Les mesures fiscales du gouvernement pèsent sur le pouvoir d’achat des ménages en ce début d’année, mais ce ne sera plus le cas fin 2018, bien au contraire. La consommation des Français dépend de leur anticipation de ce futur gain. Cela est important, car les autres contributeurs de la croissance se portent bien, selon l’Insee.
L’année 2017 s’est bien terminée avec une croissance de 2%. Et 2018 s’annonce quasiment aussi bien. L’acquis de croissance* à la mi-année devrait être de 1,6%, selon les projections de l’Insee dans sa note de conjoncture publiée ce mardi. Si l’économie parvient à tenir le rythme, la France pourrait se rapprocher de sa performance de l’année passée et afficher un taux de croissance de 1,9% fin 2018.
Pour atteindre au moins ces 1,9%, tout va dépendre de la façon dont les Français vont gérer leurs économies et choisir de consommer ou non. Car les autres composantes de la croissance, qu’il s’agisse des investissements des entreprises et même du commerce extérieur, sont suffisamment encourageants.
L’investissement “tonique” des entreprises
Face à un commerce international vigoureux (+5,2% en 2017, contre +1,6% en 2016), les entreprises françaises doivent augmenter leurs capacités de production si elles veulent suivre la cadence. D’autant qu’avec les baisses d’impôts mises en œuvre par Donald Trump, les importations américaines devraient augmenter et stimuler les échanges internationaux.
Les chefs d’entreprises de l’Hexagone demeurent très optimistes. L’indice du climat des affaires, qui mesure leur confiance, a légèrement fléchi en début d’année mais reste à son plus haut depuis 2011. Résultat, l’Insee prévoit une progression acquise de l’investissement de 4,1% au premier semestre 2018, soit déjà plus que sur l’ensemble de l’année 2016 (+3,4%) et presque au niveau de 2017 (+4,4%).
Les investissements des entreprises vont contribuer autant à la croissance que la consommation des ménages, moteur historique de l’économie française.
Le commerce extérieur ne pèsera pas toute l’année sur la croissance
Pour le commerce extérieur, la situation est plus progressive. Après une fin d’année exceptionnelle, grâce aux livraisons d’avions, les exportations ont beaucoup ralenti (passant de +2,4% au quatrième trimestre 2017 à +1% au premier trimestre 2018). En conséquence, le commerce extérieur français n’est pas en bonne forme en ce début d’année et pèse sur la croissance.
En revanche, les exportations devraient se redresser et afficher un acquis de croissance de 4,3% mi-2018, soit plus qu’en 2017 (+3,3%). Couplée au fait que les Français vont moins acheter de produits importés (donc faire baisser les importations), cette hausse des exportations devrait amener à un relèvement du commerce extérieur (+0,2% acquis fin juin). Point faible de la France, celui-ci devrait finalement contribuer de façon positive à la croissance française à la mi-année.
8,9% de chômage fin juin
Reste donc à connaître l’évolution de la consommation des ménages. Entre la baisse du chômage, qui devrait se maintenir à 8,9% jusqu’à fin juin (soit 0,5 point de moins qu’en juin 2017) et l’accélération des salaires dans le privé (+2% en 2017), le pouvoir d’achat des consommateurs devrait s’améliorer et les inciter à dépenser leur argent.
Problème, les taxes sur le gaz et le tabac ont fait grimper les prix faisant, avec la hausse de la CSG, baisser le pouvoir d’achat des ménages. Finalement, leur consommation est “en demi-teinte” en ce début d’année (+0,3) mais devrait “rebondir au printemps” (+0,4), d’après l’Insee. Quid de la suite?
Les consommateurs vont-ils anticiper les gains de pouvoir d’achat?
Cela va dépendre de la façon dont les Français vont anticiper le calendrier des mesures du gouvernement. Plusieurs dispositions en faveur du pouvoir d’achat ne le sont pas encore. Par exemple, la suppression des cotisations à l’assurance chômage sera totale en octobre, la taxe d’habitation est habituellement payée en novembre et l’IFI (le nouvel ISF, ndlr) en deuxième partie d’année. Il va donc falloir attendre avant que les Français puissent observer ces gains. Les mesures fiscales du gouvernement auront une “contribution très positive” au pouvoir d’achat au dernier trimestre 2018, selon la note de décembre de l’Insee. En attendant, l’acquis de croissance du pouvoir d’achat à la mi-année ne sera que de 0,8%.
La question est alors de savoir si les consommateurs vont anticiper ces gains. D’après l’institut, les Français vont puiser dans leurs économies pour compenser la hausse du coût de la vie de ce début d’année. Leur taux d’épargne passerait de 14,3% fin 2017 à 14% fin juin. Mais le scénario est incertain. “La baisse du taux d’épargne pourrait être plus importante que prévu”, dans ce cas la consommation serait boostée, ou alors “celle-ci pourrait à l’inverse pâtir d’un éventuel attentisme des ménages”, conclut l’Insee.
*L’acquis de croissance correspond à la croissance qui sera obtenue à la fin de l’année si le rythme s’arrêtait au second semestre. Autrement dit, si la croissance acquise en France est de 1,6% fin juin, même si la croissance est de 0% dans les mois qui suivent, elle sera au total sur l’année de 1,6%.
Avec bfm