TURQUIE. Les chancelleries occidentales s’alarment d’une purge sans précédent
Les larmes de Recep Tayyip Erdogan : c’est cette image insolite qu’ont diffusée hier les télévisions turques alors que l’autoritaire président de la République islamo-conservateur, plus habitué à maîtriser ses émotions, assistait dans une mosquée d’Istanbul aux obsèques d’un vieil ami, publicitaire connu dans le pays, tué avec son fils de 16 ans lors du coup d’Etat avorté. Voilà pour la séquence émotion, car l’implacable président turc mène depuis la nuit de vendredi à samedi une chasse aux sorcières d’ampleur dans les milieux militaires et judiciaires soupçonnés de complicité avec les mutins.
Le chiffre de 3 000 militaires arrêtés, y compris des généraux et l’un des 17 juges de la Cour constitutionnelle, circule. Le propre aide de camp d’Erdogan, le colonel Ali Yazici, a été placé en garde à vue. Quelque 2 745 juges vont aussi être démis de leurs fonctions. Selon le ministre de la Justice, Bekir Bozdag, pas moins de 6 000 personnes sont en garde à vue. Quant au Premier ministre, Binali Yildirim, il a appelé au rétablissement de la peine de mort…
De quoi dégrader encore l’image d’Ankara dans les chancelleries étrangères, déjà très critiques sur le non-respect des droits fondamentaux dans le conflit avec les Kurdes, et qui considèrent à ce titre la Turquie comme un Etat démocratiquement peu fréquentable. Ces dernières heures, plusieurs diplomates ont haussé le ton. Dont le Français Jean-Marc Ayrault, pour qui « le coup d’Etat raté n’est pas un chèque en blanc au président Erdogan pour faire des purges ». La chancelière allemande, Angela Merkel, a aussi demandé que l’Etat de droit soit respecté. Quant au président russe, Vladimir Poutine, il a simplement souhaité « un retour rapide à l’ordre constitutionnel et à la stabilité ».
Mais c’est surtout avec Washington que la tension monte. Erdogan accuse le prédicateur (…)