Savoir prendre les bons risques professionnels
Le goût de l’inconnu, l’envie de se dépasser poussent parfois à s’écarter d’une carrière toute tracée. Une aventure qui exige de la lucidité, du discernement… et un zeste de folie.
Lorsqu’elle a quitté AOL France en 2009, quelques mois avant que le fournisseur d’accès à Internet ne cesse définitivement son activité dans l’Hexagone, Virginie Ducrot a éprouvé un irrésistible besoin, pas très fréquent chez les cadres : se mettre en danger. « La solution de facilité aurait été de valoriser mon diplôme de l’Essec et mes jolies références pour rebondir dans uns grosse entreprise. Mais là, j’ai eu envie d’une bonne dose d’adrénaline ! »
Ni une ni deux, elle a sauté le pas : la jeune femme, qui avait siégé au comité de direction d’AOL, s’épanouit depuis avril dernier comme directrice marketing d’une start-up de sept salariés, envoimoincher.com. Elle a investi à titre personnel dans le capital de ce site qui compare les tarifs des messageries express. Et à l’en croire, un petit chez-soi vaut bien un grand chez les autres…
Estime de soi. Relever un défi, se dépasser, repousser ses limites… Autant de raisons qui incitent certains managers à prendre des risques et à faire une croix sur les titres clinquants et les statuts ronflants. Leur philosophie ? Sans l’excitation du challenge, les sacrifices professionnels deviennent vite intolérables. Loin d’être des casse-cou, ces funambules du business ont suffisamment conscience de leurs faiblesses pour ne pas se jeter dans le vide. Courageux donc, mais pas téméraires. « Quand on cherche à sortir des clous, la question de l’estime et de la connaissance de soi est toujours présente en filigrane », constate Philippe Lesage, coach et recruteur au cabinet Alexandre Tic.
Confiance totale. Pour être en mesure de relever tous les défis (y compris ceux qui tombent à l’improviste) et surtout d’assumer un éventuel échec sans s’effondrer, le maître mot reste la confiance. Marc Panic n’en a pas manqué lorsqu’il a pris à partie les dirigeants de sa start-up sur leurs promesses de Gascon (lire l’encadré). Il n’a pas obtenu gain de cause. Mais son coup d’éclat a agi comme un révélateur : comme lui, la plupart de ses collègues ont préféré aller voir ailleurs.
Plus chanceux, Vincent Quignon-Fleuret a été entendu par sa hiérarchie. Ses exigences n’avaient pourtant rien d’évident. Dès son entrée à Boursorama, ce gestionnaire de back-office s’est fixé comme objectif de devenir manager. Sauf qu’avant de postuler, il s’est posé les bonnes questions : techniques (« Suis-je capable de conduire une réunion, de faire une présentation en public ? ») et psychologiques (« Ai-je peur de l’affrontement, de dire non ? »). Titulaire d’une simple licence de droit, il s’est souvenu de son service militaire, effectué à l’école des officiers de Saint-Cyr. Estimant que cette formation l’avait doté des armes nécessaires pour diriger un service, il a donc demandé à ses supérieurs la responsabilité d’une équipe de sept commerciaux. « Je n’ai jamais écarté l’hypothèse selon laquelle je pouvais échouer, confie-t-il. Mais je savais surtout que j’avais de grandes chances de m’épanouir à ce poste. » Et il avait raison : il est maintenant directeur marketing clients de la banque en ligne.
Décision commune. Si le courage plonge ses racines dans la confiance en soi, il est aussi renforcé par celle que vos proches placent en vous. Changer de métier, accepter un poste exposé, intégrer une structure encore fragile sont des décisions lourdes de conséquences, qui se prennent rarement seul. Voyez Céline McCabe. Sa nouvelle vie, elle l’a décidée « à deux », dit-elle, avec son mari. A 33 ans, cette ex-DRH d’une usine Renault, diplômée de l’ESCP et mère de deux jeunes enfants, a quitté la voie royale promise aux « hauts potentiels » pour travailler à plein temps dans l’ONG Asmae-Sœur Emmanuelle.
Vous êtes au clair avec vos envies ? Votre plan pour les réaliser a de bonnes chances de succès ? Et votre entourage vous soutient ? Cessez de vous poser des questions, foncez ! Car oui, il faut une légère dose d’inconscience pour se lancer dans l’inconnu. Se projeter trop précisément dans une nouvelle fonction peut vite conduire à la paralysie les plus courageux d’entre nous. Tel un plongeur au bout du tremplin, vous aurez besoin de faire taire vos doutes pour oser le grand saut et passer à l’acte. « S’autoriser, oser, prendre l’initiative… Voilà les seuls mots qu’il faut avoir en tête lorsqu’on décide d’abandonner le confort et la sécurité », explique la coach Catherine Chouard. En 2006, Antoine Bayle, ingénieur, a démissionné de son poste chez IBM pour fonder sa SSII, Tchap, spécialisée dans la création de sites Web. Même s’il avait préparé le terrain en nouant quantité de contacts avec de futurs clients, il confesse aujourd’hui avoir mal anticipé la charge de travail, le temps infini que demande la relance des prospects, et les difficultés inhérentes à tout changement de cap. Mais in ne regrette pas sa décision : « A trop réfléchir, on ne fait jamais rien ! » affirme le jeune patron, qui emploie aujourd’hui une quinzaine de collaborateurs.
