Déjà pénalisées par des difficultés d’approvisionnement, les huileries du pays sont concurrencées par des produits venus d’Asie du Sud-Est. Pour éviter la faillite, une seule solution : la diversification.
Elle a démarré en janvier et sera inaugurée en février. L ‘usine de transformation de Fludor permettra de décortiquer 5 000 tonnes de noix de cajou par an et emploiera 350 personnes, surtout des femmes. À terme, l’unité pourrait monter à 20 000 t/an et à 1400 salariés.
Dans un pays où moins de 15 % de la production nationale (110 000 t) est transformée, le leader béninois de l’huile de coton voit cet investissement de 10 millions de dollars (9,1 millions d’euros) comme une belle opportunité de croissance, mais aussi comme une manière de diversifier ses revenus, dépendants du coton et de sa transformation – une activité confrontée à de grandes difficultés au Bénin.
Le chiffre d’affaires des huileries Fludor a baissé d’environ 18 % par rapport à 2012, alors que la Société des huileries du Bénin (SHB), le second acteur du secteur, enregistre une perte sèche annuelle de 2 milliards de F CFA (3 millions d’euros) depuis la campagne 2013-2014.
« Nous ployons sous une chape de plomb qui pourrait nous obliger à fermer les seules industries du pays », constate Roland Riboux, le PDG, amer. En raison des retards dans le lancement des campagnes et le paiement des producteurs, les huiliers ont de plus en plus de mal à s’approvisionner en graines de coton. De plus, la Société nationale pour la promotion agricole (publique), qui en a le monopole, les vend 60 000 F CFA la tonne – un prix trop élevé pour les huiliers. Alors que leurs besoins atteignent 130 000 t de graines par an, ils ne parviennent à en acheter que 100 000 t. Pourtant, les producteurs d’huile assurent que des milliers de tonnes sont cédées, en fin de saison, à vil prix (20 000, voire 10 000 F CFA la tonne) aux cimentiers pour servir de combustible.
Mais c’est surtout la concurrence des produits importés d’Asie du Sud-Est qui plombe l’activité de Fludor et de la SHB. Alors que les besoins locaux en huile sont évalués à 120 000 t par an et que la production nationale est estimée à 20 000 t, les importations d’huiles s’établissent, selon la douane béninoise, à… 900 000 t !
Pays de transit
En réalité, tout n’est pas écoulé localement, soutiennent les acteurs du secteur. Le Bénin n’est, selon nos informations, qu’un pays de transit vers le Nigeria voisin, où la demande totale est estimée à plus de 2,5 millions de tonnes par an pour une production locale de 800 000 t. Pour contourner les taxes et autres droits de douane, les importateurs utilisent un système frauduleux : ils font venir l’huile dans les ports de certains pays de la région, où ils la reconditionnent avant de l’acheminer vers le Bénin comme s’il s’agissait d’un produit fabriqué dans la zone Cedeao. De ce fait, le coût d’un bidon de 25 litres d’huile revient à environ 11 900 F CFA à l’importateur, contre 15 272 F CFA pour les producteurs locaux.
« Nous reconnaissons les difficultés des industries locales et examinons des solutions », concède Komi Koutché, ministre d’État béninois chargé de l’Économie et des Finances. Il y a quelques mois, Fludor Bénin et la SHB avaient demandé une subvention qui serait financée par le prélèvement de 2 F CFA sur chaque litre d’huile importé, sous peine de se déclarer en faillite. « Nous ne demandons pas l’abandon du système actuel de taxation, qui génère d’importants revenus pour l’État [environ 58 milliards de F CFA], précise Roland Riboux. Le prélèvement devrait permettre de mobiliser 1,8 milliard de F CFA de subventions convertibles, par exemple en avoir fiscal, ce qui compenserait nos pertes. »