Le président Paul Biya a présidé ce jeudi 15 mars à Yaoundé un conseil des ministres, le premier depuis octobre 2015. Après le réaménagement de l’équipe le 2 mars dernier et à sept mois de la présidentielle, le chef de l’Etat a présenté une nouvelle feuille de route au gouvernement. De la mise en œuvre des accords avec le FMI en passant par la crise anglophone, la CAN 2019 ou la conjoncture économique, voici l’essentiel du discours présidentiel dans lequel Biya fixe le cap.
L’actualité majeure, c’est que le président Paul Biya a présidé ce jeudi 15 mars au Palais de l’Unité de Yaoundé, un conseil des ministres. Le dernier en date remonte en effet au 15 octobre 2015 ! C’est dire que la tenue de cet important conseil, au cours duquel les grandes décisions de la vie publique du pays sont prises, est un évènement en soi.
Il est vrai que le chef de l’Etat n’est pas trop friand de ces conseils, hebdomadaires en règle générale dans les autres pays du Continent. La preuve est qu’avant celui de 2015, les deux précédents conseils remontaient respectivement au 9 décembre 2014 et au 27 novembre 2012. Cette fois, c’est certainement le remaniement auquel le chef de l’Etat a procédé le 2 mars dernier qui justifie la convocation du conseil. Le gouvernement reste toujours dirigé par le Premier ministre Philémon Yang, mais Biya a scellé le départ de plusieurs grosses pointures de l’ancienne équipe, ainsi qu’un jeu de chaises musicales et l’entrée dans le cabinet de nouvelles têtes. L’autre raison qui expliquerait la tenue de ce conseil est que les prochaines présidentielles devraient se tenir en octobre prochain, c’est-à-dire dans sept mois.
A 85 ans -dont 35 ans à la tête du pays- le président Biya s’apprête à briguer un septième mandat, même s’il n’a pas encore officiellement annoncé sa candidature. C’est d’ailleurs pourquoi le remaniement du 2 mars et la tenue du conseil des ministres de ce 15 mars sont perçus par beaucoup de Camerounais comme le top départ de la campagne présidentielle. Et le discours prononcé par le président, que l’on disait un temps malade, mais qui est apparu plutôt en bonne santé, ainsi que le cap qu’il a fixé justifient largement ces appréhensions formulées à la veille à quelques mois des élections.
Au travail, messieurs les ministres !
D’emblée, le chef d’Etat a tenu à féliciter les nouveaux membres du gouvernement, notamment ceux qui viennent d’y faire leur entrée et auxquels il a demandé de «savoir mériter la confiance qui a été placée en eux». «Je vous exhorte à vous mettre au travail avec ardeur, afin que nous puissions, ensemble, relever les nombreux défis auxquels notre pays doit faire face», a réitéré Biya pour qui «le peuple n’en attend pas moins de nous».Après avoir largement devisé sur la situation du pays et sur les nombreux défis à relever, Biya, à la fin de son discours, a aussi ce qu’il attend de ses ministres :
«La lourde mission qui vous est assignée exige l’engagement plein et entier de chacun d’entre vous. Il vous incombe de mobiliser pleinement les ressources humaines placées sous votre autorité, pour apporter des réponses concrètes aux aspirations légitimes de nos populations. Telle est et telle devrait être toujours la finalité de votre action».
Merci le FMI, tout ira bien pour la suite !
Comme c’est le cas ces derniers temps à l’occasion de ses rares messages à la nation, le chef de l’Etat n’a pas manqué d’évoquer la situation socioéconomique du pays ainsi que les perspectives, après les années de mauvaise passe engendrée par l’effondrement des cours des matières premières. «En dépit d’une conjoncture internationale défavorable, le renforcement des performances de notre économie, l’amélioration des conditions de vie de nos populations et la lutte contre le chômage doivent demeurer au cœur des priorités du gouvernement», s’est réjoui Biya.
Il a ce sens fait savoir à son gouvernement qu’il «est impératif de poursuivre la mise en œuvre harmonieuse du programme conclu avec le FMI». Sur la même lancée, le président Biya a souligné l’urgence de finaliser la mise en œuvre des grands projets structurants, du Plan d’urgence pour l’accélération de la croissance et du Plan spécial «Jeunes». Comme annoncé, il a cité l’entrée en service du port en eau profonde de Kribi et du deuxième pont sur le Wouri. «Ces projets, ainsi que de nombreux autres, qui sont achevés ou en voie de l’être, peuvent être inaugurés dans l’année en cours», a mis en avant le chef de l’Etat qui a toutefois reconnu que «ces belles performances ne doivent toutefois pas nous faire oublier que beaucoup reste à faire».
Comme défi, Biya a indiqué que les services de proximité à la population, notamment l’eau, l’électricité, la santé et les infrastructures routières doivent continuer à bénéficier de l’attention particulière du gouvernement, lequel a été invité à une cure d’austérité au regard du contexte socioéconomique actuel :
«Je voudrais vous réitérer, très fermement, mes instructions sur la nécessité d’une utilisation rationnelle des ressources publiques, la réduction du train de vie de l’Etat et la lutte contre la corruption. Chacun de vous devra, dans son domaine de compétence, relever le pari de la performance. La recherche de l’intérêt général et de l’efficacité, la solidarité, l’esprit d’équipe, le respect de la hiérarchie, devront en tout temps et en toute circonstance, être les boussoles qui guident votre action. C’est également à cette aune que vous serez jugés».
Crise dans les régions anglophones : la carotte et le bâton !
C’est l’un des sujets sur lequel le président était le plus attendu au regard des tensions sécuritaires qui persistent toujours et des velléités indépendantistes encore ambiantes au sein de certains groupes actifs dans les régions anglophones du pays.
«Dans les régions de l’extrême nord, du nord-ouest et du sud-ouest, l’action déterminée de nos forces de défense et de sécurité a permis de réduire drastiquement les exactions des groupes criminels qui y sévissent», a esquissé Paul Biya qui a annoncé que «les efforts à cet égard devront être poursuivis, en vue notamment d’un retour à la normale des activités économiques et sociales». Le bâton donc comme réponse aux mouvements contestataires, mais aussi la carotte puisque Paul Biya a reconnu la volonté des populations «d’être associées plus étroitement à la gestion des problèmes qui influencent directement leur quotidien». C’est ce qui, d’après lui, a justifié la création du ministère de la Décentralisation et du développement local qui vise à «apporter une réponse rapide à ces demandes récurrentes».
«J’en attends, à brève échéance, des propositions détaillées et un chronogramme relatifs à l’accélération du processus de décentralisation en cours», a ordonné le président en s’arrêtant brièvement sur le sujet des échéances électorales prévues cette année. Il a en ce sens engagé le gouvernement à prendre les dispositions nécessaires pour qu’elles se tiennent dans les conditions optimales de sérénité et de sécurité.
CAN 2019 : rendez-vous au Cameroun !
Enfin un autre sujet qui cristallise l’actualité camerounaise et au-delà africaine, c’est la CAN 2019 que le pays devrait organiser. Malgré les inquiétudes que soulève le retard dans la construction des infrastructures nécessaires, Paul Biya s’est félicité des efforts qui ont été faits jusqu’alors dans le cadre des préparatifs de la compétition. «J’exhorte les différentes administrations concernées à intensifier ces efforts, pour que le Cameroun puisse célébrer, le moment venu, avec l’Afrique et le monde, une grande et belle fête du football», a conclut Biya dans son allocution.
Avec latribuneafrique