Les concessionnaires automobiles tunisiens se considèrent doublement lésés par les hausses des taxes sur les importations prévues dans le projet de loi de finances 2018 et par la circulaire de la Banque centrale sur les produits de consommation non essentiels. Ils préviennent qu’en l’état, le prix des voitures essence neuves de moyenne gamme devrait augmenter de 13 à 30%.
La Chambre syndicale des concessionnaires automobiles, qui dépend de l’Utica (Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat), le principal syndicat patronal, explique cette hausse des prix à venir par l’augmentation de 25% des droits de consommation pour l’importation des véhicules particuliers, de 10 à 15% des droits de douane pour les utilitaires et de 1% de la TVA.
Ces mesures, qualifiées de « dramatiques » par Mehdi Mahjoub, porte-parole de la chambre syndicale et patron de City Cars (Kia), sont inscrites dans le projet de loi de finances 2018.
Les voitures, des produits « non essentiels »
Mais c’est la circulaire de la Banque centrale de Tunisie – plaçant les véhicules dans la catégorie des produits « non essentiels » – qui fait l’objet des principales critiques. Dorénavant, les importateurs doivent apporter une caution équivalente à la valeur des marchandises achetées pour se voir délivrer une lettre de crédit.
Par ce document, la banque de l’importateur s’engage à payer le vendeur après que celui-ci a fourni les documents nécessaires. La lettre de crédit est très largement utilisée dans les transactions internationales car elle donne une sécurité à l’importateur de recevoir son bien et à l’exportateur d’être payé.
Effort de trésorerie
Pour Mehdi Mahjoub, cela revient à demander aux concessionnaires de bloquer les fonds sept mois avant la production des voitures. Un effort de trésorerie incompatible avec le fonctionnement actuel qui laisse 180 jours aux importateurs pour régler leur lettre de crédit.
La part de l’État dans les prix d’un véhicule de moyenne gamme passerait à plus de 50%, alors qu’au Maroc les taxes ne représentent que 20% (TVA) car il n’y a ni droits de douane, ni droits de consommation. De plus, les importations de véhicules sont soumis à des quotas par le ministère du Commerce.
Je vois mal comment certains concessionnaires pourront survivre », prévient Mehdi Mahjoub
En outre, les véhicules neufs coûtent déjà cher en Tunisie : 23 448 dinars (8 080 euros) pour une Kia Picanto, 24 880 dinars pour une Peugeot 108 (8 573 euros) ou encore 89 200 dinars (30 773 euros) pour une BMW Série 1, alors que le salaire moyen mensuel est de 700 dinars (240 euros).
« Entrave à la libre concurrence »
« Je vois mal comment certains concessionnaires pourront survivre », prévient Mehdi Mahjoub. La société UADH (Universal Auto Distributor Holding, groupe Loukil) qui commercialise les marques Citroën, DS, Mazda et Renault Trucks, a connu, par exemple, une chute de sa trésorerie de 112% entre 2015 et 2016, selon le Conseil du marché financier.
Nous sommes là pour maîtriser les déficits », je justifie-t-on au gouvernement
« Nous sommes là pour maîtriser les déficits [à 4,9% du PIB fin 2018, contre 6,1% en 2016], pas pour faire plaisir au corporatisme des importateurs », explique une source proche du gouvernement.
La chambre syndicale des concessionnaires a envoyé un courrier à la Banque centrale et envisage d’attaquer la légalité de cette circulaire pour entrave à la libre concurrence.
En 2016, les immatriculations de véhicules légers (60 595 voitures) ont progressé de 11,8% par rapport à 2015, tandis que les ré-immatriculations ont baissé de 15,1% (23 613 véhicules).
Avec jeuneafrique