Ce n’est un secret pour personne : l’Afrique regorge de ressources naturelles, qu’elles soient minérales, animales ou végétales.
Est-elle pour autant riche de celles-ci ? Là non plus, la réponse ne fait aucun mystère. Et pour cause : les matières premières extraites des sous-sols africains sont intégrées en aval des chaînes de production mondialisées par des acteurs multinationaux, qui les exportent brutes vers d’autres continents pour y être transformées. C’est au cours de ces processus de transformation que se crée à l’extérieur une valeur qui échappe aux producteurs africains.
Cette étape manquante dans la chaîne d’export international est pourtant doublement bénéfique, puisqu’elle permet de retenir une proportion substantielle de profits sur le continent, tout en dynamisant l’activité économique locale, source d’emplois pour les populations et de travail pour les entreprises. C’est le cas de l’industrie du bois, dont l’exemple doit servir de leçon tant il est flagrant et terriblement représentatif du gigantesque manque à gagner des économies africaines.
Diversification économique
Comme les minerais, le pétrole, la faune et la flore, le bois est une ressource précieuse pour notre économie, mais aussi et surtout pour la préservation de notre biodiversité et de notre patrimoine. Or, les trois quarts de la production du bois africain partent vers l’Asie par le biais de près de trois cents entreprises, qui génèrent un chiffre d’affaires annuel estimé à 6 milliards de dollars. À l’image de Madagascar, qui a perdu 80 % de sa surface forestière en un siècle, 9 millions d’hectares de forêts ont ainsi disparu en Afrique entre 2000 et 2013, une quantité trop importante pour être légale.
La déforestation se limite à 0,02 % par an grâce à la courageuse politique nationale mise en œuvre pour protéger les forêts gabonaises
Outre les conséquences désastreuses sur l’environnement et les populations locales, cette exploitation déraisonnable de nos ressources représente également l’équivalent de 10 milliards d’euros de recettes fiscales évanouies pour les pays producteurs, d’après les estimations de la Banque mondiale. Avec 88 % de son territoire recouvert de forêt et 8 % de la production mondiale de bois en sa provenance, le Gabon demeure l’un des pays d’Afrique les plus menacés par la déforestation. Pourtant, ce phénomène se limite à 0,02 % par an grâce à la courageuse politique nationale mise en œuvre depuis plus de quinze ans pour protéger les forêts gabonaises.
Dès 2000, l’ex-président Omar Bongo a ainsi acté la création d’un Code forestier, de treize parcs naturels et d’une Agence nationale des parcs nationaux. Ali Bongo Ondimba, actuel président de la République du Gabon, a poursuivi et étendu l’action de son prédécesseur en favorisant, dès son accession à la présidence, l’adoption d’un arsenal législatif draconien, notamment en matière d’aménagement des forêts, reboisement et certification des concessions forestières. En 2010, il lance le Plan Stratégique Gabon Émergent (PSGE) ; parmi les objectifs prioritaires à l’horizon 2025, la diversification de l’économie nationale visait à accroître la contribution des secteurs non-pétroliers tels que l’industrie, les services, l’agro-alimentaire, l’agriculture au PIB, et assurer ainsi au pays de nouveaux relais de croissance créateurs d’emplois. La réduction progressive de notre dépendance vis-à-vis des énergies fossiles et la préservation de notre biodiversité unique au monde permettront de garantir la pérennité de cette croissance pour les générations futures.
Bien que tournée sur le long terme, cette stratégie s’est déjà avérée payante car elle a permis au Gabon d’amortir le choc conjoncturel lié à la chute des cours du pétrole. En effet, depuis 2010, les investissements directs étrangers (IDE) ont doublé, stabilisant la croissance de l’économie gabonaise autour de 5,9 % par an et favorisant la création de 60 000 nouveaux emplois. Dans son rapport du 26 février 2016, le Fonds monétaire international (FMI) n’a d’ailleurs pas manqué de « valide[r] les efforts déployés par les autorités ces dernières années afin de rendre le Gabon moins tributaire de la manne pétrolière ».
« Gabon industriel »
Le secteur du bois est une fois de plus un excellent symbole de cette mutation en cours de l’économie gabonaise. En 2009, il était le principal créateur d’emplois dans le secteur privé, avec environ 20 000 postes pourvus. Seulement, dans le même temps, il créait peu de valeur ajoutée, car 82 % de la production était exportée en grumes sans aucune transformation. Ce modèle était d’autant moins durable que la ressource était littéralement gaspillée, seul 20 % d’un arbre abattu étant exploités.
