Khadija Haddane, 50 ans, enseigne l’arabe dans une école primaire de Tinghir, petite ville berbère du sud-est du Maroc. Elle dispose d’un salaire de 10 658 dirhams par mois, soit 977 euros. Dans ce nouvel épisode de notre série sur l’argent des Africains, elle nous ouvre son portefeuille.
Aujourd’hui, les enfants de Khadija ont déserté la maison familiale. Ils sont partis faire des études à Casablanca. L’éducation de ses deux fils lui tient à cœur, tout comme la formation des jeunes élèves de sa ville, dans laquelle elle est très impliquée au niveau professionnel, bien sûr, mais aussi associatif.
Originaire de Safi, dans l’ouest du Maroc, Khadija a quitté sa ville natale pour faire des études de géologie à Marrakech. Mais très vite, elle passe des concours pour devenir institutrice. Cela fait maintenant 25 ans qu’elle enseigne l’arabe à l’école primaire de Tinghir.
Salaire mensuel : 977 euros
Dans un pays où le salaire moyen est estimé à environ 400 euros, Khadija n’est pas mécontente de ses 977 euros mensuels. Son salaire actuel est bien loin de celui de ses débuts. Ses premières années d’exercice ne lui rapportant que 210 euros tous les mois, elle a décidé de passer des concours et de changer de grade au fil des ans. Son salaire a ainsi doublé en 2005 et a continué d’évoluer chaque année, jusqu’à son revenu actuel.
Éducation des enfants : 735 euros
Alors que son mari s’occupe du loyer de la maison et des factures, Khadija prend en charge l’éducation des enfants. Ce qui pèse lourdement sur son salaire. Depuis que ses deux fils Ahmed et Amine sont partis faire des études supérieures à Casablanca, les trois quarts de son revenu leur sont dédiés. « Ce qui me coûte le plus cher, ce n’est pas tant le loyer de leur chambre ou les études de médecine d’Amine, c’est l’école privée d’Ahmed ! Il a décidé de faire une école supérieure de psychologie, ça représente beaucoup d’argent… Mais les études, c’est très important ! », s’exclame l’enseignante marocaine. 550 euros sont exclusivement destinés à payer les frais de scolarité d’Ahmed. Le reste se répartit entre le loyer de la chambre, les factures, les frais de transport et l’argent de poche des deux enfants.
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Alimentation : 182 euros
Pour s’acheter à manger, Khadija dépense environ 182 euros chaque mois. « L’école où je travaille est située juste à côté de ma maison, à 10 minutes à pied. Donc si je veux, je peux rentrer déjeuner chez moi tous les midis », explique l’enseignante.
Vie associative : 36 euros
Depuis deux ans ses enfants sont loin, et son mari ne rentre que le weekend à cause de son travail. Khadija peut donc occuper tout son temps libre avec une vie associative extrêmement dense. « J’étais obligée de travailler pour me sentir moins seule. En plus, ces activités me rendent vraiment heureuse », glisse-t-elle comme une confidence.
Quand sonne la sortie des classes, sa journée est loin d’être terminée. Présidente de Dar Taliba, la Maison de l’étudiante à Tinghir, elle doit gérer ce pensionnat qui accueille les jeunes filles rurales désirant poursuivre leurs études secondaires. Elle s’occupe également de l’Association marocaine des droits de l’homme à Tinghir, ainsi que de l’association de lutte nationale contre l’alphabétisme pour les femmes, pour ne citer que celles-ci.
« Je dédie une petite part de mon salaire aux associations pour pouvoir organiser des ateliers et couvrir certains frais, comme les transports en taxi », annonce Khadija. Elle avoue dans un éclat de rire ne pas trop faire ses comptes à ce sujet. « Ça dépend des mois, je donne un peu sans compter ! ». En faisant une moyenne à l’année, 36 euros partent environ chaque mois dans ses multiples associations.
Sorties : 9 euros
Ayant peu de temps pour elle, Khadija ne sort que rarement pour se divertir. Elle confie tout de même aller de temps à autre au restaurant avec ses amis du monde associatif. Budget estimé : 9 euros.
Dépenses diverses : 15 euros
Les fins de mois sont généralement difficiles pour cette enseignante marocaine. S’il lui reste un peu d’argent, souvent autour de 15 euros, elle le consacre à l’achat de vêtements, de médicaments, ou aux simples courses du quotidien. « Mais bon, heureusement que mon mari ou la famille est là, on s’entraide si jamais nous n’avons pas assez ! », conclut-elle le sourire aux lèvres.
Taux de conversion établi à 1 euro = 10,98 dirhams marocain.
avec jeuneafrique