Un étudiant français de 25 ans a remporté un prix de 150.000 euros du ministère de l’Environnement pour développer une idée ingénieuse : un détecteur de pesticides sur les fruits et légumes frais.
La saviez-vous ? En culture conventionnelle, une pomme de terre est traitée en moyenne 18,9 fois aux pesticides (herbicides, insecticides, fongicides, etc.) avant d’être mise sur le marché, une vigne 19,2 fois et une pomme… 35,1 fois ! Or, même si le caractère cancérogène du glyphosate – l’herbicide le plus utilisé au monde – fait débat au sein même de la communauté scientifique, d’autres, comme les insecticides malathion et diazinon, ont été classés “cancérogènes probables” chez l’homme par l’Organisation mondiale de la santé. Alors comment savoir quand on fait ses courses quels sont les fruits et légumes les plus contaminés ? Simon Bernard, étudiant en dernière année de l’École nationale supérieure maritime du Havre, a imaginé un dispositif nommé “Scan Eat”, pour détecter toute trace de pesticides et en mesurer la quantité directement sur les produits des étals des supermarchés. Une invention utile qui lui a valu le premier prix du concours “Greentech écoles”, organisé par le ministère de l’Environnement : il bénéficie ainsi non seulement d’un soutien financier de 150.000 euros, mais aussi d’un CDD de 9 mois au sein d’un incubateur du ministère afin de développer son invention et sa commercialisation.
Une technologie utilisée depuis peu
Quel rapport entre des études en école maritime et les pesticides ? Pas grand chose a priori, mais Simon Bernard est un curieux. “J’ai un diplôme d’ingénieur et une formation technique, raconte l’étudiant de 25 ans au journal Paris-Normandie. J’ai entendu parler d’une technologie, commercialisée l’an dernier, de spectromètre infrarouge miniaturisé à la taille d’une petite clef USB. Je me suis rendu compte qu’elle pouvait être utilisée pour détecter la présence et le taux acceptable ou non de pesticides dans les aliments de type fruits et légumes.” Dès 2014, la spectrométrie proche infrarouge miniaturisée a été utilisée par la start-up israélienne Consumer Physics pour développer Scio, un dispositif de poche qui permet de scanner plantes, nourriture ou médicaments, pour en connaître la composition moléculaire. La société Tellspec a également utilisé cette technologie pour faire apparaître sur smartphone – avec plus ou moins d’exactitude – le nombre de calories d’un plat qui se trouve dans son assiette.
Concrètement, pour utiliser “Scan Eat”, l’utilisateur commence par ouvrir sur son smartphone une application mobile dédiée, puis il scanne le fruit ou légume de son choix à l’aide d’un dispositif, pas plus grand qu’une clé USB. Ce dernier émet une lumière proche infrarouge à une longueur d’onde spécifique (entre 800 et 2500 nanomètres) qui va refléter la signature moléculaire de l’aliment (le faisceau est absorbé de manière différente par chaque groupement chimique, puis réfléchi par l’aliment pour être enregistré par un capteur situé à l’intérieur du dispositif). Les informations moléculaires obtenues sont traitées par des algorithmes pour qu’elles puissent être converties en taux de pesticides compréhensibles par les consommateurs sur leur smartphone. Des algorithmes que l’étudiant devra mettre au point durant son CDD au sein d’un incubateur du ministère.
Détecter des polluants dans l’eau ou l’air
“L’appareil pourrait détecter des traces de pesticides jugés dangereux et interdits depuis longtemps en France”, explique l’étudiant. Mais aussi fournir des indications sur le taux de concentration de pesticides et déterminer s’il est conforme aux normes en vigueur. Et ce n’est pas tout, puisque “Scan Eat” devrait servir au-delà de la détection des pesticides, à celle de différents polluants contenus dans l’eau ou dans l’air. Mais avant de mettre ce dispositif dans les mains de tous les consommateurs, Simon Bernard aimerait le faire tester à des sites spécialisés dans le déchiffrage des compositions alimentaires que l’on trouve sur Internet. “Ils pourraient alors générer des alertes sur les pommes de telle provenance, trouvées et testées positives dans telle chaîne de magasins”, anticipe l’étudiant. Si sa technologie fonctionne, ce dernier pourrait même bénéficier d’un deuxième financement du ministère de l’Environnement, allant jusqu’à 500.000 euros.
avec ciencesetavenir