Au début des années 2000, les spécialistes de la finance Evgueni et Elena Diomine, qui à l’époque n’avaient pas encore 25 ans, sont arrivés du territoire de Krasnodar (sud de la Russie) à Moscou pour y lancer leur marque, SPLAT.
« Notre société s’est focalisée dans un premier temps sur la fabrication d’additifs biologiquement actifs et de produits de beauté à base d’algues bleues Spirulina Platensis, d’où l’appellation SPLAT », a raconté Evgueni Diomine.
Evgueni et Elena Diomine. Crédit : service de presse
Toutefois, les jeunes entrepreneurs « se sont toujours fixé des objectifs plus ambitieux » et ont décidé de se tourner vers la fabrication de dentifrices de nouvelle génération. « On s’est dit qu’on devait fabriquer le meilleur dentifrice au monde afin que les impressions liées à son utilisation dépassent les attentes », a poursuivi Evgueni Diomine.
Au début des années 2000, les deux entrepreneurs ont loué une usine non loin de Moscou. En 2009, ils ont lancé leur propre entreprise dans la région de Novgorod (à environ 500 kilomètres au nord-ouest de Moscou) qui emploie aujourd’hui plus de 350 personnes. La société emploie au total 1400 personnes, y compris le personnel des représentations à l’étranger.
SPLAT en France
Sept dentifrices SPLAT de la série Special (Blackwood, Extreme White,Organic et Sea Minerals) sont proposés dans 210 hypermarchés Carrefour de France.nnEn outre, les produits dentifrices SPLAT sont vendus dans 310 supermarchés Carrefour de l’Hexagone, d’après le service de presse du producteur.
Le bon créneau
Au début, le dentifrice SPLAT coûtait deux fois plus cher que les dentifrices des concurrents dans les supermarchés. L’entrée dans le segment haut-de-gamme, pratiquement libre de toute concurrence, est devenue l’une des principales composantes du succès, affirme Alexandre Ieriomenko, directeur gérant de l’agence BrandLab. Selon lui, le créneau démocratique, le plus vaste, était déjà occupé par deux poids lourds internationaux, Procter&Gamble et Colgate, tandis que les producteurs russes qui ont survécu devaient fabriquer du dentifrice à bas prix. « Dans le haut-de-gamme, il n’y avait pratiquement personne, seulement Lacalut », a-t-il ajouté.
Outre les dentifrices classiques, à 2,2 euros le tube, SPLAT propose des produits de luxe à 4 euros dont une pâte noire à base de charbon de Carélie et une autre avec extraits de diamants et de l’or colloïdal. Ces deux derniers produits ont un très grand succès en Allemagne. Ces compositions uniques sont réalisées par le laboratoire scientifique de l’entreprise et un centre de recherches à Moscou.
SPLAT exporte ses produits depuis 2008. L’année dernière, les ventes à l’étranger ont garanti entre 17% et 20% de ses recettes. L’un des plus gros marchés étrangers est la Turquie où la société russe a réussi à signer un contrat exclusif avec l’un des principaux réseaux de distribution de parfumerie et cosmétique du pays. En Chine, SPLAT a au contraire décidé de se passer de partenaires et travaille en solo sur le marché, a précisé son service de presse. La société détient aujourd’hui plus de dix brevets russes et internationaux.
Des lettres tenant lieu de publicité
Les indicateurs financiers de la société ne sont pas divulgués. SPLAT occupe 17% du marché en termes de ventes, a indiqué l’analyste financier de Finam Timour Nigmatoulline. La société doit son succès à une stratégie marketing unique, a-t-il affirmé.
En effet, cette stratégie est très intéressante : la société n’a jamais recours à de la publicité à la TV et se concentre plutôt sur de nouvelles ventes à la clientèle fidèle. « Ne disposant pas d’argent pour faire de la publicité, la société s’est focalisée sur la qualité et l’innovation », a indiqué Alexandre Ieriomenko. Un dentifrice de couleur noire, des composants inédits et des goûts insolites, c’est aussi du marketing qui exige une recherche ininterrompue et des expériences, a-t-il fait remarquer. Selon lui, dans lesegment haut-de-gamme, le consommateur apprécie l’innovation et est prêt à payer.
L’approche de la fidélité est elle aussi assez intéressante : chaque étui carton de dentifrice SPLAT contient une lettre du directeur général, Evgueni Diomine. Chaque message se termine par son adresse courriel et Evgueni affirme qu’il répond lui-même à toutes les lettres.
« Les messages touchants du directeur à l’intérieur de l’étui donnent un sentiment de responsabilité personnelle du producteur envers le client et assurent une approche de qualité et un bon résultat de la société sur le marché », a constaté Alexandre Ieriomenko.
Dentifrice mais pas seulement
La production de SPLAT est aujourd’hui très diversifiée. L’entreprise de la région de Novgorod, dont la superficie est actuellement de 5 000 m2, fabrique plus de 200 produits différents, notamment des dentifrices, des brosses à dent, des mousses dentifrices et des bains de bouche, mais aussi des articles d’entretien de la ligne écologique BioMio, des cosmétiques naturels avec des ingrédients bio pour les petits et leurs mamans Lallum Baby et une série de shampooings et d’après-shampooings HEYA.
Crédit : service de presse
Crédit : service de presse
HEYA est l’une des dernières innovations de SPLAT et la fierté de l’une des fondatrices de la société, Elena Diomina.
« L’idée de créer des produits pour la santé et la beauté des cheveux, uniques en leur genre et efficaces comme tous les produits SPLAT, est née depuis longtemps, mais notre équipe a mis cinq ans à la matérialiser »,confie-t-elle.
Selon elle, le marché propose aujourd’hui un très grand nombre de produits de soin pour les cheveux, mais SPLAT voulait à tout prix faire des produits les plus naturels possible, sans silicones ni parabènes. Pour élaborer la composition de la série HEYA, la société a eu besoin de plus de temps que nombre de producteurs modernes, a-t-elle poursuivi. Toutefois, elle se dit satisfaite du résultat. « Nous ne concurrençons pas les autres producteurs de soins pour les cheveux parce que, sans fausse modestie, nous estimons que les nôtres sont uniques en leur genre et inimitables », a-t-elle dit.
Le marché russe est assez grand pour l’apparition d’entreprises nationales même sur fond de conjoncture économique défavorable et de climat d’investissement compliqué, a expliqué Timour Nigmatoulline. « La société SPLAT n’est pas l’unique exemple, on peut citer également (l’usine automobile) OuAZ, les motos Oural, une grande liste de médicaments d’usines locales ainsi que des pâtisseries », a-t-il noté.
« En réalité, SPLAT c’est une histoire sans aucune magie, la matérialisation d’une stratégie marketing saine accessible à n’importe quel producteur », a affirmé Alexandre Ieriomenko. Selon lui, les auteurs du projet ont fait preuve de lucidité et de persévérance dans la réalisation de leur idée. « Le grand problème de la majorité des sociétés russes n’est pas l’absence de bonnes idées, mais le fait de courir dans tous les sens. Quant à SPLAT, une fois sa stratégie choisie, la société l’a appliquée avec patience », a-t-il souligné pour conclure.
fr.rbth.com