Ecouter sa petite voix. Si le temps passe au début pour un allié, il est indispensable de mûrir son projet, il peut aussi devenir un ennemi. Comme bien de cadres se lamentent, au milieu de la quarantaine, d’avoir laissé s’éteindre la petite voix qui les poussait dix ans auparavant à forcer le destin ? « C’est trop tôt », « Je suis bon dans mon job », « J’ai encore tellement de choses à prouver »… Les arguments ne manquent pas pour justifier l’attentisme. Il n’empêche, tous les experts que nous avons interrogés sont formels : une expérience de sept à dix ans à un poste opérationnel, dans une ou deux entreprises de taille conséquente, constitue déjà un solide viatique pour tenter l’aventure.
« La prise de risque doit être associée à une réflexion honnête sur ses ambitions… et ses propres limites, prévient Vincent Quignon-Fleuret, de Boursorama. Il faut éviter d’avoir les yeux plus gros que le ventre car le résultat peut se révéler catastrophique. » Au besoin, discutez-en avec un collègue, voire un supérieur. Un pari audacieux suscite toujours de l’intérêt. Et à défaut de vous encourager dans ce virage professionnel, votre chef vous évitera peut-être la sortie de piste.
Assumer une décision impopulaire
Personne n’aime jouer les oiseaux de mauvais augure. Mais on ne peut pas prétendre diriger une équipe et se défiler lorsqu’il faut annoncer une nouvelle désagréable. Question d’autorité.
Depuis la restructuration engagée en 2006 par le PDG Jacques Gounon, les finances d’Eurotunnel vont mieux. Mais les équipes du transporteur ont eu du mal à sortir la tête de l’eau. « Le middle management avait perdu la main et l’ambiance de travail était devenue délétère », se souvient Paul Pinto, PDG de Manageyourself. Objectif de la mission confiée à ce cabinet de conseil : réapprendre aux managers opérationnels à mener des entretiens d’évaluation en sachant dire ce qui ne va pas, et imposer un roulement lors des permanences du week-end pour ne plus laisser les mêmes salariés se sacrifier face aux forts en gueule… Bref, restaurer l’autorité perdue, celle qui permet d’imposer des décisions désagréables.
Levée de boucliers. L’exercice est assez peu prisé des managers. Comment annoncer à ses troupes que, cette année, il n’y aura ni augmentation individuelle, ni primes ? Que le projet sur lequel elles travaillent depuis six mois est abandonné ? Qu’elles déménagent dans un cadre peu avenant ? Surtout, comment y parvenir sans entamer leur motivation et leur confiance ? « Les dirigeants pensent que tout changement va automatiquement provoquer une levée de boucliers. C’est faux : si l’on montre que la décision est dure mais juste, et qu’elle ne profite pas à un petit nombre, il y a en général peu de résistance », explique Christophe Faurie, professeur à l’université Paris-Dauphine. Ce consultant s’est spécialisé dans la conduite du changement après avoir occupé de nombreux postes où il a dû assumer certains choix contestables de sa hiérarchie. « Je me souviens notamment d’une situation très inconfortable, raconte-t-il. L’un de mes chefs avait gagné plusieurs appels d’offres, mais nous étions incapables de les réaliser dans les temps. J’ai dû obliger mon service à se mettre en quatre face à des clients furieux. »
Donner du sens. Pour éviter de se retrouver en première ligne, la plupart des mangers se contentent souvent de jouer les courroies de transmission. Ils se réfugient derrière leurs notes, envoient des sbires annoncer l nouvelle à leur place ou critiquent ouvertement la stratégie de leur hiérarchie. Grossière erreur. « Ce comportement crée un sentiment d’inconfort alors que les collaborateurs ont besoin de se sentir en sécurité », estime Paul Pinto. Bénédicte Haubold, fondatrice du cabinet Artélie spécialisé dans les risques psychosociaux, va plus loin : « Dans les entreprises où le manger relaie des décisions sans leur donner du sens, on constate rapidement des baisses de motivation et de productivité. »
Première règle : en tant que meneur d’hommes, c’est à vous de prendre la parole. Il en va de votre crédibilité. Peu importe d’ailleurs que vous soyez ou non en accord avec la décision. « Agissez comme un avocat : cherchez dans le dossier les éléments qui étayent la défense et argumentez en ce sens », conseille Christophe Faurie. « Avant une annonce difficile, j’écris à l’avance les mots-clés sur une feuille », confie Alain Mauriès, DRH chez Pochet, leader mondial du flaconnage cosmétique. De manière générale, plus vous resterez factuel, plus vous limiterez les débordements. « Une décision impopulaire doit être appuyée sur des faits précis, des évaluations objectives, des prévisions réalistes », indique Christian Brière, manager de transition chez X-PM Transition Partners.
