La dernière édition de la South African Menswear Week (SAMW), qui lance la saison des défilés sud-africains, s’est tenue en février à l’hôtel de ville de Cape Town. Il s’agit de l’un des plus vieux bâtiments, construit en 1905, où le président Nelson Mandela a prononcé son premier discours en 1990 lors de sa sortie de prison. Biannuelle, la SAMW s’est forgée depuis 2015 une solide crédibilité auprès des professionnels locaux et internationaux alors que d’autres événements dédiés aux labels masculins, tel la Mens Fashion Week Nigeria, tentent de se développer. « Cette plateforme est précieuse parce que c’est probablement l’endroit le moins coûteux et le plus rapide pour prendre conscience que votre collection doit être livrée à temps et si vous ne livrez pas, il y aura des conséquences », explicite Mathew Kieser, le fondateur de la marque streetwear tendance Sol Sol, qui poursuit ses louanges : « Elle vous permet également de fréquenter des stylistes expérimentés qui défilent depuis des années. Vous pouvez ainsi comparer votre collection aux leurs et découvrir la distance qu’il vous reste à parcourir. » Même son de cloche du côté de Steven Rosenbaum, créateur du label Rosey & Vittori : « La SAMW travaille en amont avec les stylistes pour les aider à construire et à promouvoir leur marque. Il permet le développement du secteur de la mode sud-africaine et nous donne l’opportunité de lancer des collections sous les feux des projecteurs. »
En concurrence avec le monde
Le marché sud-africain de la mode est estimé à 2,7 milliards d’euros à l’horizon 2021. Certes, le segment masculin est réduit à la portion congrue, car les femmes ont tendance à acheter plus de vêtements, mais il a gagné du terrain au cours de la dernière décennie au diapason du reste du monde. La spécificité de ce marché, par rapport aux voisins africains, repose sur le choix fait par de nombreuses marques d’une mode unisexe où les hommes et les femmes n’ont pas à se conformer aux normes sociétales. À l’image de certaines collections automne-hiver 2018 lors de la dernière SAMW. Plus d’une vingtaine de labels ont répondu présent tel les sud-africains Augustine et Issa Leo, les zimbabwéens Ara Kani et Kidd Hunta ou encore l’anglo-nigérian Tokyo James. « Les marques africaines devraient avoir un impact plus important au niveau mondial », lance Anthony Smith, le fondateur du label culte 2Bop. Mais les défis sont nombreux à relever comme le détaille Mathew Kieser : « la géographie reste le plus gros problème. Une boutique de Milan va choisir une marque basée à Paris ou à Stockholm et une boutique de Hongkong va choisir une marque de Singapour ou de Kyoto parce que c’est tellement plus facile. Pourtant, il y a des stylistes talentueux ici et des magasins s’y intéressent, mais pas assez. » Néanmoins, l’enthousiasme reste de mise à la SAMW. Résumé par Mxolisi Mkhize, à la tête de House of St Luke : « Les gens embrassent leurs cultures et traditions africaines. Être différent est devenu passionnant et je crois qu’en termes de style, nous sommes en concurrence avec le monde. »
Avec lepoint