À l’occasion de la journée mondiale contre le travail des enfants, l’ONG Human Rights Watch s’alarme de l’exploitation des plus jeunes dans ces mines et de leur dangerosité pour leur santé physique et morale.
Alors que se tient ce vendredi la Journée mondiale contre le travail des enfants, l’ONG Human Rights Watch publie unrapport inquiétant sur l’exploitation des jeunes de moins de 18 ans dans les mines au Ghana qui permettent d’extraire l’or utilisé dans la fabrication de bijoux et dans l’électronique dans le monde.
Si la loi ghanéenne interdit le travail des enfants de moins de 15 ans ainsi que le travail pénible et dangereux comme dans les mines pour les moins de 18 ans, la pauvreté familiale reste l’une des causes principales de ce phénomène. Les enfants sont souvent envoyés dans les carrières par leur famille pour réussir à payer l’école, comme en témoigne Adama, 14 ans. «J’ai commencé à travailler à l’âge de 10 ans. Mon père est mort et ma mère n’était pas capable de s’occuper de nous. J’ai réalisé que les autres enfants allaient à la mine pour aider leur famille et aller à l’école, alors j’ai décidé de les rejoindre». Même si l’école primaire est gratuite au Ghana, les familles doivent tout de même payer des manuels ou le déjeuner à la cantine.
Or, combiner le travail et l’école est difficile pour beaucoup d’enfants qui n’ont plus le temps d’étudier chez eux, relève l’ONG. La moitié des enfants ne va donc pas à l’école régulièrement, se privant ainsi de leur droit à l’éducation et donc diminuant leurs chances d’obtenir un emploi à l’âge adulte.
Les ravages du mercure
Mais les menaces qui pèsent sur ce travail des enfants ne se limitent pas à leur avenir professionnel. L’ONG, qui a conduit ses recherches depuis 2013 dans les mines d’or de trois régions du Ghana (la région Occidentale, la région Centrale et celle d’Ashanti) insiste également sur le fait que le travail dans les mines provoque d’intenses douleurs physiques. La moitié des 44 enfants âgés de 9 à 17 ans interrogés ont confié avoir des douleurs permanentes dans tout le corps. Les mines poussiéreuses peuvent également provoquer des problèmes de santé sur le long terme, comme l’explique Samuel, 16 ans, qui travaille dans les mines depuis l’âge de 11 ans. L’adolescent évoque l’«inhalation de poussière et de fumée des machines» qui provoquent «du sang dans ma salive qui peut durer plus d’une semaine». À ceci se rajoute la forte exposition au mercure qui permet de séparer l’or des autres minerais, mais qui attaque le système nerveux et peut causer des handicaps à vie, dont des dommages cérébraux.
HRW met aussi en lumière l’exploitation sexuelle de certaines jeunes filles dans ces mines, qui représenteraient un tiers de la production du secteur, selon le rapport de 82 pages. Ellen, 15 ans, affirme ainsi avoir été souvent approchée. «Quelques hommes veulent être avec moi, quelques autres me touchent. Je refuse mais ils insistent. Ils me touchent la poitrine et les fesses, je me sens mal, mais je ne peux rien faire». Human Rights Watch rapporte également le cas d’une jeune femme de 14 ans tombée enceinte dans une mine et qui a dû se déscolariser.
Une critique adressée aux raffineurs et aux gouvernements
Fort de ce triste constat, Human Rights Watch a examiné les politiques et les procédures de six raffineurs internationaux qui achètent de l’or au Ghana, l’un des 10 premiers pays producteurs d’or au monde. L’ONG dénonce notamment des faiblesses dans les procédures et un manque fréquent de contrôle et de vigilance. À une échelle plus locale, trois des quatre plus grandes sociétés d’exportation du Ghana ont reconnu qu’elles avaient parfois acheté de l’or dont elles ne pouvaient pas retracer le parcours.
L’ONG vise également le gouvernement ghanéen. Elle épingle entre autres la légalité du mercure dans le pays. Bien qu’il soit nocif pour les plus jeunes, il est vendu légalement dans les magasins spécialisés. Un traité international, la Convention de Minamata de 2013, liste des mesures pour réduire l’exposition mais le Ghana ne l’a pas ratifiée.
L’ONG propose enfin diverses recommandations adressées aux raffineurs et aux gouvernements. Pour les compagnies, elle prévoit de renforcer les procédures de «diligence raisonnable» (vérification de la légalité des transactions par l’acquéreur) pour identifier les risques du travail des enfants ou encore multiplier les surveillances et inspections. Le gouvernement ghanéen, lui, se voit adresser de multiples conseils à commencer par faire respecter l’interdiction du travail des enfants dans les mines, améliorer leur accès à l’éducation ou encore mettre en place une politique de sécurité préventive.
PME PMI MAGAZINE avec LE FIGARO