë, sur la rivière Kotouï. Il prévoit de parcourir en 45 jours plus de 1 200 kilomètres et de s’immerger pleinement dans la nature sauvage de la région.
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