Sous l’impulsion d’Ali Bongo Ondimba, le gouvernement a pris dès 2009 la décision d’arrêter l’exportation des grumes et s’est résolument engagé dans une politique de première et deuxième transformation. Aujourd’hui, le Gabon dispose d’une Zone Économique Spéciale de rang international, dédiée en particulier à la transformation du bois. Dans ce secteur, notre Stratégie Nationale d’Industrialisation vise à créer cinq fois plus de richesse et quatre fois plus d’emplois en 2025, tout en réduisant la surface forestière exploitée de 13 à 11 millions d’hectares, afin de préserver l’équilibre écologique. Cet exemple illustre parfaitement notre crédo économique, qui est de faire plus avec moins tout en protégeant notre capital naturel pour les générations futures.
Le Gabon devrait atteindre une capacité énergétique de 1 000 MW d’ici la fin de l’année, soit le double d’il y a six ans
Tout comme la filière bois, la production d’une énergie propre est capitale pour la préservation des ressources naturelles, et joue un rôle important dans l’émergence du « Gabon industriel » qui ne peut s’opérer sans une couverture de qualité en électricité. Au cours des cinq dernières années, nous avons ainsi privilégié l’utilisation d’énergies renouvelables pour soutenir l’essor industriel de notre pays. Grâce à la construction de plusieurs barrages hydroélectriques, le Gabon devrait atteindre une capacité énergétique de 1 000 MW d’ici la fin de l’année, soit le double d’il y a six ans. En 2025, 80 % de l’électricité produite sur le territoire gabonais proviendra d’énergies renouvelables, contre 40 % actuellement. Les émissions totales de gaz à effet de serre seront réduites de 62 % par rapport à 2010, tandis que la croissance démographique atteindra 2,5 % par an.
Ali Bongo Ondimba était d’ailleurs à New-York, le 22 avril dernier, pour signer l’Accord de Paris sur les changements climatiques adopté en décembre 2015. Au-delà du seul cas gabonais, il a tenu à rappeler la promesse faite par les pays industrialisés, lors de la COP21, d’engager 100 milliards de dollars pour aider le continent africain à lutter contre le réchauffement climatique, alors qu’il n’est responsable que de 4 % des émissions de gaz à effet de serre – 0,02 % pour le Gabon. « Une question de sécurité régionale » pour l’Afrique, selon le président de la République, qui pointe du doigt l’augmentation des températures de 1°C ces quarante dernières années dans la zone sahélo-saharienne.
Progrès socio-économiques
Le nouveau modèle de développement promu par Ali Bongo Ondimba concilie donc croissance économique, bien-être social et préservation de l’environnement, pour offrir à tous les Gabonais une véritable égalité des chances. Au cours des six dernières années, nous avons engagé les réformes sociales qui ont permis l’égalité d’accès aux soins élémentaires à près d’un million de personnes. Le maillage intégral du territoire à travers l’extension continue du réseau routier assure désormais aux populations un égal accès aux opportunités commerciales et à l’emploi car nous sommes convaincus que l’augmentation de l’offre de travail contribue à promouvoir l’inclusion des populations.
Les bailleurs de fonds internationaux saluent la pertinence des choix économiques du Gabon pour sortir d’une économie de rente pétrolière
Cette dimension inclusive de la croissance économique s’inscrit dans une vision prospective consacrée dans la loi portant « Orientation du développement durable » promulguée le 1er août 2014 par le chef de l’État. Le texte entérine définitivement l’intégration totale des dimensions économique, sociale et environnementale dans la mise en œuvre des politiques publiques au Gabon. Les bailleurs de fonds internationaux, au premier rang desquels le FMI, s’accordent aujourd’hui pour saluer la pertinence des choix économiques du Gabon pour sortir d’une économie de rente pétrolière.
Plus encore que cette reconnaissance, les progrès socio-économiques enregistrés par le Gabon au cours de ces cinq dernières années plaident définitivement en faveur d’une croissance verte et durable. L’expérience gabonaise en la matière constitue une rupture qui doit servir d’inspiration aux pays africains, dont les économies sont trop souvent exclusivement adossées sur les industries extractives, et également, j’en suis convaincu, aux pays développés qui réfléchissent actuellement aux modalités de mise en œuvre d’une transition énergétique économiquement vertueuse.
Avec Jeune Afrique.