Les députés tunisiens ont accepté la proposition du Premier ministre Youssef Chahed et validé la nomination de Marouane Abbassi à la tête de la Banque centrale. Le successeur de Chedly Ayari aura donc la lourde charge de la maîtrise de l’inflation et d’obtenir la sortie de la Tunisie de la liste noire en matière de blanchiment d’argent et de corruption établie par le Parlement européen.
Sans surprise, 134 députés sur 157 présents ont approuvé jeudi 15 février la proposition du chef du gouvernement Youssef Chahed, avalisée par le président de la République, Béji Caïd Essebsi : Marouane Abbassi sera donc le nouveau gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), pour un mandat de six ans.
À 58 ans, le successeur de Chedly Ayari, qui a démissionné la veille, est bien connu des circuits de la finance internationale. Cet ancien de la Banque mondiale a été un temps pressenti au poste de grand argentier du pays. Professeur visiteur à l’Université de Tsukuba au Japon, et au Rensselaer Polytechnic Institute de New York (USA), ce père de deux jeunes filles a marqué ses étudiants lors de son passage à l’Université de Carthage en 2007.
Ancien de la Banque mondiale
Ancien économiste principal à la Banque mondiale (BM), ce Tunisois discret et affable avait coordonné en 2008 le programme pour la Libye, avant d’être désigné en 2010 représentant de l’institution pour ce pays. Un poste qui fait de ce docteur en économie, bardé de diplômes de l’Université de Paris I Panthéon Sorbonne, dont un mastère en économie mathématiques et économétrie et un mastère en agroéconomie, l’une des figures les plus en vue de la sphère des spécialistes maghrébins en économie et finances.
Conseiller principal à l’Institut arabe des chefs d’entreprises (IACE), expert pour l’Institut tunisien des études stratégiques (ITES) et conseiller économique auprès du ministre du Commerce, du Tourisme et de l’Artisanat, chargé de piloter les projets de développement des exportations financés par la Banque mondiale, Marouane Abbassi avait été pressenti pour le portefeuille de ministre des Finances dans le deuxième gouvernement d’union nationale, mais avait été jugé « trop académique » par certains partis, qui lui ont préféré Ridha Chalghoum.
Établir une politique monétaire cohérente
La tâche de Marouane Abbassi sera ardue : il doit maîtriser l’inflation (qui a dépassé 5 % sur l’ensemble de l’année 2017), réduire les déficits de la balance commerciale (actuellement de 14 milliards de dinars, soit 4,8 milliards d’euros) et de la balance des paiements, établir une politique monétaire cohérente pour la Tunisie, en finir avec la dévaluation du dinar et travailler à ce que l’Union européenne revienne sur son classement de la Tunisie parmi « les États susceptibles d’être fortement exposés au blanchiment de capitaux et au financement du terrorisme ».
C’est d’ailleurs ce dossier qui avait valu l’ouverture d’une procédure de révocation à l’encontre de son prédécesseur, Chedly Ayari. Mais ce dernier a préféré démissionner, le 15 février, plutôt que d’en attendre l’issue.
Pour mener à bien les chantiers qui l’attendent, Marouane Abbassi, qui a déclaré « ne pas être un optimiste naïf », devra composer avec le gouvernement, mais également avec des élus qui l’ont mis en garde contre les diktats du Front monétaire international (FMI). Le tout en préservant l’indépendance de la BCT, symbole des institutions souveraines de la Tunisie indépendante.
Avec jeuneafrique