Le ministre ivoirien de l’Agriculture et du Développement rural, Mamadou Sangafowa Coulibaly, a profité du Salon de l’agriculture, du 24 février au 4 mars à Paris, pour dresser un bilan positif de sa politique agricole, et appeler à davantage de transformations locales pour la filière du cacao.
« Nous sommes ici pour promouvoir l’investissement dans l’agriculture en Côte d’Ivoire et en Afrique ». L’objectif affiché du ministre ivoirien de l’Agriculture et du Développement rural, Mamadou Sangafowa Coulibaly, est clair : attirer des investisseurs étrangers. Il en a fait le leitmotiv de la conférence qu’il a animée le 1er mars dans le cadre du Salon de l’agriculture, qui s’est déroulé du 24 février au 4 mars à Paris.
Le gouvernement dresse un bilan positif de sa politique agricole
Nouhoun Coulibaly, directeur général de la planification, de la statistique et des projets au sein du ministère de l’Agriculture, a dressé un bilan très positif du programme national d’investissement agricole (PNIA I). Selon le ministre, le secteur était « sinistré » entre 2000 et 2010, avec « un faible niveau de l’investissement agricole, une faible productivité, une mauvaise gouvernance dans certaines grandes filières, une mise en marché des produits agricoles mal assurée et un vieillissement de la classe paysanne ».
Conséquence : l’économie ivoirienne a connu des phases de récession, notamment entre 1999 et 2003 (-1,6 %), et 2009 et 2011 (-0,8 %), tandis que le revenu par habitant a chuté à un niveau inférieur à celui de 1960. Mais depuis, assure Nouhoun Coulibaly, la politique agricole menée depuis 2012, avec pour objectif de « recapitaliser les ménages et d’améliorer la logistique de mise en marché », a permis de renverser la tendance.
10 % de croissance pour le secteur agricole
Ainsi, d’après le dernier rapport de la Banque mondiale, la Côte d’Ivoire a connu une hausse de l’activité économique de 7,6 % en 2017, tandis que le secteur agricole a cru à plus de 10 %. Pour Nouhoun Coulibaly, il y a cependant encore des problèmes à régler, tels que la structuration du secteur, l’accès au financement et l’environnement des affaires.
Le nouveau programme national d’investissement agricole (PNIA II), couvrant la période 2018-2025, vise justement à « développer la valeur ajoutée, renforcer la protection de l’environnement et stimuler une croissance inclusive », souligne le directeur général de la planification.
Cette stratégie agricole passe par le développement d’unités de transformation décentralisées au sein de neufs « zones spéciales de production et de croissance » et une meilleure fourniture des services sociaux de base (éducation, électricité, santé, eau potable) par l’État ivoirien.
Davantage de transformations locales
Après une intervention de la secrétaire générale du Syndicat du chocolat, Florence Padrier, consacrée au « cacao durable », le ministre de l’Agriculture Mamadou Sangafowa Coulibaly a indiqué que, pour lui, la problématique de la « durabilité » se pose en termes de partage de la valeur ajoutée.
En effet, « alors que le marché du chocolat atteint 100 milliards de dollars au niveau mondial, seul 6 % de cette somme revient au pays producteur. Et 2 % aux planteurs de cacao », a-t-il regretté, arguant qu’un meilleur partage de la valeur ajoutée dans ce secteur permettrait de réduire la pauvreté et de diminuer la déforestation.
Qu’est-ce que vous attendez pour délocaliser une usine à Abidjan ? », a demandé Mamadou Sangafowa Coulibaly
Concernant la filière du cacao, Mamadou Sangafowa Coulibaly a indiqué que la Côte d’Ivoire s’est rapprochée avec le Ghana pour accroître la pression sur l’industrie chocolatière, une des voies explorées pouvant être la réduction du nombre d’intermédiaires dans le secteur.
Promouvoir les investissements dans le pays
Le ministre a ensuite exhorté les entreprises agroalimentaires, notamment dans le domaine du cacao, à s’implanter dans le pays, défendant les mesures d’incitation mises en place. En effet, plus les cabosses sont transformées dans le pays, moins la production sera taxée, jusqu’à atteindre 0 % pour la transformation en tablettes de chocolat.
« Qu’est-ce que vous attendez pour délocaliser une usine à Abidjan ? », a-t-il demandé aux représentants de l’industrie chocolatière, citant l’exemple d’implantation d’une usine Cemoi, qui devrait bientôt augmenter ses capacités de production devant le succès de ses produits destinés au marché local qui sont désormais exportés vers l’Europe.
La Banque mondiale critique cette stratégie
Reste que pour la Banque mondiale, la stratégie retenue pour accroître la transformation n’est pas la plus appropriée. Dans le dernier rapport consacré au pays, l’institution note en effet que si le pays compte pour 20 % de la première transformation des fèves de cacao en pâte et liqueur industrielle, elle n’amène que peu d’emplois. Le véritable enjeu est la deuxième transformation – de la pâte au chocolat – qui capte environ 35 % de la valeur ajoutée le long de la chaîne de valeur.
« Or les barrières à l’entrée de ce marché lucratif sont nombreuses », indique le rapport. Celles-ci sont liées au manque de compétitivité de l’industrie ivoirienne, « qui souffre du coût élevé de l’électricité, du manque de productivité de la main-d’œuvre et de la sécurisation foncière ».
Enfin, le chocolat est difficile à transporter, ce qui est problématique en raison de l’éloignement des principaux marchés de consommateurs et le secteur est dominé par quelques entreprises multinationales, « non seulement capables de réaliser des économies d’échelle mais qui détiennent le savoir-faire ».
Dès lors, accélérer la transformation économique du pays passe par une stratégie d’ouverture aux investissements directs étrangers et aux exportations qui favorise les « transferts technologiques indispensables au développement durable des entreprises ».
Avec jeeuneafrique