Pour vous aider, inspirez-vous de la technique anglo-saxonne du « stretch goal » (objectif transcendé), qui fonctionne en trois temps. Présentez d’abord l’objectif sous une forme quantifiée : par exemple, une augmentation du chiffre d’affaires de 20%. Puis insistez, sans en rajouter, sur les difficultés actuelles du marché : « Depuis trois ans, nos ventes baissent de 10% à périmètre constant. » Enfin, détaillez les solutions qui doivent assurer la réussite du projet : « un audit de la direction commerciale montre qu’il existe un potentiel de clients inexploités. Nous allons leur consacrer une part importante de nos efforts et faire sauter les dysfonctionnements qui bloquaient jusqu’ici le développement de ces relais de croissance. »
Défendre sa position. Cet argumentaire doit être développé sur un court laps de temps. Une fois l’annonce faite, votre équipe va à coup sûr tester votre détermination, en manifestant bruyamment son mécontentement… voire en vous menaçant. « Alors que j’étais chargé de fermer un réseau de stations-service, on m’a prévenu qu’un gérant m’attendait avec un fusil ; j’ai fait savoir que je viendrais quand même ; heureusement, il s’est dégonflé », raconte Jean-Pierre Lacroix, aujourd’hui gérant de MCG Managers (management de transition). « On gagne le respect en résistant et en défendant pied à pied sa position », ajoute Christophe Faurie.
Aller droit au but. Ce qui ne signifie pas rester sourd aux craintes de vos collaborateurs. Au contraire, votre rôle consiste à les laisser exprimer leurs inquiétudes. Surtout, ne les minimisez pas : cela ne ferait qu’envenimer les choses. « Gardez une ligne claire, conseille Frédérique Deloffre-Vye, dirigeante de Croissens Consulting. Expliquez que vous avez rappelé à la direction le travail accompli jusqu’ici, que vous avez défendu d’autres options, mais qu’un choix a été opéré et que vous vous y êtes rallié. » Attention, toutefois, à ne pas lâcher des phrases du genre « Ce n’est pas ma faute » ou, pis, « ça ne dépend pas de moi » qui sous-entendraient que vous n’avez aucune autorité ou marge de manœuvre.
Dans un entretien en face à face, les sentiments risquent d’être exacerbés. Pour canaliser les débordements, allez droit au but. Inutile de temporiser en demandant des nouvelles de la famille, ou en prévenant votre collaborateur que avez quelque chose à lui dire mais qu’il n’a pas à s’inquiéter… « L’intéressé va se faire un film. Prenez plutôt soin de contextualiser la décision et d’expliquer à votre interlocuteur les conséquences qui le concernent directement », conseille la coach Frédérique Deloffre-Vye.
Perspectives d’avenir. L’émotion le submerge ? Incitez-le à s’exprimer. Psychologue chez Stimulus, Chrystel Chaudot conseille cette méthode : « Reformulez la réaction ou l’absence de réaction de votre interlocuteur. Par exemple, s’il se met à pleurer, dites-lui : ‘’Je comprends que tu aies du chagrin. Mais cette décision va te permettre de…’’ Si vous reconnaissez sa souffrance, votre collaborateur se sentira respecté. » Devant les larmes de la secrétaire qu’il licenciait, Joël Chareyron, aujourd’hui directeur de Facilliance (entreprise de maintenance) a su trouver les mots justes : « Je n’ai pas cherché à me justifier. Je lui ai demandé ce qu’elle pensait de son job. C’était une façon de lui faire admettre qu’elle ne s’y sentait plus bien et que la séparation était la meilleure solution pour tout le monde. »
Enfin, il faut donner des perspectives d’avenir : « On se revoit dans deux jours » ; « J’attends vos propositions pour bâtir notre plan d’action. » Dans le cadre d’un déménagement, par exemple, il est impératif de réunir son équipe pour recueillir ses doléances et réfléchir avec elle à de nouvelles manières de travailler ; « C’est aussi l’occasion d’identifier les démissions potentielles », note Paul Pinto. Plus vite on les détecte et mieux on organise la suite
Oser se faire remarquer
Dans le climat actuel, se fondre dans le paysage semble rassurant. Il n’empêche : les entreprises ont aussi besoin de trublions qui bousculent les vieux modèles.
Plutôt gonflé, ce candidat qui postulait à la direction commerciale d’un groupe industriel ! Lorsque le PDG qui le recevait lui a lancé : « Vous avez meilleur mine que sur la photo de votre CV », il a répondu du tic au tac, en sortant de sa sacoche un cliché de son interlocuteur pris lors d’un séminaire : « Eh bien moi, lorsque je vous vois tout sourire, encadré par deux jolies hôtesses, cela me rassure sur la santé de la maison ! » Une repartie qui a eu l’air de plaire : l’impertinent a décroché le job.
Jouer le décalage. « Les entretiens de recrutement constituent de bonnes occasions de faire preuve d’audace », observe Estelle Strappazon, fondatrice du cabinet de recrutement Elyte. Comme on n’a rien à perdre, autant marquer les esprits. Le hic, c’est qu’une fois embauchés, les cadres qui sortaient du rang ont tendance à vite y rentrer. Surtout s’ils craignent pour leur avenir. Et le calcul n’est pas forcément judicieux : la crise offre en effet une fenêtre de tir à ceux qui osent le décalage. « Les dirigeants ont besoin d’innover, rappelle Jean-Louis Muller, directeur associé à la Cegos. Pour y arriver, ils réclament des managers capables de briser la routine. » Vous ne vous sentez pas l’âme d’un fou du roi ? Avec un peu de méthode, vous serez surpris de votre capacité à bousculer l’ordre établi.
