Sciences et technologies, Fondation d’une croissance inclusive sur le continent
Ces deux domaines, qui signifient « recherche » et « innovation permanente », bien promus et surtout financés, permettront d’accélérer la marche vers ce futur radieux que les experts de la planète prédisent à l’Afrique.
Le continent de l’avenir. Le marché de demain. De nombreux économistes de la planète utilisent ces termes pour décrire le continent africain. Avec le taux de croissance du produit intérieur brut le plus élevé au monde (5% en moyenne par an depuis 10 ans) et une démographie qui représentera d’ici 2050 le quart de la population mondiale, ils affirment que l’économie africaine sera la locomotive de l’économie mondiale pendant au moins les deux prochaines décennies. L’on remarque d’ailleurs que cette partie géographique du monde est devenue une terre de conquête pour les multinationales dans plusieurs secteurs. En s’implantant maintenant, elles occupent le terrain, en préparation des lendemains glorieux prédits ici et là.
Cependant, cette prospérité ne verra le jour sur l’ensemble du continent que si les Etats changent le cap de leurs politiques économiques. L’agriculture de base et l’extraction des richesses du sous-sol ne peuvent plus constituer le cheval de base des économies africaines. Elles ont montré leur incapacité à porter une croissance durable et inclusive pour l’ensemble des populations. Pour permettre à leurs pays respectifs d’atteindre le cap souhaité, les différents gouvernements devront commencer par adopter une politique de recherche scientifique très offensive. L’épistémologue Jacques Chatue souhaite même qu’on assiste à ce qu’il appelle « les états généraux de la science en Afrique ». C’est que, les innovations dans le monde, quel que soit le domaine, sont d’abord le fruit de la recherche dans les laboratoires universitaires et des instituts de recherche, indépendants ou non.
De nombreuses innovations conçues dans les milieux académiques
et de recherche ont permis à de nombreux Etats de bâtir une économie solide. Marc Zukerberg et trois de ses camarades conçoivent le très connu réseau social « facebook », alors qu’ils sont encore à l’université de Harvard. L’entreprise qui porte ce produit a annoncé, le 28 avril 2016, un bénéfice net de 1.51 milliard de dollars US en bourse. De quoi donner des vertiges aux startuppeurs africains qui savent qu’ils ont le potentiel pour performer autant. Seule différence avec leurs homologues d’ailleurs : le financement des idées dans les académies. Le Cameroun peut dire qu’il a, à travers l’inventeur du Cardiopad, Arthur Zang, son « zukerberg ». L’ingénieur de 28 ans élabore son invention, pendant qu’il est encore étudiant à l’École nationale supérieure polytechnique de l’Université de Yaoundé I. Alors qu’on se serait attendu à voir ce dernier encaisser des milliards de l’Etat et des investisseurs privés de son pays pour le pousser vers une installation complète de ses usines à « la maison », on s’aperçoit qu’il est « mollement soutenu ».
Initiatives sans soutien
Un compatriote d’Arthur Zang, Théodore Lejuste Abobda, envisage de marcher sur ses pas. Le 24 avril 2015, il soutient une thèse de doctorat en physique à l’Université de Yaoundé I. Son travail, reçu à l’unanimité des membres du jury avec la mention « Très honorable », crée le cœur artificiel le plus performant au monde. A la différence de ce qui existe sur le marché, son produit s’adapte aux émotions humaines.
Cependant, pour passer à la phase de fabrication et de test sur des sujets, le jeune chercheur de 30 ans a besoin que les industriels et le gouvernement de son pays l’appuient. Pour l’instant, ce n’est pas le cas. Or, l’on sait bien qu’en poussant cette initiative jusqu’au bout, le Cameroun s’enrichirait d’une industrie qui ferait des envieux. Ces exemples suffisent à montrer que le continent ne se donne pas suffisamment les moyens en vue de l’atteinte de ce que ses leaders appellent « l’émergence ».
Une politique volontariste de la science débouchera à terme sur la transformation des produits du sol et du sous-sol. D’abord, parce que bien financées, les académies produiront des innovations technologiques et des ressources humaines aux compétences pointues. Précisément, sur le point des RH, l’Afrique a la fâcheuse tendance de laisser partir ses cerveaux ailleurs, et de se contenter de confier le fleuron de ce qui existe comme industrie, aux européens, américains et asiatiques. Or, les économistes ne cessent de le répéter : sans industrie, pas de croissance durable et inclusive. C’est cette option qui fera en sorte que ces Etats cessent d’être de simples comptoirs de brocante importée d’Europe et d’Asie.
Heureusement, certains pays, à l’instar du Nigéria et de l’Afrique du Sud, montrent la voie.
