« Nous sommes bien loin de la petite entreprise familiale récupérée par Vincent Bolloré spécialisée dans le papier à cigarettes. La vision internationale du manager-successeur va en faire en moins d’un demi-siècle une des plus impérialistes entreprises française en Afrique. »
Une diversification et des rachats importants
En arrivant sur le marché Africain, le groupe Bolloré se rend vite compte que de nombreuses entreprises étrangères ont déjà une avance considérable dans de nombreux secteurs qui l’intéresse. L’état-major du groupe Bolloré décide donc de sortir de son activité initiale et d’intégrer toutes les activités porteuses et à forte valeur ajouté. Pour réduire l’écart, les alliances et les acquisitions vont se faire à un rythme effréné avec l’aide précieuse du grand financier français Antoine Bernheim, un ami de longue date. Ils adoptent une stratégie simple, s’introduire dans le capital des entreprises ou des groupes et peu à peu à franchir le pourcentage de participation qui leur permet de verrouiller le capital. Cela va être le cas avec l’acquisition de 11,5% des actions de la holding Rue Impériale de Lyon (qui contrôle les banques Lazard Paris, Londres et New York) jusqu’à y posséder 30% en Juillet 2000. L’acquisition en 1986 de 17% du capital de SDV (SCAC Delmas Vieljeux) par l’achat des parts détenues par AXA. C’est le même montage qui lui a permit au groupe Bolloré la reprise de SAGA en 1996 (alors n°2 de la manutention en Afrique). Puis suivra le contrôle du groupe Rivaud, une nébuleuse qui comprenait la célèbre « banque du RPR » et un gros portefeuille de plantations tropicales ; de même le rachat à l’ex-monopole français du tabac (la Seita) d’une participation faisant de Bolloré le numéro un de la cigarette en de nombreux pays d’Afrique. En 2003, alors que le groupe est déjà au contrôle de deux lignes de chemin de fer, en Côte d’Ivoire et au Cameroun, il se lance dans le mouvement de privatisation des ports initié par la Banque mondiale. De la manutention, il passe à la gestion d’infrastructures et prend avec ces opérations à long terme une option durable sur la croissance à venir et le trafic qui va avec. En ayant gagné la plupart des concessions attribuées depuis 2003, le français est désormais, en nombre, le premier opérateur portuaire du continent avec ses 14 ports. Sa marche forcée lui a permis de rattraper ses grands concurrents installés avant lui dans cette activité, tel le danois Maersk. Surtout implanté dans l’Ouest au départ,
Bolloré s’est beaucoup développé ces dernières années au Cameroun, au Nigeria, au Ghana, s’étend peu à peu vers l’Est et vers le Sud, et espère un nouvel appel d’air : la moitié des ports sont encore publics, tels ceux d’Afrique du Sud, du Soudan, ou du Kenya, où, comme en Egypte et en Algérie, Bolloré s’estime encore trop faible.
La consolidation de la marque ombrelle
« Ce qui fait la spécificité de notre groupe, c’est son implantation en Afrique ». Les propos du Vincent Bolloré le président du groupe illustrent l’enracinement de cette
pieuvre. Il y compte plus de 70 sociétés, implantées dans 35 pays (21 francophones et 14 anglophones) et emploie 15 000 personnes (parmi lesquelles 250 expatriés) dans le transport et la logistique, et 3 000 dans la branche tabac (en 1997). Disposant du plus grand réseau de transit et de logistique maritime et terrestre du continent avec trois sous secteurs : le transit par l’intermédiaire de la Scac (SDV), premier transitaire maritime et aérien français, qui a une implantation mondiale ; le transport maritime grâce à Delmas-Vieljeux, premier armateur privé français ; leader mondial sur l’axe
Nord-Sud, il exploite plus de 50 navires affrétés par SDV ; la division terrestre internationale (DIT) qui coordonne pour SDV toutes les implantations terrestres du groupe Bolloré en Afrique, le groupe touche à presque toutes les activités complémentaires du transport maritime ce qui lui permet d’offrir à ses clients, un service de transport intégré de bout en bout, de la sortie de l’usine jusqu’à la porte de
l’utilisateur final. Avec plusieurs entités créées et rachetées, il fallait remettre de l’ordre dans la maison. Ainsi en 2008, le groupe créé une marque unique pour regrouper toutes ses activités Bolloré Africa Logistics. Sous cette nouvelle enseigne,
il va construire autour toute la promesse et bâtir une image d’un pourvoyeur unique de solutions logistiques et transport. En quelques années, le groupe a multiplié son chiffre d’affaire par deux, passant de 1,5 milliard d’euros à plus de 3 milliards et un effectif de plus de 25.000 personnes. Il a engagé une campagne de recrutement, de formation et de détection de talents notamment par des accords passés avec des établissements comme l’Ecole polytechnique de Yamoussoukro, ou Sup de Co Dakar. Le groupe a aussi développé en propres ses centres de formation pour des métiers dont le contenu technique a évolué à l’exemple de gestion des portiques automatisés.
Avec aujourd’hui 80% de ses cadres d’origine africaine, le groupe a accéléré l’Africanisation pour mieux s’ancré dans son espace d’expression.
avec businessmanagementafrica