Premier conseil : ne sur-jouez pas, restez authentique. Pour aider les managers à retrouver une certaine sincérité, le coach Arnaud Riou leur demande de lister toutes les fois où ils ont dit oui quand ils pensaient non. Un indice ne trompe pas : « Si vous éprouvez une crispation au niveau du plexus solaire, c’est que vous êtes en désaccord avec la décision », affirme-t-il.
Ensuite, interrogez-vous sur les raisons qui vous ont empêché de contredire votre interlocuteur. La peur d’être (mal) jugé se trouve souvent à l’origine de ces petites lâchetés du quotidien. Or un manager qui ne prend jamais position perd la considération de ses collaborateurs. Et peut-être aussi celle de ses supérieurs : lorsqu’on est sûr de son fait, tenir bon se révèle en effet souvent payant. « Je me souviens d’un cadre qui, malgré la pression de sa hiérarchie, affolée à la perspective de perdre un contrat, a refusé de baisser ses tarifs, raconte Arnaud Riou. Il était certain de coller aux prix du marché. Finalement, c’est lui qui a remporté l’appel d’offres. Et son patron l’a félicité d’avoir tenu le cap. »
Désacraliser le chef. Car personne n’est infaillible. Or c’est souvent parce que les salariés sont persuadés que leur supérieur a raison qu’ils renoncent au dialogue. « En général, les gens n’osent pas donner leur avis parce qu’ils placent leur patron sur un piédestal », explique la coach Nelly Michelin. Le meilleur moyen de désacraliser votre chef ? Focalisez-vous sur l’homme, avec ses qualités et failles. Puis amusez-vous à imaginer les ordres que vous lui donneriez si vous étiez son supérieur. « C’est un jeu intellectuel très stimulant », assure Mathieu Griffoul, directeur au cabinet de conseil Weave.
Enfin, répétez-vous tous les matins cette devise de Benjamin Franklin : « Il y a bien des manières de ne pas réussir, mais la plus sûre est de ne jamais prendre de risque. » Pour vous en convaincre, rappelez-vous toutes les fois où votre audace s’est révélée payante, dans un contexte professionnel ou privé. Grégoire Sentilhes, le président fondateur de la société de capital-développement NextSage, n’a jamais oublié son premier coup de poker. A 23 ans, il avait négocié l’achat d’un quart de page dans « Le Monde » et publié sa propre annonce de recherche d’emploi, titrée « Je ne m’appelle pas Citizen Kane » en référence au magnat de la presse du film d’Orson Welles. Sa cible : les entreprises de médias et de télécoms. Bien vu ! Le jeune diplômé de l’ISG a reçu rapidement plusieurs propositions, dont une émanant de Robert Hersant : ce dernier le propulsera administrateur de son groupe moins d’un an plus tard.
Attention, toutefois : se sentir bien armé pour exprimer ses convictions ne signifie pas qu’on doive sans cesse « la ramener ». Evitez de jouer l’enquiquineur de service, qui soulève des objections à tout propos sans apporter la moindre solution : vous finiriez par agacer. Pour vous distinguer de façon habile, vous devez être une force de proposition. Autre règle élémentaire : respecter les usages en vigueur dans votre entreprise. Si la culture maison est celle de la porte ouverte, inutile de vous enfermer avec votre patron dans son bureau sous prétexte de lui exposer l’idée du siècle ! Le but n’est pas de passer pour un original, encore moins de faire cavalier seul. « Respectez les autres, vous avez tout à y gagner », insiste Pascal Chauvin, auteur de « 20 clés pour mieux réussir professionnellement » (éditions Gualino). C’est parce qu’elle s’est faite le porte-parole de toute une profession qu’Anna Sam a gagné les faveurs des médias ainsi que l’estime de ses collègues. Titulaire d’un DEA de littérature, la jeune femme était caissière dans un hypermarché Leclerc de la région de Rennes lorsqu’elle a lancé son blog en 2007. L’idée ? Raconter avec humour sa vie quotidienne. Et changer le regard des clients sur ce métier difficile. Un joli buzz plus tard, elle est devenue consultante auprès de Michel-Edouard Leclerc : ce dernier vient de lui confier en personne une mission d’étude pour revaloriser le statut de ses ex-consœurs dans tous les magasins de l’enseigne.
Sortir du lot est une chose. Mais si vous ne voulez pas faire chou blanc, veillez aussi à respecter le bon timing. « Choisissez le moment opportun pour vous exprimer, avertit Jean-Louis Muller, de la Cegos. La réunion, par exemple, n’est pas l’occasion la plus propice pour donner son point de vue car il s’y instaure d’emblée des jeux de pouvoir. » En revanche, pourquoi ne pas créer une occasion qui vous permettra de vous adresser directement au boss ? Vous pouvez ainsi vous arranger pour l’aborder seul à seul dans l’ascenseur, sur le parking de l’entreprise ou encore lors d’un pot de départ. Il sera, sans nul doute, dans de meilleures dispositions que derrière son bureau. Antoine Lévêque, directeur général de l’agence Marvellous France (marketing sur les mobiles), se souvient d’un fournisseur qui le harcelait au téléphone pour obtenir un rendez-vous. « J’ai fini par lui dire que je n’avais même pas le temps de manger une pizza au déjeuner. » Son interlocuteur a saisi la balle au bond en débarquant dans son bureau à 13 heures avec une margarita. Que les deux hommes, évidemment, ont partagée en parlant business.
