BREXIT – Si l’on écoute certains économistes, un Brexit aurait tout de la boîte de Pandore. Le financier George Soros y voit l’origine d’un effondrement de la livre sterling de 15 à 20% et d’une récession pour la Grande-Bretagne. Pour Patrick Artus, économiste en chef de la banque Natixis, il va faire fuir les investisseurs étrangers pour plusieurs années.
Récession, effondrement monétaire, des banques et des bourses européennes dans la foulée, fuite des capitaux… En réalité, il est urgent de garder son calme. Ce n’est pas parce que le Brexit emprunte son nom au Grexit (Grèce + exit) qu’il faut en attendre le pire.
Voici les principales raisons pour lesquelles il faut avoir bien moins peur du Brexit que du Grexit.
1. La Grande-Bretagne ne fait pas partie de la zone euro
Il est essentiel d’insister sur ce point car il change tout. En 1992, lors de l’adoption du traité de Maastricht, le Royaume-Uni a tenu à garder la livre sterling. En revanche, la Grèce a abandonné la drachme le 1er janvier 2001.
Or, rien n’a été prévue pour une sortie organisée de la zone euro. Avec le Grexit, la Grèce aurait transformé cette monnaie en épouvantail à investisseurs. Si la Grèce peut quitter la zone, quel sera le prochain état à suivre son exemple? L’Italie? L’Espagne? Le Portugal?
Cette défiance aurait aussitôt fait flamber les coûts de financement des états de la zone euro. Si une obligation en euro peut être convertie en monnaie nationale du jour au lendemain, de combien peut-elle être dévaluée? Pour la Grèce, les estimations évoquaient une perte de 30, voire 50%.
Il y a bien un risque de dévaluation de la livre sterling, mais les estimations qui courent sont tellement imprécises (de -5 à -30%) qu’il faut les prendre avec précaution. Même avec une perte importante de 10%, son cours resterait au-dessusdu point le plus bas des 5 dernières années.
2. Les Britanniques sont deux fois moins endettés que les Grecs
Le Grexit aurait été synonyme de faillite et de défaut de paiement pour la Grèce. Concernant le Brexit, même le très pessimiste George Soros, qui a prédit un effondrement de la livre sterling et une récession, n’a pas osé parler de défaut de paiement.
Il n’y aura donc pas, ou peu, de spéculation sur les obligations du Royaume-Uni.
3. Son économie est l’une des plus solides d’Europe
Si la Grèce était sortie de l’Europe, elle se serait retrouvée avec une économie anémique, un chômage de masse et ruinée. Ce n’est pas forcément très différent de son état actuel, mais elle a au moins accès aux financements européens.
Concernant la Grande-Bretagne, tous les indicateurs clés sont au vert. Le taux de chômage est légèrement supérieur à 5%, et le taux de croissance de son PIB oscille entre 1,2 et 3% par an depuis 2010.
Le secteur industriel, qui emploit 21,6% de la population contre 12,4% en France, bénéficierait de la moindre dévaluation pour l’export.
4. La City va être chahutée mais a tout pour résister
Les banques de la City risquent effectivement bien d’être attaquées en bourse, et d’entraîner les places européennes à la baisse dès vendredi. Une sortie de l’Union européenne perturberait leur accès au marché continental, voire provoquerait le déménagement de certaines d’entre elles.
Mais aucune n’est menacée dans sa survie. “Dans le cas de la Grèce, les banques n’étaient pas saines, rappelle Christopher Dembik, économiste chez Saxo Banque. Au Royaume-Uni, elles le sont et il y a une bonne liquidité du marché.”
De plus, leur activité ne dépend pas entièrement de l’Europe, loin de là. D’après une analyse de GaveKal Research, “HSBC, par exemple [1ère banque européenne en capitalisation boursière, NDLR], doit les deux tiers de ses profits à l’Aise, dont près de 40% pour Hong Kong”.
5. Les traités européens s’appliqueront toujours en cas de Brexit
Entre défaut de paiement et sortie en pagaille de la zone euro, avec un potentiel effet domino, le Grexit aurait été cauchemardesque. Alors que l’éventualité du Brexit est prévue par l’article 50 du traité de Lisbonne, entré en vigueur le 1er décembre 2009.
Il stipule que le gouvernement britannique doit notifier son intention de quitter l’UE au Conseil européen avant de négocier avec elle les termes d’un nouvel accord. Surtout, l’article 50 précise que “les traités européens cesseront d’agir le jour de l’application de l’accord de sortie, ou, en cas d’échec, deux ans après la notification du gouvernement britannique”.
En clair, les Britanniques ne vont pas se réveiller étrangers à l’Union dès le 24 juin en cas de victoire du Brexit. A minima, si David Cameron prend l’initiative tout de suite, les accords européens s’appliqueront au Royaume-Uni jusqu’au 23 juin 2018, même si ses relations avec l’UE deviennent exécrables. Et si leurs relations restent bonnes, ils peuvent se mettre d’accord pour prolonger cette période.
Avec huffington post