L’économie numérique est une piste sérieuse pour la croissance des économies africaines. Les technologies de l’information et de la communication occupent déjà le devant de la scène à l’échelle mondiale. C’est partir pour durer. Des jeunes du continent, formés dans les académies classiques ou sur le tas, ont d’ores et déjà mis en place de nombreuses startups dans ce secteur. Mais la vitesse de croisière n’est pas encore atteinte. Dans le domaine, il apparaît urgent de doter une large frange de la jeunesse africaine de compétences de haut vol, pour lui permettre de saisir toutes les opportunités liées – par exemple – à internet. L’investissement dans la formation est le prix à payer. Les spécialistes parlent d’une contribution de cette nouvelle économie de l’ordre de 300 milliards de dollars US au PIB annuel de l’Afrique, d’ici à 2025. Les smartphones, d’ici à là, vont opérer une forte pénétration, envahissant également les zones rurales. Il y aura 900 millions de pièces en circulation dans 05 ans. Cela va multiplier la gamme de consommateurs à qui sont adressés des services en ligne, promus par des startups. Ces derniers, petites entreprises à fort potentiel de croissance, constitueront un vrai pôle de croissance.
Premières réussites
Les startups africaines de l’économie numérique inventent d’ores et déjà des solutions pour résoudre les problèmes d’ordre social, sanitaire, agricole, etc. Ces jeunes créateurs de pistes nouvelles ont réussi le pari de faire doubler les capitaux investis dans leurs entreprises. Globalement, l’on est passé de 12 millions à 26,9 millions de dollars US selon la société VC4 Africa. Cette croissance s’explique par l’augmentation des fonds placés en moyenne dans chaque structure. L’on est passé de 130 000 dollars US en 2013 à 200 000 dollars US en 2014. Ceci apparaît certainement comme le produit de l’action des incubateurs, lesquels poussent comme des champignons sur le continent. Il faut y ajouter les « hackatons », compétitions créatives financées par de multiples acteurs. Ceux-ci ont pour objectif d’attirer les talents et de faire surgir des idées d’applications numériques et de services nouveaux.
Ces compétitions qui permettent aux jeunes du continent africain d’éprouver leurs intelligences « numériques » sont à saluer. Evoquons quelques exemples. Il y a la Nasa Space Apps Challenge, organisée par la Nasa (National Aeronautics and Space Administration). Un événement porté par la startup n’Hub. La 4ème édition a eu lieu du 22 au 24 avril 2016 à Jos (Nord du Nigéria). Ce sont plus d’un millier de projets venant d’une centaine de pays qui s’affrontent chaque année depuis le début de la création de ce rendez-vous. Des initiatives comme celle-ci ont permis de mettre au devant de la scène des petites entités scientifiques et technologiques, à l’instar de l’ONG Béninoise Africa Rice. Cette dernière annonce pour le 07 avril 2016, le lancement de Rice Advice, une tablette disposant d’une application visant à aider les agriculteurs dans la culture du riz.
Le gouvernement kenyan a décidé de faire pousser du sol Konza City, aussi appelée « Silicon Savannah ». Située à 60 kilomètres de la capitale Nairobi, cette ville 100% numérique devra accueillir des startups, des investisseurs et des chercheurs dans l’optique de créer près de 20 000 emplois d’ici 2017. Dans la même lancée, les « startups weekend » se multiplient également. Ces manifestations permettent aux participants ayant des profils différents de se rencontrer, former des équipes et travailler sur des projets de création d’entreprises, lesquels seront ensuite présentés devant un jury de professionnels. D’autres actions de ce genre ont cours sur le continent. Les pays qui tardent donc à investir des moyens dans la formation des ressources humaines et l’encadrement des startups, en vue d’un épanouissement de leur économie numérique, doivent prendre le train en marche.
Landry Pany NANKAP
Fenêtres
F1
« De nombreuses innovations conçues dans les milieux académiques et de recherche ont permis à de nombreux Etats de bâtir une économie solide. Marc Zukerberg et trois de ses camarades conçoivent le très connu réseau social « facebook », alors qu’ils sont encore à l’université de Harvard. L’entreprise qui porte ce produit a annoncé, le 28 avril 2016, un bénéfice net de 1.51 milliard de dollars US en bourse. »
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« Une politique volontariste de la science débouchera à terme sur la transformation des produits du sol et du sous-sol. D’abord, parce que bien financées, les académies produiront des innovations technologiques et des ressources humaines aux compétences pointues. »
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« Les startups africaines de l’économie numérique inventent d’ores et déjà des solutions pour résoudre les problèmes d’ordre social, sanitaire, agricole, etc. Ces jeunes créateurs de pistes nouvelles ont réussi le pari de faire doubler les capitaux investis dans leurs entreprises. Globalement, l’on est passé de 12 millions à 26,9 millions de dollars US selon la société VC4 Africa. »
avec businessmanagementafrica