Ecrire pour exister. Lorsque le contexte professionnel ne vous offre aucune occasion de briller, rien ne vous empêche de montrer vos talents à l’extérieur de l’entreprise… en vous arrangeant pour que vos chefs l’apprennent. Le coach Pascal Chauvin a ainsi décroché un job de directeur de la communication dans une société d’ingénierie grâce à l’un de ses livres. « Le PDG a été très impressionné : il avait lui-même écrit un bouquin sans jamais réussir à le faire publier », raconte-il. Une technique dont son frère Eric, dirigeant d’une société de crédit, s’est inspirée. La perspective de démarcher les éditeurs vous rebute ? Utilisez la force de frappe d’Internet. Suite à son succès, sur le web, le blog d’Anna Sam a été décliné en livres. Un carton. Traduit en 21 langues, le premier volume, « Les Tribulations d’une caissière », s’est écoulé à 350 000 exemplaires ! Le genre de coup qui vous propulse en tête de gondole.
S’opposer à sa hiérarchie quand elle se trompe
Il faut avoir du cran pour faire acte de résistance face à sa direction, surtout en période de crise. Mais s’il est mené avec tact et doigté, cet exercice à haut risque peut se révéler payant.
Eté 2009. Les ouvriers de la filiale française de Nortel menacent de faire sauter leur usine. L’image fait la une des médias. Michel Clément, qui dirige alors l’entreprise, se démène pour sauver ce qui peut l’être. Mais l’équipementier télécoms canadien n’en démord pas : il veut vendre au plus et quitter le pays. Consigne est alors donnée au DG France d’ « embellir la mariée » en taillant dans les effectifs. Michel Clément s’y refuse. Au risque de se faire lui aussi débarquer. « Je n’ai pas raisonné en termes de plan de carrière, confie-t-il aujourd’hui. J’ai fait ce qui me semblait juste, et j’ai assumé. » Quand bon nombre de ses collaborateurs décident de mettre les voiles, lui reste. Et se porte même volontaire auprès du repreneur, le groupe autrichien Kapsch, pour poursuivre l’aventure. Avec l’aval de son épouse. « Son feu vert était indispensable : il m’a conforté dans mon choix », conclut-il.
Schéma parental. Dire non à ses chefs, quoi qu’il en coûte, l’exercice relève de la gageure. Et plus encore en période de crise. « Dans le contexte actuel du marché du travail, c’est une vraie preuve de courage », estime le coach François Enius. Mais à bien y regarder, le jeu peut en valoir la chandelle. Comme le note Jean-Paul Lugan, coauteur de « Manager avec courage » (Eyrolles), « l’entreprise reproduit le schéma parental ». S’opposer à son patron, figure de l’autorité, reviendrait donc à affronter son père. Or ceux qui osent « tuer le père » constituent une espèce aussi rare que précieuse. « L’entreprise a besoin des gens lucides : elle a intérêt à engager des collaborateurs qui ne sont ni résignés ni soumis. Les béni-oui-oui qui obéissent à des ordres ineptes sans protester ne lui rendent pas service », assure Alain Pichon, docteur en sociologie et auteur des « Cadres à l’épreuve » (PUF). Un manager qui a le cran de se dresser contre sa hiérarchie, à condition bien sûr d’être convaincu qu’elle fait fausse route, peut y gagner en respect et en crédibilité. Encore faut-il agir avec mesure et discernement. Avant de monter au créneau, évaluez la situation en vous posant plusieurs questions clés : le contexte est-il favorable ? Ai-je des chances d’être écouté par mon patron ? Qu’est-ce que je risque ? « Pour contrer une décision qui vient d’en haut, il faut avoir des atouts dans sa manche : l’expertise, le statut ou des arguments imparables », détaille le coach Jean-Paul Lugan.
L’art de dire non. Vous vous sentez d’attaque ? Préparez alors avec minutie votre intervention. « Si vous voulez être crédible, vous devez maîtriser votre sujet sur le bout des doigts et monter un dossier qui tienne vraiment la route », conseille François Enius. C’est ce qu’a fait Dominique Cufi. Cette cadre sup d’Arcelor, spécialisée dans la formation, avait 40 personnes sous ses ordres lorsqu’elle a reçu un e-mail lapidaire d’un de ses deux supérieurs hiérarchiques directs lui demandant de licencier sur-le-champ douze collaborateurs. « Je n’ai pas répondu tout de suite. Pendant dix jours, j’ai cherché d’autres solutions, puis j’ai présenté un plan qui proposait de réduire autrement les coûts » son idée n’a pas été retenue, mais elle a gagné l’estime de son second manager, qui l’a maintenue à son poste le temps qu’une occasion professionnelle se présente. Dominique Cufi est aujourd’hui directrice de l’université d’entreprise de la Macif.
Le choix du moment et du lieu pour s’exprimer est crucial. «Evitez le bureau de votre chef, avertit François Enius. Préférez un tête-à-tête dans un endroit neutre ou informel. Et surtout, ne remettez jamais en cause son autorité en public. » Soignez aussi la forme : la façon de dire les choses joue un rôle fondamental. « Le jugement de valeur, la rébellion agressive ou la plainte larmoyante ne passent pas », prévient le consultant Christophe Perilhou, responsable du pôle ressources humaines à la Cegos.
Le cri du cœur, non plus. Directrice adjointe d’un groupe leader dans l’environnement, Adeline en a fait l’amère expérience. Elle avait carte blanche pour gérer un budget de 45 millions d’euros, jusqu’au jour où son directeur général lui a ordonné de réduire la masse salariale et de licencier des collaborateurs fraîchement recrutés. Au passage, il lui a demandé sur un ton badin ce qu’elle pensait de s stratégie. Le piège. Sans prendre le temps de réfléchir à une réponse étayée, Adeline s’est laissé emporter. « Je lui ai dit tout à trac qu’il n’avait aucune vision pour mener le projet d’entreprise à bien », confie-t-elle. Le châtiment s’est fait attendre, mais il a été sévère. Quelques mois plus tard, l’intéressée est partir en congé maternité. A son retour, elle n’avait plus de bureau et son nom avait disparu de l’organigramme… Son départ, infini, s’est négocié à l’amiable. « Un clash produit rarement des effets positifs », confirme le coach François Enius. Seule une attitude ouverte et constructive dans la discussion a des chances de porter ses fruits. « Faites preuve de diplomatie : exprimez vos doutes avec tact et proposez des solutions », conseille Christophe Perilhou. Pour éviter le licenciement d’un collaborateur, Claire, responsable formation dans le BTP, a opposé des arguments rationnels : « Mon chef s’est saisi d’un prétexte futile pour essayer de se débarrasser d’un de mes assistants. J’ai trouvé le procédé injuste, mais je n’ai pas répliqué sur le registre émotionnel. Je me suis seulement appuyée sur les états de service de la personne. » Bien vu : la victime désignée a pu conserver son poste.
Petite cachotterie. Il arrive cependant que même une démonstration imparable ne fasse pas mouche. Faut-il alors se résigner ? Geoffrey Behaghel a choisi, lui, de ruser. Ce responsable grand comptes au cabinet de conseil Amaris tentait depuis un an de séduire un prospect, en vain. Lassé, son supérieur hiérarchique lui a ordonné de laisser tomber. « Je lui ai répondu que mes tentatives allaient forcément finir par aboutir », raconte Geoffrey. Le patron s’énerve, donne de la voix. Et le commercial s’incline. Du moins, officiellement. « J’ai continué à ‘’travailler’’ ce prospect en douce. Un mois plus tard, j’ai signé avec lui l’un des plus gros contrats de la société. » Une persévérance qui lui a valu une belle prime… et les félicitations de son boss. Songez-y : une petite cachotterie peut se révéler plus efficace, et moins risquée, qu’un grand déballage.
Redresser la tête après un coup dur
Vous avez essuyé un échec ? Inutile de faire l’autruche. Affrontez plutôt la réalité. Et confiez vos angoisses à une oreille bienveillante.
En 2005, Arielle Bagdassarian et son mari créent une agence de communication et de formation. L’aventure démarre sous les meilleurs auspices. « On y avait tout mis : notre cœur, notre dynamisme, notre argent », raconte la jeune femme. Mais la crise financière de 2008 est fatale à cette structure déjà fragilisée par des problèmes de trésorerie. « L’annulation d’importantes sessions de formation nous a achevés », commente Arielle Bagdassarian. Le couple est obligé de déposer le bilan, avec un passage traumatisant devant le tribunal. « Cinq mois plus tard, j’ai fait une mini dépression, confie l’entrepreneuse. J’étais encore sous le choc de cet accident professionnel. »
Comment trouver l’énergie de rebondir quand on a l’impression de toucher le fond ? Cette énergie, Arielle l’a puisée dans les livres, l’amour de ses enfants et le soutien d’autres entrepreneurs au parcours similaire. Surtout, elle ne s’est jamais voilé la face. « Il faut avoir le cran d’exprimer l’angoisse provoquée par l’échec. Eprouver du désarroi est parfaitement légitime », affirme Matthieu Poirot, expert en risques psycho-sociaux et fondateur du cabinet Midori. Masquer ou enfouir la douleur n’aide pas à se relever, au contraire. « Ceux qui prennent des coups professionnels ont tendance à se dire ‘’Même pas mal’’, ajoute Matthieu Poirot. Quand on est manager et qu’on a l’habitude de rester maître de soi, réussir à lâcher ses émotions demande un véritable dépassement, mais c’est le seul moyen pour repartir. »
Autre passage obligé : analyser la situation avec lucidité. Qu’il s’agisse d’une faillite ou d’un licenciement, il faut commencer par admettre qu’on a échoué. « Faites l’inventaire des pertes. Avant de vous lancer dans un nouveau projet, mettez tout à plat », conseille Thierry Jallon, consultant et auteur de « 7 étapes pour rebondir après une crise » (Editions Liaisons). Il est inutile et dangereux de vouloir aller trop vite. « Après un coup dur, le manager éprouve le besoin d’activer immédiatement son réseau : parler au chasseur de têtes avec qui il joue au golf, déjeuner avec le PDG qu’il croise dans son club… Or, si on fonce bille en tête, on risque de gâcher de belles occasions », explique Domitille Tézé, fondatrice du cabinet Transition Plus et spécialiste des crises de carrière. Suivez son conseil : ne passez pas à l’action avant de vous sentir tout à fait prêt. « Avec mes clients, poursuit la consultante, nous prenons toujours le temps de structurer un discours, d’étudier en détail leur nouvelle orientation professionnelle. »
Le regard des autres. Au sentiment personnel de l’échec, déjà lourd à porter, s’ajoute souvent l’incompréhension, la déception, voire le mécontentement des proches. « L’un de mes clients éprouvait de la honte à l’idée d’annoncer son licenciement à ses enfants de 15 et 17 ans, raconte Domitille Tézé. Je l’ai préparé aux éventuels reproches de leur part : des vacances qui tombent à l’eau, un cadeau d’anniversaire dont ils ne verront pas la couleur… »
Et encore, ceci n’est rien comparé à l’indifférence ou au mépris dont on peut alors faire l’objet. « Dans notre société qui valorise fortement la performance, l’échec est très mal perçu », affirme Matthieu Poirot. «Certaines de mes connaissances changent encore de trottoir quand elles me croisent ! » se désole Alain Fabre, qui a été contraint de déposer le bilan de son entreprise de bâtiment en 2009. « Le plus difficile, témoigne-t-il, c’est de perdre son statut de dirigeant. Du jour au lendemain, vous n’êtes plus personne. » Depuis, Alain Fabre a retrouvé une identité professionnelle : il s’est lancé dans le conseil en management, à travers sa structure, Networks Développement. Pour remonter la pente, rien de plus efficace que d’échanger avec des pairs confrontés aux mêmes difficultés. Les ateliers animés par Thierry Jallon, qui a connu lui-même les affres de la faillite, ont été conçus en ce sens. Les chefs d’entreprise viennent y parler de leur échec, du ressentiment de leurs salariés qui s’estiment trahis, de ce train de vie qui chute brutalement… « Ils savent qu’ils ne seront pas jugés et que tout ce qu’ils diront demeurera confidentiel, explique le coach. En se prodiguant des conseils les uns les autres, ils retrouvent aussi une image plus positive d’eux-mêmes. »
C’est parce qu’il s’était senti lui aussi bien seul qu’Alain Fabre a décidé de créer l’Association nationale des entreprises citoyennes solidaires (Lanecs). Ce réseau accompagne les chefs d’entreprise qui ont plongé. « Ceux qui viennent me voir me disent souvent que je suis la première personne à qui ils peuvent parler librement et qui les comprend. » Lanecs a déjà aidé une dizaine de petits patrons à refaire surface. Autant de décideurs qui, lorsqu’ils se trouvent de nouveau aux manettes, ne raisonnent plus tout à fait de la même manière. S’il est aujourd’hui en pleine ascension avec Sarenza, le leader de la vente de chaussures en ligne, Stéphane Treppoz conserve un souvenir douloureux de son licenciement d’AOL France, en 2004. « Lorsqu’une personne est en difficulté dans son entreprise, je suis plus sensible à son cas, affirme-t-il. Et j’essaie de lui consacrer du temps pour résoudre le problème. Ayant vécu moi-même une telle situation, je sais que n’importe qui peut se retrouver fragilisé du jour au lendemain. »
Petites victoires. Une fois entouré, il est possible de passer à la phase de reconstruction. Mais croire que l’on va reconquérir en un clin d’œil une position sociale comparable à celle qu’on a perdue est illusoire. « Apprenez à vous satisfaire de petites victoires : c’est ainsi que vous repasserez du côté des gagnants », suggère Matthieu Poirot. C’est ce qu’à fait Gilbert Bauer. Ancien directeur des achats chez Thales, il décide, il y a cinq ans, de quitter sa place en or pour monter son cabinet en stratégie industrielle. Or l’affaire se révèle plus compliquée que prévu : malgré un épais carnet d’adresses, cet ingénieur chevronné peine à décrocher ses premiers clients. Très vite, il sombre dans l’angoisse du téléphone qui ne sonne pas. Mais il tient bon. « Il suffisait qu’un prospect accepte un déjeuner sur le pouce pour que mon moral remonte en flèche, raconte-t-il. J’ai gardé cet enthousiasme. Aujourd’hui encore, alors que tout va bien, un simple rendez-vous me donne des ailes. »
Comment chercher un autre job quand on est en poste
Que vous ayez soif de nouveauté ou envie d’être augmenté, il est légitime de vouloir changer de travail. Mais attention à ne pas vous griller !
Plus de la moitié des cadres qui changent de job augmentent du même coup leur rémunération, selon une étude menée l’an dernier par les cabinets RH Altedia et Syntec Recrutement. Mais l’argent n’est bien sûr pas la seule motivation. Faire le choix de la mobilité professionnelle constitue aussi un moyen de donner une nouvelle impulsion à une carrière qui piétine ou d’échapper à l’ennui d’un travail routinier. Le problème, c’est que la recherche d’un emploi représente presque une activité à plein temps : mener cette mission en plus de son job, de façon à la fois discrète et efficace, relève donc de la gageure. Voici comment y parvenir sans vous faire prendre.
- Rédigez CV et lettres depuis votre domicile
Effectuer votre recherche l’œil sur la montre, entre deux réunions professionnelles ? Stressante et pas très productive, cette méthode est à éviter. Pour préserver votre équilibre nerveux, adoptez cette règle de base : CV et lettres de motivation doivent être rédigés à votre domicile. Prenez soin de préciser qu’étant déjà en poste, vous souhaitez que votre demande soit traitée avec la plus grande discrétion. Créez aussi un tableau de bord pour y consigner tous les éléments relatifs à votre candidature : intitulé du job pour lequel vous avez postulé, nom et fonction exacts du contact RH et date d’envoi de vos courriers pour effectuer vos relances au bon moment. Essentiel également à ce stade des opérations : pensez à solliciter vos anciens employeurs afin qu’ils vous transmettent des lettres de recommandation.
- Sur Internet, rendez votre profil anonyme
Si vous voulez mettre votre CV en ligne, faites comme Jade : soyez prudent. Cette chargée de formation a déposé son CV sur CadresOnline et Cadremploi, mais pas sur le site de l’Apec, car elle savait que son patron le consultait. Autre option : rendez votre profil anonyme ou interdisez-en l’accès à certaines personnes. Les réseaux sociaux comme Viadeo, LinkedIn ou Xing sont à utiliser avec parcimonie, surtout si vous comptez parmi vos contacts des membres de votre entreprise. Gardez-vous, par exemple, de préciser que vous avez envie de bouger ! Sachez que les recruteurs n’hésitent pas à contacter une personne dont le profil les intéresse, même si rien n’indique sur sa fiche qu’elle veut quitter son poste.
- Profitez des heures creuses au bureau
Un salarié n’a pas le droit de se servir des outils mis à sa disposition par l’entreprise (messagerie, fax ou téléphone) à des fins personnelles. Seule une utilisation épisodique est tolérée. Au-delà de dix minutes par jour, l’employé peut théoriquement être congédié pour faute. Il n’y a qu’en cas de démission ou de licenciement qu’il est autorisé, dans le cadre du préavis, à consacrer deux heures par jour à une recherche d’emploi. Rien ne vous empêche cependant de profiter des heures creuses pour consulter les réponses à vos candidatures dans votre boîte e-mail personnelle. Ne modifiez pas vos horaires : prétexter une charrette pour rester plus tard chaque soir ne convaincra vos qu’un temps… Enfin, si vous devez stocker des documents sur votre ordinateur, rassemblez-les dans un dossier intitulé « personnel » : votre employeur n’a légalement pas le droit de l’ouvrir.
- Sollicitez votre réseau avec prudence
La meilleure agence de placement ? Votre entourage. La cooptation est l’une des principales voies de recrutement, alors ne négligez pas votre réseau. Didier André, directeur général adjoint de Century 21, assure que la plupart des manager qu’il a embauchés lui ont été recommandés par des membres de son équipe. Mais ne vous limitez pas au « premier cercle » de vos relations. Lors de rendez-vous avec des clients ou des fournisseurs, faites-leur comprendre que vous n’êtes pas contre l’idée de bouger et que leur entreprise vous intéresse. Restez circonspect : évitez de vous confier à des contacts récents, cantonnez-vous à ceux avec lesquels vous avez noué des relations solides. Sans une bonne compréhension des enjeux de la part de votre interlocuteur, une gaffe peut vite survenir. Avec vos collègues, tenez votre langue. A moins, bien sûr, qu’il s’agisse d’un « faut départ », d’un bruit que vous faites courir en vue d’inciter l’entreprise à vous retenir par une promotion ou une augmentation…
- Organisez discrètement vos rendez-vous
Lorsqu’un recruteur vous contacte sur votre portable (vous ne devez évidemment jamais donner votre ligne professionnelle), évitez de prendre l’appel au bureau, même si vous avez la possibilité de vous isoler. De fréquents allers-retours dans une salle de réunion déserte finiraient par paraître louches. Le mieux est encore de proposer à votre interlocuteur de le rappeler en soirée, quand vous serez tranquille (les recruteurs ne se formalisent pas si vous écourtez la conversation, ils savent bien qu’il est difficile de parler librement d’un autre emploi sur son lieu de travail).
Pour les entretiens, demandez à être reçu tôt le matin ou tard le soir. Sinon, essayez de les grouper sur un jour de congés ou de RTT. Des retards ou des absences répétées non justifiés risquent en effet d’attirer l’attention. Les jours de rendez-vous, soyez vigilant sur votre tenue ! Si vous travaillez tous les jours en costume ou en tailleur, pas de problème. Dans le cas contraire, vous devrez ruser, comme le fait Sophie, « property manager » dans une grande banque. De style plutôt « casual », elle emporte un tailleur et se change dans un café avant de se rendre à un entretien, afin que ses collègues ne se posent pas de questions.
- Anticipez les conditions de votre départ
Mieux vaut étudier assez tôt la question du préavis car le recruteur vous la posera dès le premier rendez-vous. La durée s’élève en général à trois mois pour les cadres. En cas de licenciement et parfois de démission (cela dépend des conventions collectives), vous pouvez cumuler les deux heures d’absence quotidienne auxquelles vous avez droit et réduire d’autant le préavis. Mais la plupart du temps, cet arrangement se négocie avec l’employeur, qui l’accepte ou pas. Renseignez-vous (toujours discrètement) sur la politique de votre entretien en la matière. Sinon, rassurez-vous : si c’est vraiment vous qu’il veut, votre futur employeur sera prêt à patienter quelques semaines.